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17 août 2008 7 17 /08 /août /2008 12:35

Depuis les jeux olympiques de Rome, j'ai toujours eu un œil sur les diverses épreuves olympiques. Il m'est même arrivé d'être obligé de m'y intéresser professionnellement, puisque j'ai assuré le secrétariat de rédaction au service des sports de Sud-Ouest pour les Jeux de Los Angelés, Séoul et Barcelone. J'ai toujours été bon public, passionné par certaines disciplines dont l'athlétisme, qui demeure pour moi la plus belle d'entre elles, puisqu'il s'agit de l'essence même du sport, dans la mesure ou l'expression de la performance s'effectue sans aucun intermédiaire. Le fameux toujours plus loin, toujours plus haut, toujours plus vite, s'applique normalement sans artifice à l'ensemble des épreuves, dans la majorité des épreuves. La technique n'a pas totalement envahi les pistes, même si le revêtement a généré une nette amélioration des performances. On oublie trop souvent qu'entre un temps obtenu manuellement sur une cendrée, et celui mesuré électroniquement sur une matière synthétique, il n'y a pas l'épaisseur d'une feuille de papier à cigarettes. Ces paramètres, strictement matériels, ont déjà contribué à une amélioration des résultats. Il en va de même pour la natation, avec des bassins sophistiqués, des combinaisons perfectionnées et des chronométrages parfaits. Dans un tel contexte, les exploits n'ont bien évidemment pas la même signification.
Les jeux olympiques se résument donc à deux épreuves totalement opposées, mais révélatrices de l'évolution sociologique du sport mondial : le 100 mètres et le marathon. Pour les autres, d'une manière ou d'une autre, elles s'éloignent de la volonté originelle manifestée par les hommes de s'accomplir dans un acte gratuit de comparaison aux autres. Il est vrai que les J.O. de Pékin vont totalement à l'encontre de cette vision étriquée de leur finalité, puisque dimanche prochain on aura distribué près de 302 titres divers, ce qui bien évidemment dilue considérablement leur valeur. Pourtant, c'est cette diversité qui fait le véritable succès de compétitions n'ayant plus rien de « jeux » compte tenu de l'impact d'une performance ou d'une contre performance. En effet, en termes de marketing, le Comité international olympique a bien compris qu'il fallait moderniser son offre afin de captiver un public beaucoup plus large. La planche à voile, le beach-volley, le VTT, le Taekwondo, le Softball... ne sont pas des disciplines véritablement plus populaires et plus exigeantes que la pétanque, le rugby à 7 ou le surf. Le problème, c'est que ces pratiques ne sont pas vendeuses sur n'importe quel continent, ni dans les pays les plus peuplés de la planète. Inutile de prétendre que le seul intérêt sportif entre en compte dans les choix du CIO, car cette institution n'est rien d'autre qu'une multinationale chargée de faire du profit avec ses organisations.
Le malheur, c'est que dans un tel contexte, il règne un climat délétère de suspicion sur tous les résultats, et que les louanges sont devenues prudentes. On ne s'extasie sur tous les podiums que... provisoirement, puisque chaque jour émerge des noms inscrits au tableau de chasse des laboratoires.
Quand on regarde les effets pervers de cette multiplication des disciplines, on constate que le danger vient de partout, puisque le premier « dopé » de ces J.O. n'est autre qu'un...tireur au pistolet. Le cas de la coureuse grecque du 400 m haies, Fani Halkia, qui vient d'être épinglée positive au methyltrienolone (stéroïde anabolisant) est significatif. Championne olympique surprise, en 2004, du 400 m haies, elle devait défendre son titre en Chine alors qu'elle évitait de participer à toute compétition depuis des mois. Elle a été suivie et attrapée au Japon lors d'un stage de préparation. Bien évidemment, comme les trois autres déjà pris par la patrouille, elle n'est au courant de rien, n'a rien pris, et n'a jamais vu une seringue de sa vie !
