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25 août 2006 5 25 /08 /août /2006 07:17
Existe-t-il un phénomène naturel plus décrié, à certains moments, que la pluie ? Quand on ne sait trop quoi dire à l’autre on lui parle davantage de la pluie que du beau temps… Cette arrivée céleste peut être l’objet d’une fête enthousiaste, comme elle gâche celle que l’on prévoyait sous le soleil. Ce phénomène naturel essentiel pour la vie sur la planète recouvre des réalités fort différentes. L’appréciation que l’on porte sur lui varie d’ailleurs selon le degré de richesse. La pluie ne peut être détestée que par celles et ceux qui n’attendent rien de la terre nourricière. Les autres, ne pouvant pas s’en passer, s’adaptent aisément à ses conséquences.
Dans le monde, il existe en effet des contrées dans lesquelles l’apparition du moindre nuage procure une joie particulière.
Lors d’un déplacement au Burkina Faso, en limite du Sahel, j’ai constaté combien l’attente de cette apparition générait de supputations. Les poulets sacrifiés en portent témoignage. La saison des pluies revêt une importance tellement vitale que toutes les communautés sont prêtes à vendre collectivement leur âme contre une période extrêmement arrosée. Les moindres espaces du village ont été aménagés pour que l’eau puisse s’installer durablement. Creusement de rigoles draînantes, de parterres ensemençables dès la fin des précipitions aussi brèves que violentes, recherche de récipients de tous ordres : on a tellement espéré en cette venue que rien n’est trop beau pour l’accueillir.
La précarité alimentaire constituant quasiment l’unique souci, c’est l’absence de venue de la manne céleste qui prend des allures de drame. Les femmes et les hommes savent ce qu’ils peuvent espérer de la terre humide et ils redoutent ce que leur donnerait une terre sans eau…
Dans les sociétés dites civilisées, il faut bien se rendre à l’évidence, les loisirs, durant certaines périodes, font craindre que les orages ou les averses viennent déranger nos rêves de barbecue dans le jardin ou de sorties familiales. Peu importe le caractère vital de cette arrivée de cumulo-nimbus, elle dérange le bel ordonnancement de la vie idéale faite de soleil permanent. Lui seul est déïfié à l’égyptienne par un système qui minimise toujours bizarrement les conséquences de l’exposition aux rayons solaires, pour au contraire vanter leurs mérites. Même si, lentement, les esprits évoluent, nous sommes encore sous le règne de Râ, dieu tout puissant, seul susceptible d’apporter le bonheur de l’insouciance absolue. En retrouvant votre boulot, faites donc un test et analysez le regard que vous posez sur deux visages : l’un outrancièrement bronzé et l’autre aussi laiteux ou rose que les fesses d’un nouveau né… Soyez honnête et avouez qu’entrer dans un groupe en ne portant pas les stigmates standard d’une exposition soutenue au soleil relève quasiment de la marginalisation sociale. Vous avez le plus grand mal à persuader votre entourage su la qualité de vos vacances ou sur votre moral. Pas sûr que votre patron ou votre chef hiérarchique ne voit pas dans cette " négligence " un signe annonciateur d’un mal-être personnel inquiétant.
DES PLANS ANTI PLUIES
Les retraités font donc de plus en plus des plans anti-pluie. Certains, paraît-il, vont même jusqu’à émigrer au Maroc ou en Tunisie dès que le mauvais temps s’annonce chez nous. Je connais un chef d’entreprise en préretraite qui part 3 semaines vers Rabat, et qui revient régler la marche de ses affaires une semaine par mois. Le reste il le fait de là-bas par inernet ou fax ! Il paraît que des camping-caristes n’hésitent plus à aller se dorer la peau en Afrique du Nord ou dans le sud de l’Espagne une bonne partie de l’année, ajoutant au plaisir de s’éloigner des " ondées passagères " telles que les annonce Météo France, celui d’une vie moins chère. D’autres calculent savamment le lieu de retraite en fonction des statistiques d’ensoleillement.
Ce n’est plus un scoop que de constater que les villes de la Méditerranée deviennent des " réserves " de vieux, et que le phénomène commence à toucher fortement la Gironde, expliquant par exemple le nombre croissant de dossiers d’Aide Personnalisée à l’Autonomie (APA) auquel doit faire face le Conseil général.
Par exemple, connaissez-vous le nombre de jours " gris " (sans apparition totale du soleil) relevé en 2005 ? Il est étonnant avec seulement 20 journées à Ajaccio sur 365, et l’impressionnant bilan de… 78 à Strasbourg. Je suis certain que vous perdrez vos repères, liés aux a priori habituels. Brest ne compte que 58 jours gris ou Bordeaux n’atteint que le nombre de 39… Comme quoi, il faut se méfier des appréciations faisant, dans tous les domaines, des réputations désastreuses. Cherbourg capitale cinématographique du parapluie a eu 68 ciels sans lumière, et Paris 58. Quant au Cap-Ferret, lieu culte, il se satisfait de 38 alors que Saint-Tropez est à 29 ! Et rien ne dit que ces journées aient été entièrement pluvieuses puisque la grisaille ne s’accompagne pas toujours de précipitations. N’empêche que ce sont celles-ci qui resteront comme ayant gâché votre vie.
ATTEINTE VERITABLE A LA COUR DU ROI SOLEIL
Le soleil est bel et bien le roi de notre société, puisque son influence faste ou néfaste sur notre quotidien " éclipse " le reste. Ne vient-on pas, dans un symposium mondial, de lui consacrer une bonne part du temps de recherche d’éminents savants ? Soixante-seize ans après sa découverte, Pluton vient en effet, événement capital, de perdre son statut de planète. L’assemblée générale de l’Union astronomique internationale a voté hier une définition du terme ‘’planète’’ qui distingue les huit planètes classiques du système solaire – Mercure, Vénus, la Terre, Mars, Jupiter, Saturne, Uranus et Neptune - des planètes dites naines, dont fait partie Pluton. Les résolutions, votées à Prague par 2.500 astronomes, ont été rédigées à l’issue d’une semaine de vifs débats et d’intenses négociations. Pire que pour une résolution de l’ONU sur le Liban ! En fait, il s’agit d’une atteinte véritable à la cour du roi Soleil, dont malheureusement le pékin moyen n’a pas conscience.
Le soleil, beaucoup plus que l’eau a, pour le grand public, des vertus capitales pour le maintien de la dynamique de la terre. Dans quelques années son énergie deviendra, c’est une certitude, encore plus capitale pour le confort des habitants. Impossible d’imaginer que les substitutions des énergies non renouvelables ne reposent pas sur l’astre suprême. Dans les années 50, on parlait dans les écoles de la " houille blanche ", en citant l’extraordinaire potentiel que représentaient pour une nation ses cours d’eau et ses barrages. L’arrivée du nucléaire a fait ranger au rayon des idées dépassées cette utilisation des pluies ou de le neige… Paradoxe d’une histoire qui ne se renouvelle soit-disant jamais mais, et qui voit les hommes sans cesse réinventer ce que leurs prédécesseurs avaient déjà fait sous une autre forme. On oubliera donc l’eau, pour donner un rôle accru au soleil qui fut, en des temps lointains, vénéré pour ses bienfaits, puis oublié.
EAU REPUTEE INEPUISABLE
La société est traversée par des tendances plus ou moins durables. L’eau, durant des siècles, était réputée inépuisable, et pas nécessairement profitable à la vie agricole. On s’adaptait à ses caprices, avant que l’on cherche à la domestiquer et donc à la rendre dépendante du bon vouloir des hommes. Le ciel qui tombait sur la tête n’était pas nécessairement synonyme de malheur annoncé, puisque l’on acceptait avec fatalité les conséquences de ses actes. Il est vrai que la pluie n’était jugée que par son caractère utilitaire, alors que désormais, elle ne gâche souvent que le superflu. Et c’est devenu le plus grave…
En 2001 sur les 6 premiers mois de l’année, en moyenne nationale, la pluviométrie avait été de 828 mm. Cinq ans plus tard elle est tombée à... seulement 510 mm. Une illustration inquiétante des enjeux réels des rapports entre l’homme et la nature. Economiquement, un mois d’août arrosé plombe  l’économie touristique… mais rassure celle de l’agriculture. Un hiver sans neige rassure les gens qui craignent en aval les inondations, mais ravissent les stations de ski.
Nous sommes toujours entre deux choix, entre deux cartes météo dont nous sommes inexorablement enclins à douter. Or en 1999, les prévisions des modèles à 3 jours étaient aussi bonnes que les prévisions à 24 heures en 1983. Depuis 1998, l'échéance des prévisions diffusées au public a été portée à 7 jours d'échéance… et elles sont aussi fiables que celles antérieurement diffusés pour 3 jours. Le malheur, c’est qu’actuellement, personne n’a encore le pouvoir de faire pleuvoir quand il veut et où il veut. Il faut bien laisser un espoir à Nicolas Hulot pour son programme de présidentiable.
Mais je déblogue…
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24 août 2006 4 24 /08 /août /2006 07:17
Le bonheur n’est pas toujours nécessairement dans le pré. Il ne se trouve pas davantage dans la solitude, même si parfois une cure de désert peut procurer une immense joie. Il se joue des limites, et peut donc surgir à chaque instant, de germes oubliés sur le bord du chemin de la vie. Plus il se révèle inattendu, et plus il a de prix. Hier soir, par un mois d’août préhivernal, j’ai, par exemple, trouvé une étincelle de ce plaisir inassouvi pour moi qu'est le partage. Depuis des mois, j’attendais ce moment qui rassemblerait au cœur de la ville bastide des dizaines de Créonnaises et de Créonnais de tous les âges, désireux d’offrir de leur temps et de leur amitié pour les fêtes de celle qui deviendra leur Rosière. Il est arrivé et, à chaque instant, il m’a réchauffé le cœur comme les quatre bouts de bois de l’Auvergnat de Brassens.
Je ne conçois pas, en effet, de vie collective sans participation, à son rythme, avec ses moyens, avec sa passion, de la population d’un quartier, d’un village, d’une ville. Or, de 7 à 77 ans, ils étaient là, hier soir, plus d’une centaine, heureux de construire le spectacle " Il était une fois les Rosières ". Encore une fois, grâce à eux, les fêtes ne seront pas, à Créon, une importation clé en mains, inspirée de la toute puissante télé, mais une véritable création collective dans laquelle chacune et chacun aura sa part. Modeste ou décisive, mais ils y  auront leur part. Je suis en effet viscéralement attaché à ces rencontres sur un projet collectif, car c’est ce qui manque le plus à la société actuelle : bâtir ensemble un acte de communication vers les autres, et se soumettre à leur appréciation.
J’ai voulu, depuis maintenant un quart de siècle, cette osmose entre les " anciens " bénévoles qui, parfois depuis des décennies, se dévouent afin que perdure l’animation de leur cité et des habitants récents ou même extérieurs. Je suis bêtement heureux quand, par hasard, une superbe alchimie transforme, grâce à la pierre philosophale de la citoyenneté, le plomb de l’indifférence en or de la participation.
Je l'ai été, quand sur la place, dans une froidure de Toussaint, alors que s’annoncent deux soirs pourris risquant de gâcher tous leurs efforts, ces gens heureux ont répété dans la bonne humeur, dans l’insouciance et dans l’esprit festif que j’apprécie tant. Seul, le coude à coude, l’indispensable solidarité, autorisent cette ambiance faite à la fois d’indulgence et de sérieux. Même si la durabilité de tels comportements ne saurait être garantie, elle dépasse l’instant de la rencontre, car il faut des répétitions, du dialogue et de la continuité dans l’action pour parvenir à un résultat intéressant. Et ils s’y sont astreints librement, comme dans tous les projets créonnais.
Depuis des années, je m’évertue, par le fait associatif, à cristalliser les énergies les plus vives. Pas plus tard que ce matin, une dame s’est naturellement présentée au secrétariat de la Mairie pour me demander un rendez-vous. Comme je m'inquiétais du motif de sa demande, elle m’a avoué s’ennuyer mortellement, et ne pas avoir d’objectif réel dans sa vie. Elle sollicitait de ma part une piste pour pouvoir s’investir au service des autres, afin de conjurer la longueur inutile de ses journées. Malheureusement, alors que je lui proposais de s’associer à une démarche collective, elle a refusé pour insister sur sa volonté de servir des personnes aussi seules qu’elle… comme si solitude plus solitude donnait une clé pour un avenir plus souriant. Reflet réaliste de la déviance sociale actuelle.
INELUCTABLE MONTEE DE LA MARGINALISATION
Le problème essentiel de la vie "rurbaine" réside dans cette inéluctable montée d’une forme rarement analysée de marginalisation, découlant des choix de vie. Comment arriver à persuader des jeunes et moins jeunes que le salut ne repose pas sur la culte de la maison, du gazon et forcément de la télévision… du DVD ou d'internet ? L’ennemi finissant par être, tôt ou tard, le voisin ou " l’autre ", il y a toujours un fossé entre les voisins qui finit  trop souvent par ressembler à un précipice infranchissable. On s’isole dans une tour qui n’a rien de l’ivoire. On se réfugie dans la fuite égocentrique. On élargit électroniquement son horizon
Les associations de lotissement deviennent par exemple des structures où s’expriment les pires égoïsmes. La préoccupation essentielle devient en effet rapidement la manière dont, collectivement, on peut se débarrasser de la gestion des espaces communs. Rares, très rares sont les projets solidaires d’amélioration, ou au moins de conservation, de l’environnement proche. Peu de tentatives de rassemblements conviviaux. Refus rapide de participer financièrement à la gestion du patrimoine commun. Condamnation inévitable des rares bonnes volontés " élues ". Critiques véhémentes sur le fait que d’autres peuvent obtenir, à proximité, un droit à construire qu’il a fallu leur accorder rapidement. Une synthèse rapide conduit à conclure à une véritable déliquescence de la citoyenneté personnelle dans ces juxtapositions de maisons individuelles que l’on a cru libératrices, et qui finalement éloignent. Et c’est pire dans le mitage de l’espace rural en cours. Le Front national s’incruste dans les plus petits villages à cause de cette absence totale de lien social. L’essentiel de l’évasion vers les autres réside dans le trajet domicile travail, ou dans la structuration matérielle (murs d’enceinte fortifiée, haies géantes, portails sécurisés, molosses de garde…) de l’isolement. Plus on devient étranger à son milieu de vie, et plus on est réputé être heureux... durant un certain temps car, tôt ou tard, les fortifications cèdent. Le splendide isolement devient insidieusement vite maladif ou dévastateur.
CONTRIBUER A CHANGER LE MONDE
Hier soir, tard, frigorifiée mais heureuse, cette centaine de Créonnaises et de Créonnais m’a donc offert un brin de cette irremplaçable impression de pouvoir contribuer à changer le monde. Certes, je suis certain que vous allez penser que cette vision du rôle du Maire est " orgueilleuse " ou " utopique ", mais je vous assure qu’elle appartient à ce en quoi je crois. Il n’y a, par les temps qui courent, aucune initiative qui puisse se révéler inutile en matière d’ouverture des uns vers les autres. Le déficit devient considérable. Il pèse sur l’avenir d’une société voulant que la réussite (inutile de se voiler pudiquement la face) repose sur la capacité que l'on a d’appartenir à un réseau. Trouver un emploi sans réseau, se sortir de moments difficiles sans réseau, constituent désormais de véritables défis. Ces soirées tissent, par le seul fait d’une connaissance réciproque enfin possible, un atout nouveau pour des gens enlisés dans l'indifférence des autres.
Avec une soixantaine d’associations ayant une activité réelle sur Créon, ce sont environ 400 personnes, au sein d’un organe exécutif (bureau) et près d’un millier dans une structure délibérante (conseil d’administration), qui gèrent effectivement leur passion, leur solidarité ou leurs loisirs. Au total leur budget cumulé de fonctionnement est largement supérieur à celui de la commune, et le nombre de leurs  salariés (environ 90 d’après une enquête récente) dépasse celui de la Mairie
Je ne gère, par délégation révocable, à Créon, que l’essentiel, alors que les citoyens adeptes d’une authentique démocratie participative, se chargent du plus important, le quotidien. Je suis un chef d’orchestre ayant la chance de toujours trouver des solistes désintéressés ou des organisateurs efficaces.
 
