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16 novembre 2008 7 16 /11 /novembre /2008 12:08

Il y a un peu plus de 32 ans, affublé du surnom de "Bande des quatre", le groupe qui avait joué un rôle prééminent durant la décennie précédente d'extrémisme gauchiste, celle de la Révolution Culturelle, était définitivement déchu. Aujourd'hui, leur évocation n'est plus de mise : "la plupart des gens les associent à la période la plus cauchemardesque de l'histoire de la République populaire", soulignait pour le trentième anniversaire de la chute de cette fameuse équipe un éminent sinologue. "Ils se souviennent de leur pouvoir excessif et de leur capacité à semer le chaos", ajoute-t-il. Conscients de devoir leur puissance au « Grand Timonier » lui-même, les quatre visaient apparemment à s'emparer du pouvoir suprême, après son « décès » physique et politique, le 9 septembre 1976. Mais Hua Guofeng, un cadre peu connu, choisi pour succéder à Mao, devait déjouer leur plan en les faisant arrêter. Peu de détails ont filtré sur les péripéties et les luttes de pouvoir dont le sort s'est scellé dans une nuit ayant précédé l'arrestation et le procès-spectacle qui s'ensuivit. Ils furent alors désignés comme les cerveaux de la Révolution culturelle, les seuls responsables de cette décennie dramatique à laquelle la Chine voulait désormais tourner le dos, les seuls coupables de tous les errements du règne de Mao.
Vilipendés comme radicaux, les quatre furent embastillés, et ils tombèrent dans l'oubli, jusqu'à leur mort. Leur chef, Jiang Qing, ancienne... starlette de Shanghai devenue "l'impératrice rouge", et qui incarnait les excès de la Révolution culturelle, s'est... suicidée, le 14 mai 1991, alors qu'elle était en résidence surveillée. Condamnée dix ans plus tôt à mort, elle avait vu par la suite sa peine commuée en détention à perpétuité. Le dernier survivant du groupe, Yao, diabétique, s'est éteint, lui, en décembre dernier. Hua Guofeng pour sa part, n'a pas connu le grand destin qu'aurait pu lui valoir son action d'éclat. Il vit aujourd'hui dans l'ombre où il a été rapidement poussé par Deng Xiaoping, père de "la réforme et l'ouverture" qui fit entrer la Chine dans l'ère économique moderne. En fait, beaucoup de gens ont déjà oublié la Bande des quatre. Les jeunes ne savent même plus qui ils étaient exactement.
Un oubli que ne devraient pas réparer les médias officiels, généralement silencieux sur cette période sensible, au point de ne pas avoir couvert, cette année, le trentième anniversaire de la mort de Mao, ni celui de la fin de la Révolution culturelle. "Les dirigeants actuels n'assument pas encore totalement cette partie de l'Histoire. Cela crée des incompréhensions graves sur cette période parmi les Chinois ordinaires. C'est triste", commente un historien de l'Académie chinoise des sciences sociales.

LES COURTISANS DEVASTATEURS

En fait, la Bande des Quatre, obnubilée par la seule conquête du pouvoir, avait fini par détruire totalement la structure dont elle était issue. D'abord par autodestruction de ses membres, puisque leurs rivalités personnelles ont fini par prendre le dessus sur toutes les autres considérations. Ensuite, par lassitude grandissante des gens auxquels étaient destinés leurs actes, les quatre ont été inexorablement conduits à leur perte. Ils n'ont jamais pris conscience que l'avidité de contrôle des appareils, quels qu'il soient, finit par conduire à la défaite personnelle et collective. Enfin, ils ont été désavoués par le parti lui-même, qui a fini par considérer que leur présence finirait par faire s'effondrer l'édifice bâti depuis des années. Il n'a pas fallu des réunions démocratiques pour décider de leur sort, puisque de la manière la plus brutale, ils furent « exterminés ». Pour n'avoir eu que des cours autour d'eux, pour avoir eu des fans admiratifs et prêts à les encenser, même dans les moments les plus terribles de leurs pratiques. La sclérose vient de la servilité intéressée, qui conduit à suivre aveuglément une personne plutôt qu'une autre, sans trop se soucier de la motivation qui la conduit à exercer un pouvoir ou à vouloir le faire. La bande des quatre s'est disloquée à partir du moment où il lui fallait assumer la responsabilité des actes commis, assumer le passé sans être capable d'ouvrir des voies vers l'avenir. Cette situation, tout à fait spécifique à la Chine, porte pourtant les germes d'une analyse plus globale des situations politiques mondiales. En fait, la personnalisation outrancière du portage des idées finit par tuer les idées elles-mêmes. Même s'il n'est pas question d'approuver un système chinois extrêmement critiquable, on peut se demander si la dérive de la bande des quatre n'a pas de nombreuses illustrations extérieures avec des variantes diverses.

