LA VERTU ET LA RUSE
TARTUCA ET LA LUPA
DRAGO ET LEOCORNO
La valeur éducative du sport de compétition s’éteint peu à peu pour devenir le fidèle reflet d’une société en décomposition. Marchandisation outrancière, négation de la notion de plaisir pour la remplacer par celle de record, tricherie plus ou moins organisée pour dépasser les limites du corps humain, comportement raciste autour des pelouses, violence exacerbée sans aucun rapport avec les enjeux sportifs : les dérives deviennent tellement préoccupantes que le Roquet de Neuilly, à l’affût de tout ce qui peut le rendre populaire, s’en est emparé. Lui qui pédale, lors de ses vacances à La Teste de Buch, est un expert en matière de hooligans et, il l’a affirmé, il va karchériser, dans le monde du ballon rond, le Kop de Boulogne au Parc des Princes et ailleurs. Il est vrai que, s’il attend que les clubs et la Ligue Nationale de Football fassent le ménage, il lui faudra au moins un ou deux morts.
On ne chassera pas, en effet, les « clients abonnés » car ce serait se priver d’un revenu substantiel et, plus encore, générer la menace de voir CANAL +, extrêmement discret sur le sujet, diffuser des matchs de "haut niveau" devant des travées vides. Il a bien fallu attendre que quelques cyclistes ou athlètes meurent sur le bord d’une route pour que la lutte anti-dopage bouge un peu. La chute du nombre des licenciés chez les 14-18 ans constatée dans toutes les disciplines va détruire la pyramide sportive mais on continuera à pratiquer des spécialisations précoces destructrices de la motivation durable. Et tout est ainsi. la planète du sports ne tourne plus rond !
La récente mise à sac d’un relais d’autoroute a légèrement ému les responsables du PSG. Lors d'une conférence de presse, son président Pierre Blayau a une nouvelle fois dénoncé l'attitude absurde d'une partie des supporters parisiens, qui se sont violemment affrontés lors du déplacement du PSG à Nantes, samedi, en championnat, occasionnant… le seul score positif de la soirée : 5 blessés et 22 interpellations. "Je voudrais présenter mon indignation et ma consternation devant ces actes d'une extrême gravité, qui ne sont pas le fait de vrais supporters du club (sic) mais qui relèvent de délinquants de droit commun", a déclaré le président de la formation parisienne. Ajoutant que le PSG "est pris en otage de cela", Blayau a tenu à présenter ses excuses aux victimes de ces pseudo supporters. Tout en réaffirmant que le club et les pouvoirs publics "continuent de lutter" contre ces débordements, Sarko a donc été contacté !
Blayau, en attendant le sauveur Sarko et sa loi de karchérisation, a tenu à hausser le ton, à moins d'une semaine de la réception de l'OM au Parc des Princes, dont on sait qu’il constitue le moment le plus dangereux de la saison. Le parc des Prince sera transformé en forteresse avec des centaines de CRS et de gardes mobiles, des centaines de « stadiers », des véhicules anti-émeutes, des murailles pour séparer les belligérants : une véritable vision de la fraternité du sport.
Les forces de l’ordre deviendront peut être, un soir, supérieures au nombre de spectateurs. Ainsi, pour le choc PSG-OM de vendredi soir, pas moins de 1.100 fonctionnaires de police seront réquisitionnés, en tenue ou en civil. Soit le double de l’an passé, pour la même confrontation...
Les renseignements généraux, désormais plus préoccupés par les matchs de foot que les meetings politiques, craignent deux phénomènes explosifs. Ils auraient travaillé depuis plusieurs jours pour tenter de prévoir… ce qui paraît inévitable ! Leur première crainte a trait à la mobilisation secrète des « habitués » des affrontements violents. Au sein des groupes de supporters parisiens, on préparerait un accueil sans concession aux Phocéens. Une bande « commando », triée sur le volet parmi les plus excités, se prépare à chasser le Marseillais dès aujourd’hui en gare de Lyon. Dans les associations très proches des milieux d’extrême droite, on va tenter de pratiquer la technique de l’essaimage en sortant du Kop de Boulogne pour semer la panique dans d’autres lieux et casser du supporter phocéen.