MAITRISER UNE PART DE LEUR DESTIN
Les fêtes en sont l’illustration. Cette proximité dont je me considère (il n’y a aucune vanité dans ce propos) comme le garant, permet à environ 1600 licenciés sportifs, 900 adhérents "culturels", 400 tenants d’activités sociales, de trouver une manière de maîtriser une part de leur destin. Plus de 450 jeunes de 0 à 18 ans, grâce au carnet de chèques réduction "Créon +", dont nous avons été les initiateurs il y maintenant dix ans, sont identifiés comme engagés dans cette mouvance citoyenne. Le dix-septième forum des associations du samedi 2 septembre en portera témoignage, pour celles et ceux qui voudront aller vers les autres. Il faut savoir que dans la salle de l'espace culturel de Créon en 2006, sur 282 journées ou soirées d'utilisation (répétéitions, concerts, specatcles, repas, réunions), ce sont plus de 6500 personnes qui ont partagé un moment de leur vie.
Hier soir, j’étais heureux. C’est vrai. C’est sincère. Il y avait en effet des enfants, des adolescentes (peu de garçons malheureusement), des adultes, des retraités non engagés dans ce processus. Et ma satisfaction prend ses racines dans cette réalité. La préparation des fêtes 2006 et leur mise en place à partir de ce soir 18 heures, moment de leur lancement officiel, auront mobilisé 178 personnes, citoyens qui, a un moment ou un autre, donneront volontairement de leur temps pour leur réussite. Le repas de dimanche, autour de la 100° Rosière, rassemblera plus de 340 convives, et plus d’un millier de spectateurs ont déjà acquis leur billet pour les deux soirées… C’est leur première récompense !
Je suis un fils de l’autogestion. Je demeure convaincu, qu’adaptée à la société actuelle, elle aurait un avenir  (l'économie sociale doit devenir une priorité de gauche) et qu’elle serait le véritable garant de l’avenir de la démocratie. C’est dépassé, utopique, absurde dans la mondialisation actuelle : j'en conviens ! Mais je cesserai toute activité publique, encore persuadé que l’on pourrait au moins en débattre, comme lorsque je fus l'un des acteurs de ce laboratoire d’idées qu’était le PSU.
Suis-je bête ! La nostalgie n'a plus d'intérêt!
Mais je déblogue
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23 août 2006 3 23 /08 /août /2006 07:30
Si vous en aviez douté, je peux vous garantir que les vacances sont bel et bien terminées. D’abord avec un climat dont Météo France modifie sans cesse les prévisions, comme si ses services avaient honte d’annoncer aux derniers " bronzophiles " que le soleil devenait la denrée la plus rare d’août. Il faut convenir que les évadés du boulot de ces dernières semaines ont eu l’impression d’avoir plus à se préoccuper des chrysanthèmes que de l’ambre solaire. Ensuite, il faut bien reconnaître que, si vous n’avez pas eu l’oreille attentive, vous aurez dans quelques jours des surprises désagréables. La semaine dernière a, en effet, été propice à des hausses de tarifs basiques, selon le principe du " ni vu, ni connu ". Vous constaterez vite que Sarkozy ne s’est pas perdu dans les sables du Pyla, et enfin, il ne vous échappera pas que le Parti socialiste demeure le… Parti socialiste, avec les ombres portées des " éléphants " en train de se diriger, en se bousculant, vers le cimetière des espoirs perdus de la Gauche. Rassurez-vous, il y aura encore de nombreux autres épisodes dans tous les domaines, et vous connaissez la fin de l’histoire… car elle ne diffèrera guère de celle des " romans " à l’eau de rose antérieurs.
L’été de tous les dangers n’a jamais résidé où on l’attend, mais plus concrètement dans les annonces les plus discrètes, comme s’il fallait désormais faire du tapage médiatique et des silences révélateurs. La sieste des esprits fera que les dégâts seront potentiellement plus faibles. C’est du moins ce que les uns et les autres espèrent.
En reprenant le chemin du boulot, ou celui des écoles pour accompagner les enfants et les petits-enfants, sachez que tout sera mis en œuvre pour que vous ayez le cœur léger. Vous allez le constater, la semaine prochaine on va enchaîner les " bonnes " nouvelles, car on a déjà réussi à vous refiler discrètement les " mauvaises " et le terrain est dégagé. Ce principe de gouvernance a le mérite de transcender les partis politiques et d’avoir été, de tout temps, le sport préféré des gouvernants en congés d’été. D’ailleurs, je vous fais humblement remarquer qu’ils ne sont pas très nombreux au boulot, nos gouvernants, à part Sarkozy, vendeur de tongs UMP sur les plages, et organisateur potentiel de voyage-retour, ou  Douste Blazy, vendeur d’illusions au Proche Orient. Les autres se la coulent douce, dans des lieux tenus secrets, sauf pour les éventuels complices ramasseurs de " pipoleries ". On sait en effet que les journaux spécialisés ont connu une embellie extraordinaire sur les plages et dans les campings grâce à des clichés éminemment " politiques ". On ne s’arrêtera pas en si bon chemin.
DES HAUSSES BIEN REGLEES
En ce qui concerne les hausses planquées, il paraît indispensable de rappeler, au cas où vous ne seriez pas au… courant qu’EDF a raflé la mise le jour du 15 août, avec une augmentation de ses tarifs de 1,7 % qui, évidemment, a été saluée par la Bourse. Le prix des billets sur les lignes de la SNCF, hors TGV et hors Ile-de-France, a augmenté de 10 centimes à 1,60 € pour un trajet en seconde classe selon les destinations. Pour la RATP, le carnet de 10 tickets passe de 10,70 à 10,90 €. La hausse moyenne de l'ensemble des forfaits du type Carte orange s'établit à 1,92 %. L'abonnement mensuel de France Télécom est passé, le 4 juillet, de 14 à 15 €… Le 1er août, le tarif de la consultation des généralistes est passé de 20 à 21 € et depuis le 20 juin, les assurés doivent payer un forfait de 18 € pour les actes médicaux supérieurs à 91 €. Allez, je vous ajoute les boulangers qui veulent se faire un peu plus de blé sur la baguette, et la hausse des carburants, celle des billets d’avion (je sais que vous ne les utilisez pas tous les jours), celle des fruits et des légumes et des fournitures scolaires. Ainsi, avec le seul prix actuel de l’essence, un salarié qui effectue 40 kilomètres par jour au titre de son trajet domicile-travail amputera son pouvoir d’achat par automobile de 150 € nets suuplémentaires par an. L’ardoise sera salée mais impossible à effacer.
Dans quinze jours, le leitmotiv des conversations tournera donc inévitablement sur les salaires, car avec une croissance apparemment repartie, il ne sera pas admissible de continuer à geler les revenus les plus faibles. En effet, une bonne part de cette relance de la consommation repose sur un endettement croissant lié à l’habitat, les produits de confort, les loisirs, l’automobile… et les marges de manœuvre des familles se réduisent comme une peau de chagrin. Les remboursements de crédits rongent la vie quotidienne.
UN SIGNAL D’ALARME
La situation inquiète même les plus hautes autorités de l’Etat, puisque le gouverneur de la Banque de France, Christian Noyer, a tiré un signal d'alarme concernant le marché immobilier, affirmant que l'endettement des Français constituait un risque pour l'économie du pays. "Par rapport à leur revenu disponible, l'endettement des ménages est passé de 49% en 1995 (...) à 64% en 2005. Ce rythme d'endettement est un élément de fragilité, en cas de retournement du marché immobilier, dans un contexte de remontée des taux longs", a déclaré le gouverneur dans une lettre adressée au président de la République. Il précise que "cette phase de hausse des prix est tout à fait atypique par son ampleur et sa durée". La Banque de France ressasse depuis plusieurs mois que le marché immobilier doit être surveillé de très près… Des bombes à retardement ont été placées sur les comptes en banque de nombreux couples, étranglés par des remboursements catastrophiques.
Avec plus de 1 500 000 dossiers déposés devant les commissions de surendettement de la Banque de France, dont 190 000 en 2004, et 3,8 % de français considérés comme " surendettés ", le surendettement est devenu incontestablement un fait de société. Il interroge à la fois le fonctionnement de notre société de consommation de masse, " marchande d’illusion " qui pousse à dépenser toujours plus, et la souffrance, le mal-être de ceux qui, pour de multiples raisons, ne peuvent y résister.
Les augmentations annoncées, toute proches ou supérieures au taux " officiel " de l’inflation, vont accentuer ce phénomène et réduire considérablement le niveau de vie, creusant un abîme entre les deux extrémités de la classe sociale " . Un exemple simple : en fin d’année, à Créon, la dette globale envers les services périscolaires atteint les 21 000 € ! Certaines familles n’ont pas réglé au percepteur un seul euro des repas pris durant toute l’année écoulée par leurs enfants, alors que, dans dix jours, il retrouveront… des dépenses supplémentaires qui s’ajouteront aux autres ! Le nombre de saisies des allocations familiales augmente de mois en mois.
AU THEATRE CE SOIR
Pendant ce temps, le monde politique poursuit son bonhomme de chemin. Le conseil municipal de Bordeaux se lancera lundi dans un suicide collectif calculé, derrière le joueur de flûte renté du Canada. Evénement décisif pour le quotidien des habitants de la métropole régionale, car sans lui, son successeur paraissait, face à sa majorité, aussi armé qu’une poule avec un cure-dents. La semaine prochaine, vous ne parlerez que de cette démission spectaculaire qui fera en elle-même le résulat de la future campagne éléctorale.
Sarkozy, en joueur de trompette de la renommée choisira patiemment ses cibles parmi 30 000 dossiers de sans papiers " expulsables ", afin de rassurer les obsédés de l’immigration, et récupérer les hésitants de Le Pen. Une ou deux rafles, un cas exemplaire par nationalité, des caméras - beaucoup de caméras - et l’affaire sera médiatiquement bouclée. Je vous garantis déjà que courant février ou mars 2007, il y aura une autre exploitation du merveilleux fichier constitué avec ces dossiers de régularisation. Les statistiques parleront d’elles-mêmes…et si elles ne veulent rien dire, elles n’en seront que plus parlantes ! De Villepin lâchera, dans cinq ou six jours, des roulements de tambour pour attirer l’attention sur lui et espérer faire croire qu’il donne encore le rythme. Alors que Chirac utilisera le violon pour tenter d’attendrir les mélomanes UMP… et un auditoire qui a vu que son " retenez moi ou je fais un malheur " en faveur du Liban n’est pas allé plus loin, une fois encore, que le discours.
LES OMBRES PORTES DES ELEPHANTS
Au P.S. préparez vous ce week-end à la énième tentative inutile de retour de Lionel Jospin. Il attendra que les passions internes soient au top pour tenter de jouer au casque rose. Les obus vont se croiser au dessus de son poste d’observation pour son plus grand plaisir. Il espère que les morts hâteront le sentiment militant du "tous sauf ceux qui se déchirent". Le problème, c’est que Hollande a déjà pensé de manière similaire.
Jack Lang, DSK, Laurent Fabius, épuisés par des combats fratricides, verront Ségolène faire le maximum pour passer au premier tour dans le scrutin interne. L’enjeu se situera en effet, dès la rentrée, autour de cette possibilité. En effet, son entourage sait qu’un éparpillement des voix sur quatre ou cinq candidats l’empêcherait de faire la décision immédiatement et qu’après, il existe un risque de TSS (Tout Sauf Ségolène) fédérateur. Des alliances internes au second tour du scrutin interne pourraient en effet, sur la base du " non " au Traité constitutionnel européen, être défavorables à la Présidente de Charente-Poitou. Rebsamen l’a compris, et il est en charge de ce projet, consistant tactiquement à favoriser par tous les moyens un face à face " Ségolène-Laurent " car il est persuadé que sa favorite passerait sans problème dans ce cas de figure.
Une rentrée on ne peut plus triste vous attend donc, d’autant que la Météo annonce du mauvais temps pour les fêtes… de la 100° Rosière de Créon, où vous auriez pu simplement retrouver un moral en hausse et un brin de naïveté dans l’air. Car pour le reste, méfiez-vous, le monde n’a pas changé depuis votre départ ! Au contraire, il a profité de votre indifférence pour mal tourner !
Mais je déblogue…
 