LES MILITANTS ET LES FANS
On a combattu farouchement ce qui fut le « culte de la personnalité », dont on a découvert, parfois tardivement, les dérives dramatiques. Or, depuis maintenant deux décennies, il est entré de manière différente dans la vie publique; il y est installé à demeure, et il colle déosrmais à la réalité quotidienne des partis. Plus que jamais, beaucoup plus que jamais, les médias ont besoin d'une personnalisation pour vendre ce qui est devenu invendable : la politique ! Les élections américaines sont à peine terminées. Personne ne met en cause la manière dont Obama a transformé une campagne électorale en marketing pur et simple. C'est tabou, car tout le monde espère utiliser les mêmes recettes à son compte ! Partout s'installe cette vision sociale admettant la disparition du « militantisme de débat » au profit de « l'adhésion fanatique ». Cette mutation profonde qui envahit le paysage social détourne les citoyennes et les citoyens de l'action concrète collective. En fait, toute critique, toute liberté assumée ou accordée deviennent suspectes, car elles sont prises trop souvent, dans nos démocraties, pour des marques d'infidélité de fans à une personne, et certainement pas pour des différences sur des principes.
La bande des quatre était arrivée à l'outrance absolue, et elle n'a pas résisté dans une non-démocratie. Or, bizarrement, elle a fait des émules dans ce que l'on pense être encore des démocraties. Le culte de la personnalité désigne l'adulation excessive d'une femme ou d'un homme politique dans un régime totalitaire. Par extension, elle peut s'appliquer à toute personne en vue, bénéficiant d'un fort battage médiatique. Le culte de la personnalité est entretenu par divers moyens de propagande, et suppose en particulier une large utilisation des médias et des évènements collectifs, des rassemblements et des manifestations, spontanés ou non. A méditer... car ce n'est pas en France que ça arriverait !
Mais je déblogue...

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commentaires

F
<br /> Félicitations pour votre site, merci à vous de partager ces astuces, et notez dans un premier temps que je "plussoie" moi aussi cette opinion... Euh, votre blog est réellement bien bon, je viens<br /> tout juste de découvrir votre site et l'ai entièrement parcouru ! PS : Merci encore !<br /> <br /> <br />
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D
C'est clair, cela ne risque pas d'arriver en France!Jamais au grand jamais nos dirigeants, UMP ou futur(e) PS ne s'abaisseraient à faire usage de ces moyens... Populisme et démagogie ne sont pas morts loin de là ! ! !Et les électeurs-auditeurs-téléspectateurs-consommateurs de tous poils en raffolent ...
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L
J'adore ... te revoilà en passeur de mots et d'idées ... C'est vrai ça c'est pas en France que ça arriverait ... C'est sans doute pour cela que je n'ai jamais été groupie, ni fan, j'ai toujours essayé d'apprécier la juste valeur des personnes et de leurs actes ...  C'est paradoxal moi dont le métier est de faire l'image des autres ... mais ce refus de la béatification ou du fétichisme m'a permis de ne jamais devenir schizophréne. Je sais d'où je viens, je commence à savoir où je suis et je sais où je ne veux pas aller ... ;-)
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