Leur seconde inquiétude est liée au refus des responsables du PSG d’attribuer des billets aux… supporters Ultras marseillais. Ces derniers auraient contourné cette interdiction de vente et possèderaient plusieurs centaines de billets achetés sur le marché parallèle. Au lieu d’être visibles, repérables, « surveillables », « encadrables » ils profiteront de cette exclusion de fait pour se répartir dans tout le Parc. La pire des situations.
Hier, toute la journée, dans le secret, les services officiels auraient planché sur un schéma tactique. Pas celui des deux équipes en présence mais sur celui qui éviterait un affrontement sanglant et dévastateur dont on craint qu’il soit inévitable ! Ils ont prévu toutes les évolutions possibles, avant, pendant et après le match. Bientôt, on enverra les CRS à l’entraînement, tous les jours, pour permettre à 22 mecs de gagner sur un seul match ce que la compagnie entière ne gagne pas en un mois ! Mieux, on leur fait faire du sport pour qu’ils soient aptes à courir après un… hooligan !
Je vais, exceptionnellement, vous proposer un scénario de « politique… friction ». Je sais, vous n’allez pas y croire, car tout ce qui donne un caractère irrationnel à l’avenir n’a aucun intérêt, à part distraire quelques instants aux tristes réalités. Vous conviendrez cependant que, quand Jules Vernes parle de voyage sur la Lune, d’exploration 20 000 lieues sous les mers, personne n’est convaincu qu’un jour la réalité dépassera ses rêves. Et pourtant…
La politique est moins enthousiasmante que l’aventure, et j’aurai beaucoup de chance si vous ne m’abandonnez pas avant la fin du film que je me projette sur l’écran noir de mes nuits blanches. Tenez bon, si vous le pouvez, et cramponnez vous aux repères que je vais vous donner, afin de franchir sans trop de désespoir la ligne d’arrivée.
D’abord vous devez,, comme dans les grandes œuvres du répertoire, admettre l’unité de temps, de lieu et d’action, afin de vérifier que tout relève, dans les « classiques », du théâtre démocratique.
Cette saga des temps modernes se déroule donc durant les prochains douze mois, en France, et pour les élections présidentielles. Tous les éléments sont réunis pour que les actes successifs tiennent les spectatrices et spectateurs potentiels en haleine, sur fond de petits assassinats entre amis…et d’une intrigue savamment ficelée !
ACTE 1 : Jacques Chirac, retrouvant ses esprits, sait ce qu’il doit à Alain Juppé. Il faut absolument redonner sa place sur le devant de la scène à celui qui a expié sa faute en sirotant du sucre d’érable par des températures à ne pas mettre « le meilleur d’entre nous » dehors. C’est donc, depuis plusieurs mois, une priorité pour une cellule spécialisée, depuis que l’inéligibilité de l’ex-maire de Bordeaux a été réduite à un an. Elle a travaillé sur les détails de son retour vers les sommets de l’Etat. Partant du principe qu’il fallait démontrer qu’Alain Juppé, sanctionné par les juges, avait conservé la confiance des « gens d’en bas », les conseillers en communication ont inventé les étapes successives de son « come back », après que l’on ait épluché le code électoral.
Impossible, dans le cadre du calendrier « normal », de préparer cette remontée à la surface, indispensable pour contrer le Roquet de Neuilly, puisque aucune élection partielle n’est « organisable » moins d’un an avant l’échéance normale d’un mandat.
Il devenait donc indispensable, pour un retour au Palais Bourbon, que l’une de deux circonscriptions bordelaises soit libérée et pourvue avant le 18 juin 2006. C’était le plus facile…car on était dans les temps.
C’était en revanche plus compliqué pour revenir au Palais Rohan (Maire) car l’échéance était au… 18 mars 2006 sur les bases d’une durée constante du mandat ! Vous avez suivi ? Oui. Alors écoutez la suite !
ACTE 2 : L’Elysée fait monter au créneau des élus réclamant le report d’un an des municipales pour cause de surplus de scrutins en 2007, alors que Sarkozy s’affirme haut et fort hostile à cette idée… On chosit donc d’aller présenter le nouveau calendrier au Sénat !I
Sarkozy ne peut rien, car les Sénateurs, ne lui devant rien et étant ravis de l’aubaine qui consiste à allonger leur bail avec le Palais du Luxembourg d’un an (2008), se prononcent aisément en faveur de cette idée. Les Députés suivent… Le tour est joué : la date limite pour des municipales partielles est repoussée au… 18 mars 2007. On verra bien après ce que l’on fera !