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22 août 2006 2 22 /08 /août /2006 00:28
C’est parti : le parfum de la victoire monte à la tête des gens qui sentent la victoire proche. Ils ne se maitrisent plus et tentent un passage en force inspiré par le résultat virtuellement positif des sondages. Dans tous les camps on ose, on se dévoile, on tente de profiter de la moindre opportunité de mettre à mal ses adversaires potentiels pour avoir la route dégagée pour la rentrée. Le temps presse car après les rentrées Francosocialistes de La Rochelle, les sorties sarkozistes exemplaires de familles sans papiers, on ira vers l’affrontement direct entre les candidats désignés par les médias. L’opinion dominante aime bien les événements correspondant à son sentiment pesrsonnel. Elle s’auto-nourrit, elle se rassure en partageant, à satiété, ses propres certitudes. Tout l’art du journaliste bien pensant consiste, en effet, à lui faire croire en une révélation permanente : vous êtes intelligent et sagace car… vous voyez, vous pensez comme moi.
UN GAGE DONNE
C’est ainsi que hier, Sud Ouest donnait "Arcachon à Sarkozy". Le bain houle amoureux avec Madame sur la plage du Mouleau était remplacé par un bain de foule passionné avec photo à la une. Désormais séparé de sa société holding, la SAPESO, afin d’être plus aisément vendu dans un proche avenir, le grand quotidien régional effectue, en douceur, une purge de grande ampleur. Jean Paul Brunel, son directeur de la rédaction devrait, dans quelques jours, aller porter sa bonne parole journalistique ailleurs. Il quitterait le groupe et le journal avant l’annonce par Alain Juppé de son retour spectacle au Palais Rohan. L’arrivée de Patrick Venries, promu à l’échelon supérieur, devrait entraîner une valse des chefs de service (sport notamment) qui attestera d’une probable restructuration avant les Présidentielles.
Le bonus de la "une" accordée à Sarkozy, servira de gage, comme l’aura été le "remarquable" papier sur les bisbilles internes socialistes sur Bordeaux. Une manière comme une autre de démontrer que ni Juppé ni Sarkozy n’ont à craindre de la nouvelle hiérarchie potentielle du journal. Le jour où le (la) candidat(e) du PS visitera une caravane politique  qui distribue des tongs et des préservatifs UMP au camping des Flots bleus du Pyla, je vous assure que la "une" sera identique. Mais attendez! vous n’avez encore rien vu et je vous invite à tenir des statistiques (largeur du titre, nombre de photos, nombre de lignes) à partir de mardi matin, sur la démission historique du Conseil municipal de Bordeaux et le retour de Juppé… On prend les paris : Sarkozy ayant été bien servi, maintenant on passera sans crainte à autre chose... le moment venu!
Si vous ne me croyez pas (c’est votre droit) je tiendrai les comptes pour vous, en sachant bien que du fait que Sud-Ouest a actuellement une mono-édition girondine, l’impact d’une information y est largement supérieur à celui d’une publication dans un seul secteur. Mais, bien entendu, il ne s’agit que d’allégations sans fondement…
INFILTRATION DE LA TOILE PAR LES BLOGS UMP
Dans ma récente chronique " déblogue toujours tu m’intéresses " de dimanche dernier, je vous annonçais également que les blogs "présidentiables" allaient se développer pour étouffer tous ceux qui tenteront de s’opposer à la pensée unique. J’ai constaté que certains en doutaient. Je les félicite, car un lecteur qui doute est un citoyen. Malheureusement, aujourd’hui, il leur faut déchanter et se rendre à l'évidence. 
A l’UMP, la rentrée sera en effet placée sous le principe de l’infiltration de la toile par les blogs. Lors de sa rentrée " universitaire " à Marseille, Nicolas Sarkozy veut renforcer sa présence sur l'Internet en donnant à ses militants la possibilité de créer le maximum… de blogs gratuits comme la consigne a déjà été donnée par sa concurrente dans la montée de la cote de popularité. Ces blogs offriront aux militants la possibilité de "donner libre cours à leur engagement politique personnel" et permettront "d’augmenter la présence et la visibilité de l’UMP sur Internet", a indiqué le spécialiste Thierry Solere. Une stratégie de récupération de la toile, cogitée depuis de longs mois, et notamment mise au point par Arnaud Dassier, PDG de… l’Enchanteur des nouveaux médias, prestataire de services Internet de l’UMP. Avec TF1 en piste on pourra toujours un jour jumeler les plates formes.
Les militants intéressés par la pratique du blog, bénéficieront d’une formation pour les aider à créer ces journaux de bord sur une plate-forme spécialement mise à la disposition du parti pour ses élus, permanents, militants, etc. Une manière de développer une "blogosphère UMP" en vue de la présidentielle… sarkoziste ! Rassemblés sous le titre "Les blogs de la France d’après" (sic), toutes ces créations seront référencés sur un nouvel annuaire des blogs UMP, sous un bandeau invitant les internautes à "participer à la grande conversation politique sur internet". Les meilleurs blogs qui ne seront surtout pas siglés UMP, et dont les auteurs gèreront librement le contenu, bénéficieront ensuite d’un hébergement gratuit par l’UMP pendant un an, le temps que les échéances électorales passent.
A cette stratégie d’essaimage, l’UMP compte ajouter une réorganisation de son site web, pour l’axer plus sur le "débat" avec les internautes qui se feront piéger dans la toile sarkoziste en train de se mettre en place. Le temps de l’offensive est donc venu et je vous assure que tous ceux qui vont tenter de se mettre en travers du tsunami de blogs UMP vont avoir des soucis. Il ne fera pas bon résister au sarkoblogs !
IL FLOTTE UNE DOUCE EUPHORIE
A gauche ça ne va guère mieux. Le Bourgogne est montée à la tête des participants au " mariage " socialiste de l’année, dans la ville de Frangy-en-Bresse. Depuis dimanche, il flotte une douce euphorie chez les fans de la reine du Top 50 des sondages. L’enthousiasme est tel que plus rien ne retient les ambitions. Le numéro deux du PS, le flambant "sigoliste" François Rebsamen, député Maire de Dijon (on y boit bien!) s’est pris pour le Chanoine Kir en prononçant l’excommunication des rivaux potentiels de sa favorite. Il a tout bonnement sommé Jack Lang et Domminqiue Staruss-Kahn de se retirer de la course à l'investiture du PS pour la présidentielle, afin de laisser le champ libre à la " chouchou " de l'IFOP. Il a réussi à faire monter la moutarde à la trompe de deux éléphants furieux, qui ont aussitôt dénoncé une "fatwa" alors qu’une " lettre de cachet " aurait été plus adaptée aux circonstances.
"J'appelle Dominique et Jack (NDLR : ce sont des amis à lui. On dit camarades au Ps) à se retirer" a-t-il lancé dans Le Parisien. Quant à Lionel Jospin, qui s'est exprimé dans l'après-midi sur la crise au Liban, il est habillé pour l'hiver :  "je ne pense pas qu'il soit aujourd'hui le recours", a tranché François Rebsamen. Ces propos… détonants ont évidemment secoué deux candidats souhaitant absolument se présenter, au lendemain de la rencontre de Frangy-en-Bresse, et juste avant les " Francosocialistes " de La Rochelle.
" Nous ne sommes pas des toutous auxquels, sur un coup de sifflet, l'on pourrait intimer l'ordre de rentrer au chenil. L'injonction caporaliste n'est pas nécessairement la meilleure méthode pour favoriser le nécessaire rassemblement des socialistes", s'est offusqué, drapé dans son statut de dignitaire historique, Jack Lang dans un " poulet " (de Bresse ?) adressé à François Hollande, dénonçant une "fatwa à l'égard de camarades".
François Rebsamen "a dépassé la ligne jaune! On est dans un parti qui devient presque totalitaire", s'est alarmée Michèle Sabban, une proche de "DSK". Elle défendra mardi prochain une "motion d'ordre" lors du bureau national de rentrée du PS, pour exiger de François Hollande que son premier adjoint "retire sa déclaration publiquement". C’est sûr que ça va lui faire une peur terrible, compte tenu des rapports de forces au sein de cette instance, dans laquelle il peut évoluer à sa guise, compte-tenu des alliances faites ou à venir. Invité à rétablir l'égalité entre les présidentiables face à une véritable "privatisation" du parti (1) en faveur de la madone des sondages, François Hollande est resté muet. On le comprend. Le prochain qui sera prié de se retirer pourrait être lui. Au point où l’on en est, à sa place (que je veux pas !), je me méfierais.
Mais je déblogue…

