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25 juillet 2006 2 25 /07 /juillet /2006 00:17
 
Plus personne ne veut être " vieux ". " Agé(e) " c’est tout juste, alors vieux, vieille ou vieillard c’est impensable. Nous sommes partis sur le concept inimaginable de l’immortalité potentielle. Tout le progrès a été axé sur ce souci qui hante les esprits du plus grand nombre : quitter ce monde le plus tard possible et considérer que la mort est l’affaire des autres.
Je suis frappé, par exemple, quand j’observe la lecture qu’ont certaines personnes des carnets d’obsèques de Sud-Ouest. Selon leur ancienneté dans l’exercice, ils repèrent le plus vite possible la localité et les noms, avant de chercher l’âge du défunt. Et là, quand ils constatent qu’il s’agit d’un septuagénaire, la réflexion vient inévitablement : " le pauvre, il était encore jeune ! ". Et plus le temps avance, et plus le constat désolé s’applique à des gens ayant dépassé les trois-quarts de siècle. Bientôt les octogénaires seront considérés comme des victimes de ce mal irrémédiable qu’est la mort. Certes on sait que la longévité augmente, et qu'en un siècle elle a fait un bond considérable, mais elle semble ne plus avoir de limites !

CHANGEMENT DE CAP POUR LES ESPERANCES
Ainsi, en France, l'espérance de vie des hommes ayant déjà atteint 70 ans, avait constamment oscillé entre 7 et 9 ans supplémentaires du début du XIX° siècle à la seconde guerre mondiale. Elle avait dépassé 13 ans en 1997. Chez les femmes, le progrès a démarré un peu plus tôt, entre les deux guerres, et l'on est passé d'un niveau jusqu'alors à peu près constant de 8 à 10 ans à près de 17 aujourd'hui. On note le même changement de cap pour les espérances de vie à 80 et 90 ans, et si les progrès récents paraissent moins rapides à ces âges qu'à 70 ans, c'est seulement en raison de l'échelle du graphique arithmétique. En effet, les gains relatifs sont tout aussi importants : un progrès de plus de 60 % chez les hommes et un quasi doublement chez les femmes.
Les cas d'extrême longévité ont toujours fasciné. Ainsi d'après la Bible, le premier homme, Adam, aurait vécu… 930 ans et d'autres après lui auraient fait encore mieux, tels Hénoch mort à 965 ans ou le champion des champions, Mathusalem, avec ses 969 ans ! Si un jour quelqu’un vous dit que vous datez de Mathusalem, méfiez-vous, c’est quasiment une insulte. Tout cela n'est bien évidemment que légendes. La Bible est pleine d'images épiques, et de l'âge des patriarches, comme si elle devait vendre, avant le paradis, la longévité terrestre. Pour les jeunots arrivés après le déluge, les estimations sont d'ailleurs beaucoup plus " modestes " : 275 ans pour Abraham, 180 pour Isaac, 147 pour Jacob, 110 pour Joseph... Ce qui rapproche évidemment des espoirs actuels.
À une époque plus récente, les centenaires du Caucase ou ceux de quelques vallées andines ont défrayé la chronique, sans parler des centenaires de la Géorgie américaine. Si ces cas ont pu paraître, un temps, plus vraisemblables, on sait aujourd'hui qu'ils ne correspondaient à aucune réalité, car il ne s’agissait que d’interprétations " civilisées " de rythmes vitaux totalement imprécis.

UN PATRIMOINE GENETIQUE SPECIFIQUE
Ce sont là, en fait, trois références d'un phénomène très classique : dans beaucoup de sociétés, les vieillards inspirent déférence et respect et, lorsque l'état civil des individus n'est pas solidement établi, les âges déclarés pour les très vieux sont la plupart du temps surestimés. Il suffit alors qu'une argumentation spécifique, dénichée par un spécialiste, rende la chose plausible (comme, par exemple, les effets de la vie en haute montagne ou de la consommation de produits naturels, quand ce n'est pas l'hypothèse d'un patrimoine génétique spécifique à une population isolée) pour que naisse une légende...
On cherche désespérément à se raccrocher à des éléments réputés scientifiques. La nourriture arrive en premier. Le yaourt a tenu la route. L’oignon cru a été loué. L’huile d’olive est devenue le nec plus ultra et l’on murmure que dans quelques décennies il sera possible de faire fortune avec des oliveraies sophistiquées classées " grand cru " dont on vendra les " premières pressions " à prix d’or. On parle des huiles de poisson. On cherche… on cherche…on invente… de telle manière que le consommateur rêvant d’éternité vivante, et non pas potentielle, trouve les produits de l’espoir.
Dans cette aventure, les femmes distancent de très loin les hommes. Les effets cumulés de la surmortalité de ces derniers, à tous les âges de la vie, conduisent en effet à un extraordinaire déséquilibre entre les sexes : après 100 ans, il ne reste plus qu'un homme pour sept femmes. En fait, cette proportion change très vite aux très grands âges : elle est encore d'un homme pour quatre femmes à 95 ans, mais n'est plus que d'un homme pour dix femmes à 104 ans.

LE DESESPOIR DES QUADRAS
C’est probablement ce constat scientifique qui a provoqué le désespoir des " quadras " du Parti socialiste, probablement réunis pour un banquet " macro bio " dans un restaurant parisien. Ces ténors prometteurs de la vie politique française ont vu venir le danger : les " vieux " ne semblent pas décidés à leur faire une place au soleil. Pire ils s’incrustent et prennent racines, démontrant que la valeur peut attendre le nombre des années. Et le pire, c’est que si les femmes s’installent, elles resteront fidèles au poste encore plus longtemps que les hommes ! Dramatique… Regardez un peu pour les Présidentielles qui s’annoncent en 2007 : Le Pen affichera 79 ans au compteur de sa haine ; Chirac aura 75 ans , Jospin atteindra les 70 ans et Arlette Laguiller, avec ses 67 printemps sera la benjamine des revenants… autant dire que l’avenir est devant elle.
Dans un article récent du Monde (5 février), la classe biberon socialiste se rebelle en mettant en avant le fait qu’ils deviennent les oubliés de la politique et que, parole de quadras, le P.S. le regrettera un jour. Brimés par les femmes qui piquent 50 % des places au moment où leurs ambitions peuvent éclore, doublés par les éléments les plus prometteurs de la seconde ou troisième génération de l’immigration, écartés par les papis flingueurs des courants ils sentent le pouvoir leur échapper. Il ne leur reste plus beaucoup d’espace de progression, et il leur faut nécessairement pousser vers la sortie les nantis de l’âge.
Le seul problème c’est que ces critiques liées au poids des ans et à l’excès d’expérience en politique les fâchent avec l’électorat des retraités qui n’aime guère que l’on dévalorise ses égaux dans la vieillesse. Jospin en a fait les frais en se lâchant sur l’âge de son rival aux présidentielles. Les " seniors " (ont ne dit surtout plus les vieux) ont la rancune tenace quand on leur demande hâtivement de débarrasser le plancher..
Au fait j’ai 59 ans aujourd’hui… Poussez pas !.. Poussez pas ! Poussez pas!.. Il y aura de la place pour tout le monde !
Mais je déblogue…
Chronique publiée le 17 février 2006
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