Dans l’immédiat, le stratagème est en place : la voie royale du retour s’élargit. Alain Juppé pourra désormais revenir sur scène en deux temps pour médiatiser son retour dans le cœur du peuple. On jouera paisiblement sur ces opportunités pour replacer dans la course l’ancien Premier Ministre : élection législative partielle en juin 2006 et élections municipales intégrales à Bordeaux, après démission collective à l’automne de la même année (octobre ?).
Plus rien ne s’y opposer légalement d’autant qu’Alain Juppé a le choix du temps, du lieu et de l’action pour écrire triomphalement une nouvelle page de son roman d’amour avec la capitale du Duché d’Aquitaine, à laquelle il avait lancé un « adichats » plein d’espoir ! Il suffit d’utiliser les fenêtres de tir ouvertes par la loi.
ACTE 3 : L’opération est parfaitement montée, car elle tient compte du contexte. En allant sur la circonscription « Le Bouscat Bordeaux Nord » la victoire sera plus aisée que sur celle de « Bordeaux Centre ». Une occasion lui sera en effet offerte de démontrer à la fois son respect pour Hugues Martin qui a gardé la place au chaud à la Mairie (ce dernier restera député) et l’adhésion que suscite son retour. Cette victoire prévisible servira de base au coup de théâtre indispensable : des municipales à Bordeaux en 2006 !
D’une part, en provoquant ce type d’élection un peu plus d’un an avant l’échéance modifiée, Alain Juppé peut espérer faire mieux que les…50,96 % du 11 mars 2001 (un sondage discret le prouve) qui, dans le fond, n’étaient pas si intéressants que cela pour le nombre de délégués à la Communauté Urbaine de Bordeaux. D’autre part, Gilles Savary, le rival socialiste potentiel a levé le camp… et ses 20 %, qui constituaient, pour un premier tour, une performance honorable, avaient sauvé les meubles de la Gauche !
S’il arrivait à 60 %, face à une liste hétéroclite et mal préparée, Alain Juppé pourrait redistribuer les sièges communautaires et… placer, quelques mois avant les « vraies » municipales, Alain Rousset dans une situation intenable à la CUB (la perte de Saint Aubin Médoc et de 2 conseillers bordelais de droite supplémentaires le mettraient en minorité !). Ce serait le troisième fleuron du retour au bercail !
ACTE 4 : Pour l’ensemble de son œuvre, Alain Juppé retrouverait alors une cote de popularité conforme au rôle que veut lui voir jouer Chirac face au Roquet de Neuilly. Au sein de l’UMP d’abord, et ensuite dans la campagne présidentielle en préparation. Si, par hasard, Sarkozy prenait le large (on pressent qu’il le fera à la rentrée) pour voguer en solitaire, le Ministère de l’Intérieur irait comme un gant au fidèle des fidèles…dans une période critique.
La suppléante du « re-nouveau » député de Bordeaux (Chantal Bourragué ?) retrouverait alors le Palais Bourbon, perdu de vue quelques semaines…ce qui la consolerait de son sacrifice. Le scénario serait parfait.
Sarko aurait face à lui le « candidat aux deux têtes » : celle de « beau gosse » de De Villepin et celle « énarchqiue » de Juppé ! Le coup du dédoublement deviendrait imparable, et Droopy pourrait savourer un sens tactique lui ayant permis de tirer un véritable feu d’artifice de fin de règne.
ACTE 5 : Droopy pourrait même s’offrir un ultime pied de nez : démissionner, pour raison de santé, avant la fin de son mandat pour coincer des Socialistes incapables de désigner leur candidat avant… novembre 2006. Un moment d’habileté suprême car, alors, le seul recours de la bande à Hollande serait d’en appeler, toutes rivalités cessantes, à Yoyo, présenté comme le Sauveur ! J’entends d’ici les arguments en faveur d’un duo de choc : Jospin (Président)-Royal (Première Ministre) susceptible de clouer au sol Lang, Strauss Kahn et… Fabius pris de court par un calendrier désastreux. Une véritable tragédie…de « politique friction » heureusement totalement imaginaire. D'ailleurs cette hypothèse est désormais sans fondement.
Mais, vous le savez bien, vous qui êtes des lectrices ou des lecteurs fidèles, : je déblogue…
Chronique publiée le 1° février 2006