(1) J’avais eu des ennuis après ma chronique du 4 novembre dernier intitulée " La Maison mère bien gardée " et la parution d’un article dans Libération du 5 novembre titré " Hollande chef de l’entreprise PS ". J’espère que les amis de DSK et de Jack se rappelleront des ces propos prémonitoires… maintenant qu’ils en sont victimes!
Photo Sarkozy Franck Perrogon (Sud ouest)  
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21 août 2006 1 21 /08 /août /2006 07:17
Un Bordeaux-Lyon s’apparenterait en Espagne à un Real-Barça, en Angleterre à un Arsenal-Chelsea, ou en Allemagne à un Brème-Bayern…C’est ce que la Ligue 1 peut offrir de mieux en matière de choc au sommet de son championnat. Le fait que l’ordinateur de la LNF ait choisi le mois d’août pour le proposer, démontre que personne ne peut croire à son impartialité. En effet, depuis de nombreuses saisons, je n’ai souvenir que de matches réputés de haut niveau au cœur des vacances girondines. Il faut en effet assurer de grosses recettes durant la période où les gens n’ont pas encore le rythme tram, boulot, dodo en tête.
Hier soir, c’est donc un stade Chaban-Delmas exhalant les bruits, les couleurs et les odeurs des soirées européennes de la Belle époque qui attendait la confirmation des ambitions girondines. Même si la nostalgie ne constitue pas la meilleure motivation des supporteurs, qui ne veulent parler que d’avenir, elle traversait la tribune d’honneur, où tous les gens qui comptent étaient venus se montrer… Le football va redevenir une référence comme il le fut durant l’époque Bez, si les Girondins continuent à tenir le haut du pavé. D’autant que les échéances électorales donnent un intérêt accru à toute présence.
Avec un effectif composé de dix internationaux sur onze joueurs, les Lyonnais ne respiraient pas la sérénité. Ils savent que la campagne mondiale a laissé des traces dans les esprits, et que pour relancer une dynamique il leur faut absolument évacuer. On le sentit durant l’échauffement avec des courses un peu lasses, des balles molles et plus encore par des étirements durables… La sensation que les cadres n’avaient pas encore la tête au boulot.
Côté bordelais, la hargne perlait dans les échanges. Visiblement la faim était supérieure. Un esprit commando animait un groupe plus homogène, plus proche, plus serré. Cette phase permet toujours de sentir la manière dont va débuter le match. Bizarrement, le clan brésilien des Bordelais avait fondu comme neige au soleil de Copacabana. Rusé et fin tacticien, Ricardo avait laissé la " légion samba " sur le banc pour aligner une formation de combat susceptible de mettre la pression sur les faiseurs de miracles. Son flair fut vite récompensé.
Désormais il n’y a plus en effet de coups de pied arrêtés insignifiants. Le football moderne devient celui des erreurs exploitées. Contrairement à ce qui fut le cas, durant des décennies, les attaquants ont de plus en plus de mal à faire la différence dans des actions individuelles construites. Ils tirent profit de miettes que leur laissent des défenseurs, dépassés par une balle millimétrée ou un contre imprévu. Chaque coup franc, chaque coup de pied de coin prennent maintenant une importance capitale dans un sens ou dans l’autre. Tous les clubs majeurs recherchent donc des tireurs d’élite auxquels on ne demande pas nécessairement d’être omniprésents dans le jeu. Michel Platini fut, selon moi, le prototype de cette génération rentable par son adresse. Lyon doit beaucoup dans sa réussite à Juninho
ENTRE LES CONGES ET LE LABEUR
Les Girondins entamèrent la confrontation sur la base de leur phase de préparation. Ils bousculèrent les lignes lyonnaises encore fluctuantes, et mirent en difficulté une défense encore entre les congés et le labeur. Visiblement, Lyon avait besoin du starter pour démarrer ses rencontres ou d’une période de préchauffage car chaque ballon faillit faire caler le moteur de la supposée Formule 1. La qualité bordelaise résida dans cette capacité à exploiter cette lenteur à sortir des stands. Le premier coup de pied arrêté fut le bon.
Une balle fuyante n’échappa pas à l’affamé de gloire qu’est devenu Faubert. Il la chipa au passage pour la jeter dans ses filets à provision. Contrairement aux fameuses cinq dernières minutes, on crut que le dénouement de l’énigme se contenterait des cinq premières... Les Girondins n’avaient pas eu besoin de plan " B " car le " A " avait fonctionné à merveille dans ce match traité comme la constitution européenne.
La méforme olympique des Lyonnais ne dura pas longtemps car la claque avait secoué les consciences. On s’en remit donc à la patte magique de Antonio Augusto Ribeiro Reis dit Juninho. L’un des mauvais gestes d’antijeu qui émaillèrent le match lui offrit l’occasion de taper dans le mille. Sa balle échoua sur l’angle du cadres alors que Ramé semblait avoir plongé pour la photo. Tous ses autres flashes n’éclairèrent pas la situation. Il fallut que Tiago Cardoso Mendes se mette en position de tir pour que l’on y voit plus clair dans le camp de l’O.L. Une frappe déviée de sa route par le tibia brésilien de Fred termina sa course loufoque derrière la ligne blanche des cages de Ramé. Le coup de pied arrêté laissait place au coup du sort souvent complémentaire. Tout était à refaire pour des Girondins qui ne déréglaient plus l’ordonnancement d’un milieu adverse devenu impitoyable.
PAS D'APPETIT DE FAUVE
Le passage au stand permit provisoirement à Micoud de faire le "plein d'énergie", car au cours de la première période il n’avait visiblement pas les ressources nécessaires pour tenir son rang. Il se mit à ratisser davantage de ballons, à mettre le reste de l’équipe dans le sens de la marche. On le sentit peu à peu, quand le héron Chamakh faillit, d’un coup de son long cou emmanché d’une tête, piquer au vif Coupet. Prenant leurs adversaires plus haut, essayant de les empêcher de s'afficher en maîtres joueurs, les Girondins inquiétèrent beaucoup plus sérieusement des Gones pas très incisifs. Visiblement, la première impression avait été la bonne : Lyon n’avait pas encore son appétit de fauve de la saison dernière !
Micoud promena donc librement, quelques minutes encore, son allure de gentleman farmer endimanché sur la front de l’attaque bordelaise. Il aurait pu faire la décision sur un enchaînement techniquement au point, mais Coupet lui opposa une manchette de catcheur. D’autres occasions donnèrent l’impression que le duel pouvait tourner à l’avantage des dauphins. Il leur manqua pourtant ce fameux réalisme qui avait fait leur réputation la saison écoulée. Une erreur d'intattention, dont on sait qu’elle est aussi dangereuse que celle qui consiste à croire indéfiniment dans des lendemains qui chantent, pouvait tout changer. Il aura d’ailleurs suffi d’une poignée de minutes pour que tout bascule.
LE COUP DE GRACE
Un coup du sort avait effacé un coup de tête. Il ne manquait qu'un coup de grâce pour compléter le score. Tous les grands stratèges vous le diront : une bataille se gagne avec les réserves et pas seulement avec des commandos. Si elles sont performantes, au point, et si on les lance dans la bataille au bon moment, elles peuvent se révéler décisives. Gérard Houllier le sait. Il expédia donc en grenadiers voltigeurs, face à une défense fatiguée, Benzema, Wiltord et Kallstrom qui crèèrent les brèches que Francia et Laslandes ne surent réaliser. La différence était là.
Un ultime sursaut, une situation confuse, et la tête luisante de Wiltord, venu auparavant glisser quelques mots déstabilisateurs à l'oreille de Micoud, surgit pour un véritable hold-up.
En fait, bien plus que la défaite, ce but consacrait la dure réalité : Bordeaux est encore loin du statut d'équipe de Champion's League. Il lui faudra réaliser des prouesses pour espérer rivaliser avec la première catégorie européenne, celle qui aurait justifié que ce match soit considéré comme de haut niveau. Une faute toutes les 90 secondes, une valse de cartons, ne suffisent pas en effet à justifier ce statut... Pour s'en persuader, il suffisait d'aller regarder sur Canal + Sport un somptueux Barça-Espanyol de Coupe d'Espagne, car là, avant de ne pas perdre sur un coup du sort, un coup de tête, un coup de grâce, un coup tordu on cherchait à gagner sur un coup de génie! La différence est fondamentale!
Mais je déblogue...   
Photos AFP Bordeaux Lyon C.Bernard
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20 août 2006 7 20 /08 /août /2006 07:17
Eric Mouchet, lecteur attentif de L’AUTRE QUOTIDIEN au regard acéré et surtout curieux, a trouvé une information qui me laisse perplexe. Il m’a évidemment immédiatement " chambré " dès qu’il a su, qu’ après le lancement aujourd'hui de sa plate-forme communautaire Wat.TV et son accord avec Skype, le groupe TF1 investit à hauteur de 20 % dans la société JFG Network, éditrice de la plate-forme de blogs Over-blog, confirmant son intérêt pour le phénomène du Web communautaire. Overblog totalise plus de deux millions de visiteurs uniques par mois et 367.000 blogs, dont 40 % d'actifs… dont le mien, qui doit être l’un des plus réguliers dans ses publications.
Cette nouvelle confirme parfaitement ce que je pense et que j’ai soumis à votre réflexion dans plusieurs chroniques : le mouvement des blogs "libres" connaîtra le même sort qu’eurent les radios quand les ondes furent ouvertes par la loi du 9 novembre 1981. Elle ne concernait que les radios locales associatives dites" libres", les seules radios privées autorisées à émettre et qui durent attendre que le décret d'application entre en vigueur en janvier 1982. Elle ne supprimait pas le monopole mais l'aménageait. La claque fut, durant des années, très rude pour les radios des grands groupes qui n’avaient pas vu venir le coup. Il en sera de même pour les blogs, qui remettent en cause la toute puissance des médias de l’opinion dominante.
La campagne du référendum sur le traité constitutionnel européen a démontré la faiblesse du système traditionnel, totalement acquis au "Oui", et qui a été doublé par de très nombreux blogs de contre-pouvoirs incontrôlables, faisant voter Non. Les journaux, les télés, les radios se sont vite rendus compte de la dérive et ont illico proposé des plates-formes d’accueil "sous contrôle"… et se glissent désormais dans des structures ayant démontré leur efficacité. Comme RTL et Europe 1 avaient créé des filiales captatrices d’une clientèle les ayant délaissés, comme RMC qui a pris un virage à 180°, comme les multiples diversifications payantes des chaînes de télé classiques, comme Le Monde, Libé, le Nouvel Obs... qui proposent d'accueillr vos écrits, les blogs vont devenir un enjeu véritable pour l’économie des groupes, déjà propriétaires de multiples supports d’information. En effet, l’enjeu demeure le gâteau publicitaire global, qui risque de ne pas croître en raison des " fuites " vers une clientèle techniquement et socialement intéressante.
LES BLOGS VONT TENIR LE HAUT DU PAVE
La prochaine campagne présidentielle, qui débute, effectivement, ce dimanche, avec la présence de Ségolène Royal à la fête de la "Rose montebourienne" (qui aurait, il y a trois mois, prévu pareil " mariage " ?) verra les blogs tenir le haut du pavé. On a déjà observé comment Alain Juppé, depuis sa cabane au Canada, avait entretenu le suspense sur son retour bordelais. Jouant habilement avec la distance, dans toutes les acceptions du terme, il a obtenu que tous les journalistes aillent quotidiennement consulter son blog pour connaître ses états d’âme. Ils n’ont jamais rien appris (à part qu’il n’y avait rien à apprendre), mais peu importe, ils maintenaient… en ne publiant que des pseudos démentis, sa présence au sein du système médiatique. Ses adversaires se sont réveillés trop tard. Ils sont désormais noyés dans la masse.
L’entourage de Ségolène a reçu comme consigne de multiplier les espaces individuels ou collectifs sur le web, destinés à soutenir sa candidature. Il y a même eu dans certains départements des " expulsions " de gestionnaires de sites ayant pris une importance particulière, afin de les confier à des mains plus sûres. Dans quelques semaines, son réseau sera incontournable et s’acharnera sur les ultimes " résistants ", sans pour autant mouiller la Patronne. Aucun internaute n'achappera au réseau qui va s'activer début septembre. A l'interne, les militants blogueurs actifs vont accabler les autres militants de leurs prose et de leurs positions. Les autres "présidentiables" PS ne pourront que courir après ce maillage habile et massif de la toile, car ils n’ont pas voulu (ils ont la trouille des conséquences), au moment où tout était encore possible, se lancer dans ce processus
Sarkozy, lui, est plutôt mal parti car il a cristallisé d’entrée des blogs hostiles qui, avec la crise du CPE et comme dirait Lilian Thuram " la Sarkoïsation des esprits ", ont vite proliféré. Il a donc recentré sa " com " sur le site de l’UMP, en achetant des centaines de mots clés aux principaux moteurs de recherche afin de récupérer partiellement les flux qu’ils généraient généralement contre lui. Tous les internautes se souviennent de la pub, reçue à l’insu de leur plein gré, sur leur fil… Il lui faut donc , avec ses amis, contrôler les plates-formes, pour pouvoir un jour ou l’autre imposer des référencements plus profitables les uns que les autres. Le Front national est omniprésent sur toutes les plates formes. Ses sites caracolent en tête. Il s'infiltre en douceur et sans bruit dans la toile.
L’offensive de TF1, comme celle d’autres géants des médias en direction de plus modestes concentrations, ne fait donc que débuter. Le mouvement est né aux Etats-Unis, comme de bien entendu, et se répercute en France.

LA DYNAMIQUE DES RESEAUX SOCIAUX
Toute la dynamique des blogs repose en effet sur la création de réseaux sociaux ouverts, extrêmement forts. L’AUTRE QUOTIDIEN est ainsi passé de 0 à 171 abonnés fidèles en onze mois, ce qui, par le biais des liens, peut donner un impact largement supérieur à un journal écrit, une radio ou une télé dont on est tributaire, et qui coûtent cher. Un réseau social, sur l'internet, n’est en effet qu’un simple site participant à la création de relations,les utilisateurs partagent des points communs, se regroupent, cherchent d'autres individus avec lesquels ils ont des affinités.
Avec les années, de nombreux sites, dont la popularité semble aller sans cesse croissante, se sont développés sur le web. Les réseaux de ce genre peuvent aussi, par exemple, permettre une meilleure distribution artistique, en favorisant la formation de contacts, mais d'abord en permettant à des artistes d'assurer une visibilité à leur travail (musique, vidéo, photographie). On peut aussi, autre exemple, renouer avec d'anciens camarades de classe, à partir d'une liste d'établissements scolaires ou chacun peut ajouter son nom, selon l'endroit où il a fait ses études. Ce type de société virtuelle grégaire est devenue populaire, avec l'apparition de "Friendster", en 2003.Le site a rapidement été supplanté par MySpace, qui devenait en 2005 le site web le plus consulté, devant Google. L'attractivité sans cesse croissante de ce genre de réseaux a intéressé au plus haut point les grands groupes, qui y voient le simple rachat d’un processus monté parfois par des militants du web.

86 MILLIONS D’UTILISATEURS
Les réseaux sociaux à destination des jeunes, et peut-être aussi des moins jeunes, proposant hébergement de blogs et de vidéos, mais aussi " chat ", sont donc en première ligne, selon le Journal du Net. Aux Etats-Unis, c'est donc MySpace (propriété de News Corp du milliardaire " médiatique " Ruppert Murdoch qui avait flairé le coup) qui se trouve aux avant-postes, avec… 86 millions d'utilisateurs, en augmentation de 250.000 chaque jour! Aucun tabloïd ne peut afficher de tels scores. Aucune télé ne connaît une telle croissance. Ce réseau social a donc récemment fait son entrée dans le Top 10 des sites les plus visités aux Etats-Unis. Il serait actuellement à la recherche de partenaires parmi les moteurs de recherche, afin de transformer cette audience en revenus, issus des liens sponsorisés. Or Murdoch ne passe pas pour un philanthrope… et s’il a choisi cette voie c’est qu’il y a de l’argent à gagner, au détriment  des simples citoyens solidaires qui ont créé, de fait, cet outil! 

TF1 POURSUIT SA DIVERSIFICATION
En France, c'est essentiellement "Skyblog" qui mène la danse, avec ses 4,4 millions de blogs hébergés et plus de 4 millions de visiteurs uniques chaque mois ! Même si l'audience moyenne de chaque blog reste très faible.
Mais la situation en France pourrait évoluer rapidement. Après avoir déboursé 580 millions de dollars pour acquérir MySpace, le groupe News Corp est encore prêt à investir, pour maîtriser encore plus, un réseau diversifié dans toutes les langues. "L'empereur" vient en effet de nommer un responsable de MySpace pour l'Europe, qui annonce les premières versions européennes pour la rentrée. Il dit chercher des accords avec des acteurs des médias et de la téléphonie mobile. Mais en France, il se heurtera à l'expansion de TF1.
La première chaîne privée d'Europe poursuit sa diversification en lançant récemment " Le Buzz ", un site "relevant des réseaux sociaux". Evoqué depuis plus de deux mois, et entouré d'un certain mystère, le site, dont le nom définitif devrait être annoncé lors du lancement, est d'ores et déjà en ligne et, comme base de départ, il puisera ses abonnés dans des fusions avec de modestes plates formes dont la croissance est vérifiée.
Il y a un an L’AUTRE QUOTIDIEN était dans le peloton de tête de 1500 blogs répertoriés à la rubrique politique d'over-blog. Un an après il est huitième sur… 4054 blogs de la même rubrique, et avec les présidentielles il plongera  dans les profondeurs du classement, car on atteindra vite probablement plus de 10 000 supports d’expression, plus ou moins libres de parole ou plus ou moins sincères. Le système des abonnements payants pour fabriquer son blog est partiellement arrivés. La pub est déjà là (elle n’existait pas sur over-blog, il y a douze mois)… La surveillance aussi !  Mais TF1 est arrivée. Ca devrait vous rassurer ! La pieuvre de l'opinion dominante se montre en plein mois d'août!
Mais je déblogue…
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19 août 2006 6 19 /08 /août /2006 07:17
Ce week-end Puget-ville ne vivra pas sa fête locale annuelle. Elle a été annulée en raison du drame qu’a vécu le centre de secours local, après la mort de 3 sapeurs-pompiers volontaires au fond d’un ravin verdoyant. Bien évidemment, Nicolas Sarkozy sera de la cérémonie des obsèques, avec plus de 500 sapeurs-pompiers varois, venus pour rendre hommage à leurs collègues, ainsi que des centaines de gendarmes, policiers, agents de l'Office national des forêts, élus, et délégations de sapeurs-pompiers d'autres régions de France. De nombreux habitants de Puget-Ville, où l'accident a suscité une vive émotion, se sont également massés dans le stade, pour soutenir les familles des victimes. Cet événement dramatique s’estompera, comme ceux qui ont marqué l’histoire des "soldats du feu" de ce département, souvent touché par des incendies plutôt moins que plus accidentels. Une quarantaine de pompiers sont en effet considérés comme morts au feu, dans des accidents ou lors d'entraînements, en plus de quarante ans dans le Var, qui a donc payé un lourd tribut.
Je comprends particulièrement l’émoi d’un village comme Puget-Ville face à ce drame, car ce pourrait être Créon, qui a, depuis maintenant plus d’un demi-siècle, des liens particuliers avec les sapeurs-pompiers. Il ne se passe pas une semaine sans que je sois conduit à les accompagner, moralement ou physiquement, dans une sortie. Une cinquantaine de volontaires et bientôt 7 professionnels répondent à plus d’un millier d’appels dans une année sur une vingtaine de communes en premier appel. Malheureusement, même si globalement ils bénéficient d’une excellente image, il faut admettre que le citoyen contribuable ne connaît pas forcément ce que représente leur engagement personnel. Au-delà de l’émotion parfaitement compréhensible que suscite un accident du genre de celui du Var, on oublie encore une fois le quotidien, dont les exigences échappent aux caméras.

PAS DE CITOYENNETE SANS ACTES CONCRETS
Maintes et maintes fois, j’ai répété qu’il n’y a pas de citoyenneté sans actes concrets de solidarité. Solidarité financière par des contributions justes aux frais de la vie collective, solidarité en consacrant du temps à l’action publique, solidarité physique en apportant sa présence aux autres quand ils en ont besoin. La solidarité est le fondement de la République. Le seul problème, c’est que ce principe s’oublie aussi vite qu’il apparaît.
Envoyer un chèque ou déposer des pièces jaunes à la sauvette, à l’appel de Laurie ou de David Douillet, lavent plus blanc que blanc une conscience grise. Adhérer à un parti politique par internet, à un syndicat par habitude, à une association par calcul, appartient désormais au réflexe social à la mode. Pourtant, seule la continuité donne sa valeur aux prises de position. Ainsi, s’engager 365 jours et nuits par an à être disponible, pour aller forcément à la rencontre du malheur, de la détresse, de l’insolite, ne correspond plus tellement à la philosophie dominante. Or, il n’y a probablement pas d’acte citoyen plus fort que celui de se former, se dévouer chez les sapeurs-pompiers, chez les sauveteurs en mer ou en montagne, sans en faire son métier.

IMMENSE BESOIN DE SOLIDARITE
Comme vice-président du Service Départemental d’Incendie et de Secours (SDIS 33) après en avoir été administrateur, je consacre, depuis maintenant 10 ans, au moins une demi-journée par semaine au suivi de ce qui est une collectivité territoriale autonome, forte en Gironde de plus de 4500 personnes dont 1500 professionnels. En passant du terrain communal connu, à celui départemental beaucoup plus anonyme, j’ai pris conscience de l’immense besoin de solidarité indispensable à la société actuelle. Sur la route, à leur domicile, dans les forêts, sur les plages, sur les chantiers… les gens de tous les âges se trouvent tôt ou tard en difficulté, de manière totalement imprévisible. Et alors, le premier réflexe c’est d’en appeler à la solidarité des autres, avec une exigence particulière : la rapidité ! Les citoyens ne tolèrent plus qu’un service gratuit (car c’est probablement là qu’est le problème), dont ils ne perçoivent ni les contraintes humaines ni le coût financier, ne réponde pas  immédiatement à leur attente. En Allemagne, il y a 1676 personnes affectées à la sécurité civile (dont 1575 volontaires et 29 professionnels) pour 100 000 habitants, alors qu’en France on n’en est encore qu'à 382 personnes pour 100 000 habitants, dont 65 professionnels et 317 volontaires ! Une sacrée différence, quand on prend conscience de la réalité des missions, qui sont identiques dans les deux pays hors feux de forêts.
En effet lorsque l'on parle de sapeurs-pompiers, la première idée qui vient à l'esprit est celle de " soldats du feu " alors que cette réalité n’existe quasiment pas sur certains territoires. On oublie que l'incendie ne représente qu'une de leurs missions, et cette activité est d'ailleurs en régression, en raison de l'amélioration des normes de construction, des règlements de sécurité et de la sensibilisation des populations, pour ne plus représenter qu'environ 10% des interventions, mais c’est suffisant pour que des centaines d’entre eux paient de leur vie ces sorties dangereuses. Mais tout le reste, moins spectaculaire, moins télégénique, moins perceptible, prend une ampleur considérable et surtout exige une " technicité " toujours plus forte.
PART PREPONDERANTE DU CONSEIL GENERAL
Le financement du SDIS est actuellement partagé par les collectivité locales, avec une part prépondérante pour le Conseil général. Ce refus de voir créé, en France, un vrai système national de sécurité civile a introduit une forte différence entre les moyens alloués à ce secteur car, bien évidemment, la " richesse " fiscale d’un département va jouer dans les crédits dégagés. En 2003, la participation financière des conseils généraux au SDIS représentait en moyenne 46,36 % des contributions, (+ 16,94 % par rapport à 2002) et variait de… 99,90 % à 12,27 % du budget global selon les départements. En 2004, la participation financière des départements représente 48,53 % du total des contributions, soit une progression de 11,52 %. Où est l’égalité républicaine ?
Pour 2005, l'estimation, fondée sur les budgets primitifs, est encore de 6,2 %. Là encore, on constate un triplement des contributions depuis la départementalisation… Et ce n’est pas fini puisque les Députés, dans leur grande sagesse, ont décidé qu’en 2008 seuls les Conseils généraux financeront les SDIS, ce qui va 
entraîner une nouvelle envolée spectaculaire de la fiscalité départementale. A moins que l’on se décide à pratiquer enfin la transparence absolue, en instituant sur la feuille d’imposition une colonne SDIS qui correspondrait aux efforts accomplis pour répondre aux besoins de sécurité. Le faux sentiment que nous pourrions atteindre le risque zéro fausse la donne, car cette revendication génère forcément des dépenses impressionnantes.
SERVICE CIVIL OBLIGATOIRE
Le Centre de secours de Créon mériterait d’être beaucoup plus connu des élus locaux et des habitants du secteur qu’il dessert. En 2007-2008, plusieurs millions d’€ vont être engagés, à ma demande, pour  doubler sa surface et le moderniser, car il ne correspond plus du tout aux besoins. Mais ces efforts seront vains si le renouvellement des générations de volontaires n’est pas assuré.
Le service civil obligatoire aurait permis de trouver déjà une ouverture possible. En prenant en compte effectivement les jours passés par des citoyens dans ce service civil pour le calcul des  annuités de leurs pensions, en majorant leurs futures retraites s’il a été démontré qu'ils ont consacré du temps de 
leurs loisirs au service des autres,
en valorisant l’acte civique d’un engagement de longue durée, en " forçant " les jeunes à prendre conscience des conséquences de certains comportements par des stages dans les services de secours, on donnerait forcément une autre idée de la situation.
Les 3 malheureux qui ont laissé leur vie pour éteindre un incendie (dont on a oublié les causes : Accidentelles ? Criminelles ?) seront vite oubliés par la conscience collective. Ils rejoindront les six pompiers, dont cinq venant du Chili, qui avaient péri en luttant contre un feu de forêt dans le centre du Portugal, il y a seulement quelques semaines. Chaque fois que vous croisez ou entendez une intervention des sapeurs pompiers, pensez simplement que, sans eux, notre société d’indifférence serait bien démunie pour faire face au malheur qui… n’arrive qu’aux autres. C'est bien connu!
Mais je déblogue... 
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18 août 2006 5 18 /08 /août /2006 07:17
Nicolas Sarkozy se prend de plus en plus pour Jeanne d’Arc. Certes il n’a pas encore entendu les voix qui lui diront de sauver la France, mais il fait comme s’il était investi d’une mission suprême. Les vacances ne l’ont pas calmé. Il a ouvert son chantier sur la lutte contre l’immigration clandestine, qu’aucun élu un tant soit peu honnête ne saurait tolérer. La seule différence d’analyse repose, en réalité, sur le fait que ce phénomène découle essentiellement de l’incapacité de la zone de Schengen a obtenir le respect de ses frontières, surveillées de manière fort inégale selon les pays. Il s’est lancé dans une opération suicidaire de régularisation filtrée, ne tenant aucun compte de l’ancienneté de résidence effective sur le territoire. On peut en effet considérer qu’une personne née en France ou qui y a effectivement résidé depuis plus de 5 ans, sans que les services ad hoc de l’Etat ne soient intervenus, mérite au moins un examen de son dossier. En fait, ce serait bêtement avouer que nous vivons dans une société incapable de faire appliquer les lois qu’elle institue; Et pour les gouvernants, c'est le plus insupportable à reconnaître.
Chaque jour apporte pourtant la preuve d’un grand décalage entre les textes et leur exécution sur le terrain. Même à la plus petite échelle, tous les Maires savent déjà qu’un arrêté de stationnement interdit n’a aucune valeur tant qu’il n’y a pas de sanction effective en cas d’infraction. Tous les panneaux de signalisation routière, tous les règlements basiques d’urbanisme, n’ont aucun poids réel, sauf qu’ils tranquillisent ceux qui les ont mis en place. Un bon effet d’annonce suffit en effet à rassurer le bon peuple… en revanche, question efficacité, il faut voir à l’usage. Et dans la majorité des cas, rien  n’est à la hauteur des espérances.

SARKOZY N’A PAS ENTENDU DES VOIX
Sarkozy, (NDLR : un jeune lecteur ne veut plus que je le surnomme le Roquet de Neuilly car il affirme que cela nuit à la crédibilité de mes chroniques) n’a pas entendu des voix, mais tente, par tous les moyens, de les attirer. A cet égard, il est devenu le grand spécialiste de l’annonce… sans effet. Il " karchérise " les banlieues, il poursuit " la racaille ", il " terrorise " les terroristes, il expulse les enfants sans papiers… et chaque jour, il " lepénise " les esprits, avec l’espoir que le moment venu, ils se souviendront qu’il a une tête plus honorable que l’autre.
Heureusement, il est sans cesse rattrapé par la triste réalité, celle que les Françaises et les Français ne supportent plus car elle accentue le fossé entre les grands élus et le terrain. Les citoyennes et les citoyens les plus fragiles finiront par renoncer à voter, car ils sont lassés de ce poker menteur pour " aveugles ", tuant ainsi une démocratie que certaines veulent éminemment participative alors que tout concourt à la rendre indifférente. Les lucides savent bien que le sarkozisme se base sur l’apparence de l’efficacité, destinée à surfer sur les vagues de l’opinion dominante. Une technique qui a de fortes chances de réussir, dans la mesure où les médias, miroir aux alouettes de la citoyenneté, adorent ces personnes importantes venant leur confier de pseudos révélations rassurantes.
Ainsi, Nicolas Sarkozy a été reçu avec les honneurs dus à son futur rang au journal télévisé de France 2, chaîne sur laquelle les journalistes sont payés par les contribuables pour faire correctement leur métier. Il a pu, avec son aplomb habituel, affirmer ses vérités sans grand risque d’être contredit.
D’abord, après l’expulsion d’une famille ukrainienne qui soit-disant ne parlait pas correctement le français, il s’est pris un tacle appuyé du responsable du Réseau Education Sans Frontières que les téléspectateurs n’entendront jamais : " soit monsieur Sarkozy parle de ce qu'il ne connaît pas, ce qui est totalement plausible, soit il ment, ce qui est également totalement plausible. Pour estimer que cette famille n'a pas d'attache en France, il affirme notamment que ni le père ni la mère ne parlent français. Or, ce matin, nous avons organisé une conférence de presse au cours de laquelle l'un et l'autre ont été interviewés par téléphone, et tous deux ont répondu en français, la mère s'exprimant très facilement et le père avec un peu plus d'hésitation. Avant de prendre son petit air pète-sec pour affirmer que ces personnes ne parlent pas un mot de français, monsieur Sarkozy ferait mieux de vérifier ses informations! ". En fait, il a déjà décrété, avant même d’examiner les dossiers, que seulement 6 000 d’entre eux seront recevables, sur 30 000 présentés. Pour tenir cet " engagement " efficace, tous les mensonges seront bons.

ATTENTION A L’ACCENT
Brigitte Wieser, un autre membre de RESF, remarque ainsi : "Pour ne pas dépasser le chiffre de 6.000, il faut fermer des robinets. Et là, on est en train d'assister à la fermeture des robinets". D'après elle, toutes les familles parisiennes qui ont déposé leur dossier assez tôt pour être convoquées en préfecture au mois de juillet ont été régularisées. En revanche, "depuis le 7 août, les refus tombent" pour des familles qui ont pourtant le même profil.
Jean-Michel Delarbre, membre de la Ligue des droits de l'Homme et de RESF, dénonce lui aussi l'arbitraire des décisions administratives. Il donne l'exemple de cette famille de Pantin dont le père, égyptien, est en France depuis... 1991, la mère depuis 1998 et dont les trois enfants sont nés et scolarisés en France. Alors qu'ils remplissent les critères de la circulaire, leur demande de régularisation "vient d'être refusée par la préfecture de Seine-Saint-Denis", déplore-t-il, en avançant comme explication, que les parents avaient "gardé un accent". Il se dit persuadé que "le destin de cette famille s'est joué là-dessus". Heureusement que les Marseillais ou les Alsaciens, les Basques ou les Béarnais ne doivent pas parler devant un jury pour obtenir leur carte nationale d’identité française !

VIOLENCES CONTRE LES PERSONNES : + 7,15 %
Nicolas Sarkozy a en charge la diminution délinquance, dont on sait qu’elle a lourdement pesé sur la campagne électorale présidentielle de 2002. Depuis qu’il karchérise, qu’il poursuit, qu’il traque, qu’il mobilise, qu’il enquête, qu’il réprime…tout devrait aller pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles. Or, malheureusement, les violences contre les personnes ont… augmenté de 7,15% d'août 2005 à juillet 2006, atteignant leur plus haut niveau en un an, sur fond de délinquance générale quasiment stable, selon les statistiques mensuelles publiées hier par l'Observatoire national de la délinquance (OND).
Alors qu'au cours de cette période la délinquance générale a baissé de 0,43%, les violences contre les personnes ont donc augmenté de 7,15% et, avec 425.532 faits recensés en cette période, portent cet indicateur à son plus haut niveau des 12 derniers mois. Comme à chaque fois, ce sont les "violences non crapuleuses", autrement dit les violences gratuites (198.261 faits, soit 46,59% de l'ensemble), qui participent le plus à cette hausse, avec la plus forte augmentation de la catégorie: +10,21%. Dans 12.51% des cas (24.800), les "violences gratuites" sont dirigées à l'encontre des personnes "dépositaires de l'autorité" telles que policiers ou gendarmes. Passant de 2.636.394 à 2.590.073, le nombre d'atteintes aux biens a baissé de 1,76% entre août 2005 et juillet 2006, par rapport à la même période de 2004-2005.
Toutes les catégories de vols crapuleux sont en baisse, à l'exception donc de ceux commis avec violence, qui ont crû de 7,12%, selon les chiffres de l'OND, tandis que les "destructions et dégradations" ont, elles, augmenté de 4,58%.
Dans le domaine des escroqueries, infractions économiques et financières, on note une augmentation (1,18%), "conséquence de deux évolutions distinctes", selon l'Observatoire. Ce dernier relève une "forte diminution (12,54%) des usages frauduleux de chèques", tandis que, "à l'inverse, les autres formes d'escroqueries et infractions économico-financières sont en hausse : faits d'escroqueries et abus de confiance ainsi que les infractions économiques et financières proprement dites augmentent (respectivement de 7,95% et de 19,29%)… Signe des temps, tout ce qui touche à l’argent évolue selon les…besoins des gens ! Peu importe les moyens, pourvu qu’on obtienne le fric... et les voix des terrorisés par les terroristes!
Mais je déblogue…
 
Ecrit avec le Nouvel Obs
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17 août 2006 4 17 /08 /août /2006 07:17
La société moderne peut triompher : jusqu'à la seconde moitié du XVIIIe siècle, la durée de la vie, en France, était de 25 ans en moyenne. À partir de 1750, les grandes crises - famines, épidémies - tendent à s'espacer ou à disparaître, et des progrès sont accomplis dans le domaine médical: la vaccination anti-variolique se généralise et les connaissances en obstétrique s'améliorent. La mortalité des enfants diminue, ce qui entraîne une élévation sensible de l'espérance de vie, qui atteint 43 ans en 1850. La progression de la durée de vie moyenne a été secouée par les conflits (guerres napoléoniennes, guerres de 1870, 1914-1918 et 1939-1945) qui ont entraîné des reculs importants. Mais ceux-ci n'ont duré que le temps du conflit, la progression reprenant ensuite la tendance de fond.
Le milieu du XIXe siècle voit cependant la durée de vie stagner en raison d'une remontée de la mortalité infantile, liée à l'industrialisation et l'urbanisation, qui dégradent les conditions de vie des enfants, notamment dans les villes. Elle augmente à nouveau à la fin du XIXe siècle, grâce aux progrès de l'hygiène et de la médecine, liés à la révolution pastorienne, dont les enfants sont les premiers bénéficiaires, et aussi à la mise en place des premières politiques de protection de la petite enfance.
A partir des années 1950, le risque de mourir d'une maladie infectieuse devient très faible en France, comme dans la plupart des pays développés. La progression de la durée de vie moyenne est de moins en moins liée à la chute de la mortalité infantile, celle-ci ayant atteint des niveaux très bas. Elle provient dorénavant d'une diminution des risques de décès dans les autres tranches d'âge, particulièrement chez les personnes âgées, qui bénéficient des succès de la lutte contre les maladies cardio-vasculaires et les cancers.
Les dernières révélations des statistiques en la matière démontrent que l'espérance de vie des Français a franchi, en 2004, le seuil des 80 ans, pour atteindre très précisément 80,2 ans (76,7 ans pour les hommes et 83,8 ans pour les femmes). Ce chiffre historique - qui prend un relief particulier alors que s'amplifie le débat sur la prise en charge de la dépendance - couronne deux siècles et demi de progrès de l'espérance de vie à la naissance. Le problème, c’est que cet allongement de ce qui devrait s’appeler la vie ne correspond pas avec l’enthousiasme général que peut susciter une pareille annonce.

HORRIBLE, INIMAGINABLE, INSENSE
Hier, deux fois dans la journée, je me suis rendu au chevet de mon père. Il a, si j’en crois les statisticiens, le " privilège " d’améliorer les moyennes actuelles. A plus de 82 ans, le pauvre homme souffre le martyre. Horrible, inimaginable, insensé. Lentement, il s’enlise dans la Paralysie Supranucléaire Progressive de Steel et Richardson, une saloperie de maladie, dont trois chercheurs ont identifié la cause, mais dont personne n’a, à ce jour, trouvé le remède. Les effets ressemblent à une camisole physiologique qui emprisonne lentement un corps encore puissant, et qui inexorablement l’étiole jusqu’à la mort.
Ses jambes, ses bras ne répondent plus du tout aux sollicitations d'un cerveau encore conscient et volontaire. Lui, si actif, si vaillant, si intransigeant avec l’effort, si impitoyable pour lui-même, s’est d’abord transformé en poids mort, en masse inerte. Il en a éprouvé une douleur déjà insupportable, car il n’avait jamais imaginé devenir un jour totalement inutile. Pire pour lui : il s’est retrouvé en état de dépendance absolue.
La fierté nationale ne lui a jamais plu. Celle qui consistera à annoncer que nous avons l’espoir de terminer notre existence comme lui, a de quoi le rendre fou furieux. Et d’ailleurs, il le devient, tellement sa souffrance intérieure le ronge et l’angoisse. Il se voit, jour après jour, heure après heure, sombrer dans les profondeurs de sables mouvants impalpables, qui étouffent les rares lueurs de vie encore présentes.
Désormais, mon père n’articule plus, ne peut absolument plus communiquer, bien évidemment par écrit, mais encore plus douloureusement par la parole. Un " oui " ou un " non " lui arrachent des efforts colossaux alors que son cerveau continue à vouloir faire des phrases. Dans ses yeux, de plus en plus fixes, se lit une insupportable détresse, qui ne cesse d’augmenter au fil des jours. Le fait de ne plus s’exprimer, de ne pas être en mesure d'échanger la moindre chose simple, à cause de cette affreuse maladie, le terrorise. Lui, le chêne noueux, rude, indéracinable dans les pire tempêtes, ne comprend pas quel terrible sortilège s’abat sur lui.

UNE TERRIBLE CRISE DE REVOLTE
De temps en temps, une terrible crise de révolte l’envahit. Elle demeure dans son esprit, car elle ne se traduit que par une déformation douloureuse de son visage, un sorte de long cri " muet " et " sec " qui le conforte dans son sentiment profond que plus personne ne le comprend. Insoutenable, tant on se sent faible. J’ai toujours cru que les mots étaient les soins les plus efficaces, mais là, je suis impuissant, totalement impuissant, affreusement impuissant.
Mon père veut me dire quelque chose, me confier l’une de ses préoccupations, me confier son immense détresse, mais rien ne sort, car la paralysie a atteint ses cordes vocales. J’essaie de deviner, j’attends de comprendre une bribe de son, aussi désespéré que lui de ne pas être capable de répondre à ce bouillonnement de colère qui traverse encore son crâne.
Respiration courte, il ouvre la bouche pour tenter de happer l’air qui passe, raccourcissant ses inspirations, comme un poisson dans une eau boueuse qui se restreint. Hier soir, il était dans un ailleurs proche de l’enfer, attendant je ne sais quel miracle ou quelle délivrance, claquemuré dans un affreux silence… Je me sens, tout comme le médecin qui passe le voir, totalement impuissant. Il n’y a sûrement pas de sentiment plus culpabilisant que celui qui vous cloue à vos propres limites, qui vous emprisonne dans l'univers de l'autre. En le quittant, j’épouse son long cri muet et sec dans le couloir, comme pour me soulager, comme pour exorciser je ne sais quel démon ayant envahi cette chambre, dont je ne pousse plus la porte qu’avec appréhension.

LA SOUFFRANCE RODE
Il paraît que l’on sait, avec un brin de talent,  faire dire ce que l’on veut aux statistiques. Je commence à haïr celle qui prétend que nous avons " gagné " trois ans d’espérance de vie supplémentaires grâce aux progrès de la science. Drôles de progrès. Drôle de science. Dans la maison de retraite où s’achèvent pitoyablement des vies conscientes ou inconscientes, " l’espérance " se limite à d’improbables lendemains qui ne chantent plus depuis longtemps.
La souffrance rôde. Elle n’envahit plus seulement les corps, mais se faufile insidieusement dans les esprits. Elle ne touche plus que des individus, mais ronge des groupes familiaux entiers. Elle ne se soigne plus que par des drogues, mais elle a davantage besoin de mots. Elle se moque pas mal des clameurs réjouies des spécialistes de la démographie, pour étouffer méthodiquement tous les bruits ordinaires du quotidien. Elle se calque sur le cliquètement d'une pendule.
Mon père, partagé entre les éclairs de sa raison et la passivité croissante de son corps, lutte de toutes ses forces contre un dramatique désespoir, obligatoirement silencieux. Je pressens que, dans quelques années, ils seront encore plus nombreux à mener ce combat inégal, car moralement perdu d’avance. La seule chose que je peux encore espérer, c’est de ne pas être en première ligne... ou de ne pas être mobilisé!
Mais je déblogue…
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16 août 2006 3 16 /08 /août /2006 07:17
Il serait particulièrement intéressant d’effecteur un sondage sur les plages ou dans les campings afin de savoir quel pourcentage de vacanciers connaît les raisons pour lesquelles le 15 août est un jour férié… Pourtant ils devraient, comme pour les lundis de Pâques, de Pentecôte, le jeudi de l’Ascension, la Toussaint, savoir les fondements pour lesquels ils ont le plaisir de demeurer à la maison. Il n’en va certes pas de même pour Noël dont, peu de gens ignorent la signification. Dans un pays où de nombreuses voix s’élèvent pour dénoncer les dangers du "communautarisme" religieux des uns mais pas des autres, il vaut mieux éviter d’aborder cette prééminence du catholicisme sur toutes les autres religions. Il viendra pourtant une époque où, forcément, cette réalité religieuse finira par poser un problème.
Quelle position prendra notre Etat laïque quand viendront des revendications musulmanes? Quelle sera la réaction, si demain la seconde religion pratiquée en France revendiquait que nous chômions pour Muharram (le nouvel an islamique qui célèbre le départ de Mohammed de la Mecque pour Médine, en 622), Rabi I (la naissance du prophète), Laila Al- Bar’h (la nuit du pardon), ‘Id al-Fitr (la fin du Ramadan), Dhoul-Hijja (le mois du pèlerinage à la Mecque),‘Id al-Adha (la fête du sacrifice) ? Toutes ces fêtes inconnues des non- musulmans, si elles débouchaient, comme le 15 août, sur un jour férié, deviendraient forcément plus populaires. On pourrait y ajouter les rendez-vous institutionnels des membres de l'église de Scientologie, des Juifs, des Bouddhistes, des Témoins de Jéhovah, et les 35 heures seraient largement oubliées.

MYSTERIEUSE FETE DE L’ASSOMPTION
La fête de l’Assomption doit pourtant paraître très mystérieuse à la très grande majorité des estivants, sans  pour autant leur poser des états d’âme. Parmi les fêtes mariales apparaît pourtant, dès le Ve siècle, l’Annonciation le 25 mars. La fête de la Dormition ou de l’Assomption de la Vierge remonte au VIe siècle, témoin irrécusable de la croyance de l’Église sur ce point. Enfin, la Nativité de la Vierge, le 8 septembre, universellement célébrée en Orient dès le VIIe siècle, ne le fut que depuis le XIe en Occident.
Les Catholiques célèbrent donc tout à la fois la mort, la résurrection glorieuse, l’entrée au ciel et le couronnement de la "bienheureuse Vierge Marie". On dit Assomption (d’un mot latin qui signifie enlever) et non Ascension (monter) pour marquer que Marie fut enlevée au ciel, en corps et en âme, en vertu d’un privilège particulier. Cette fête fut instaurée à partir du Concile d’Éphèse (431) qui avait proclamé Marie, Mère de Dieu. Fixée au 15 août, au commencement du VIe siècle, elle s’enrichit d’une "vigile" dès le début du VIIIe siècle. Elle a donc toujours été un jour de fête dans l’Église, surtout en France, à partir du vœu de Louis XIII, puis dans l’Église universelle, à partir de 1950, année de la proclamation du dogme de l’Assomption par le Pape Pie XII. Auriez-vous sincèrement répondu à une interrogation sur le sujet, dans un pays où le nombre de catholiques pratiquants est en chute régulière, puisque seulement 25% des Français disent prier tous les jours ou souvent, tandis que 74% prient rarement ou jamais ?

AUCUNE OBLIGATION MORALE
En 2005, 19% des Français indiquaient participer à un office religieux au moins une fois par mois et 24% aux grandes fêtes. Le taux de pratique est désormais plus élevé parmi les musulmans où 28% disent aller à un office religieux au moins une fois par mois. Quant aux athées, aux agnostiques (26% des Français se déclarent "sans religion") ils ne peuvent pas refuser un avantage qui leur est accordé sans aucune obligation morale vis à vis du motif séculaire l’ayant créé.
C’est plus clair pour les autres religions, avec certaines fêtes ne figurant pas dans le calendrier des fêtes légales, qui sont chômées et payées en vertu des accords collectifs et des usages. Parfois, elles donnent lieu à des autorisations d'absence du salarié. Il en est ainsi par exemple pour la communauté arménienne qui célèbre Noël le 6 janvier et commémore des événements douloureux les 23 février et le 24 avril, les fêtes juives de Roch Hachanah (2 jours pour le nouvel an juif et le Yom Kippour). La seule certitude c’est donc que personne ne refuse les rendez-vous fériés catholiques, sans trop se soucier de leur signification.
En fait, bien peu des travailleurs connaissent la loi en la matière, car ils pensent que ces rendez-vous fixes de l’année sont un droit inaliénable. Or, en France, seul le jour du 1er mai est considéré comme obligatoirement férié chômé et payé intégralement pour tous. Les autres jours (le 1er janvier, le lundi de Pâques, le 8 mai, l'Ascension, le lundi de Pentecôte, le 14 juillet, le 15 août, la Toussaint, le 11 novembre, Noël) ne sont chômés obligatoirement que pour les jeunes de moins de 18 ans et les apprentis, employés dans les établissements industriels. Dans la pratique, on constate qu'ils sont cependant chômés, pour la plupart des travailleurs… mais rien ne s’oppose légalement à ce qu’ils soient invités à venir au boulot.

MULTIPLES EXCEPTIONS SUPPLEMENTAIRES
Il y a, par ailleurs, de multiples exceptions supplémentaires à ces règles nationales de droit commun. Bien évidemment, l’Alsace et la Lorraine ont un statut particulier, puisque les jours fériés y sont obligatoirement chômés.On a inclus deux jours fériés de droit commun, (le 25 décembre et le 1er janvier) et un jour de " droit local d'Alsace-Moselle ", le 26 décembre, dans un texte particulier. Pour simplifier, les DOM-TOM ont également leurs particularismes locaux, peu connus, puisque une loi prévoit que le jour de la commémoration de l'abolition de l'esclavage est férié selon un calendrier différent d’un lieu à l’autre : 27 avril pour Mayotte, 22 mai pour la Martinique, 27 mai pour la Guadeloupe, et 10 juin pour la Guyane. Il faut y ajouter, dans certaines régions ou professions, des jours chômés selon des dispositions anciennes. Il en est ainsi par exemple du " vendredi saint ", toujours en Alsace-Lorraine, de la Saint-Eloi dans la métallurgie du Nord et du Pas de Calais, de la Sainte Barbe dans les mines
La République française laïque, une et indivisible a donc pris un malin plaisir à compliquer les situations, alors qu’il faudrait aller vers une simplification reposant sur un libre choix des jours de congés.
On peut en arriver, en étant de religions autres que catholique, vivant en Alsace et Lorraine ou dans les DOM-TOM, et en travaillant dans une structure économique organisée, à pouvoir s’absenter légalement entre 15 et 17 jours reconnus comme… fériés à un titre ou à un autre. Comme il est encore permis, en France, de ne pas décliner sa religion, vous pouvez fort bien profiter de l’aubaine.
Toute réforme républicaine qui viserait à clarifier cette situation pour le moins compliquée est vouée à l’échec, car elle remettrait en cause le sacro-saint principe des avantages acquis. La seule négociation possible consisterait à globaliser les jours fériés pour les convertir en jour de congés, et non pas à tenter une " raffarinade " comparable à celle du Lundi de Pentecôte. Mais, dans notre société de la religion, à la fois en chute, mais paradoxalement de plus en plus prégnante, il n’y a véritablement aucun espoir d’évolution vers une laïcisation du temps des vacances. Ce serait un tel séisme culturel que la République elle-même tremblerait sur ses bases. Et pourtant.
Mais je déblogue… 
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