LES DEMONS EXISTENT TOUJOURS
La première brochette n'avait guère d'importance, en terme d'image, puisqu'on y trouvait le pistolero nord-coréen Kim Jong-su, troisième en tir au pistolet à 10 m et vice-champion-olympique au pistolet à 50 m, contrôlé positif à un bêta-bloquant, le Propanolol, très utile pour stabiliser son rythme cardiaque ; une « malheureuse » gymnaste vietnamienne Do Thi Ngan Thuong, qui avait utilisé le furosémide, un diurétique, et enfin, cas plus significatif, la cycliste espagnole Maria Isabel Moreno exclue des JO après avoir été contrôlée positive à l'EPO. Ce quatuor ne fera pas la une des médias, car il doit être jeté aux oubliettes de l'histoire olympique.
Pourtant sa seule existence met en évidence l'enracinement des procédures de dopage dans tous les sports. Il suffit de le chercher pour le trouver. Encore faut-il pouvoir le détecter, car les techniques évoluent tellement vite que le jeu du chat et de la souris n'en finit pas. Tout devient difficile, car la souris a toujours un temps d'avance. Pourvu que la merveilleuse impression laissée par Ussain Bolt ne s'évanouisse pas comme celle de Ben Johnson à Séoul. La déception serait immense et je suis certain que tout le monde, à Pékin, vit dans l'angoisse, en attendant les résultats des contrôles réalisés, comme pour ceux du nageur Mickaël Phelps. Tous deux sont certainement beaucoup plus « surveillés » que le tireur nord-coréen ou la gymnaste vietnamienne qui ont été basiques dans leur comportement. Le champion olympique du 100 mètres détruirait une image insolente de facilité, et celle du dauphin américain effacerait à lui seul... la moitié des médailles d'or glanées par les USA pour un million de dollars, offerts par son sponsor pour ses 8 médailles. Ce seraient deux séismes dont les jeux ne se remettraient probablement pas. Or, il reste un doute. Un infime doute, mais compte tenu de la dimension des performances, il subsiste.
UNE PISTE DANGEREUSE
La télévision allemande avait ainsi diffusé, quelques jours avant l'ouverture des J.O., un documentaire sur la possibilité de « dopage génétique » organisé en Chine. Ce reportage, qui n'a été montré sur aucune chaîne de télévision française afin de ne pas « gêner » nos ex-amis chinois, avait abasourdi les experts en antidopage à quelques jours de l'ouverture des Jeux olympiques de Pékin. Dans ce document, diffusé par la chaîne ARD, un docteur chinois proposait, en effet, un traitement à base de cellules souches, à un reporter se faisant passer pour un entraîneur américain de natation. Ce docteur chinois proposait donc un traitement à base de cellules souches, qui renforcerait les fonctions pulmonaires. Les cellules souches iraient dans le flux sanguin et atteindraient les organes. Cette opération durerait deux semaines, avec quatre injections par intraveineuse de quarante millions de cellules souches, ou le double. Le plus étant le mieux, on peut accentuer l'impact en augmentant le nombre de cellules injectées. On utiliserait aussi de l'hormone humaine de croissance, mais avec le risque de se faire contrôler positif durant le traitement. Le coût de cette opération tournerait autour de 24 000 $, une pacotille quand on connaît les retombées financières d'un exploit olympique. Certes, rien n'est encore prouvé, mais une piste a été ouverte, et il est véritablement impossible de la fermer. Lors des sélections olympiques, les sprinteurs et sprinteuses jamaïcains ont défoncé les chronos et démontré que la Jamaïque avait rejoint les Etats-Unis au sommet du sprint mondial. Bizarre que lors de la finale, certains d'entre eux n'aient pas renouvelé leurs performances... mais c'est la fatigue et rien d'autre. Seul Ussain Bolt a paru se moquer de tous ces problèmes, en survolant, au sens propre, la piste !
TERRE MIRACLE
Quelques jours après les sélections, le responsable de l'Agence antidopage des Caraïbes s'est déclaré préoccupé par l'absence d'agence nationale antidopage... jamaïcaine : «La vérité est qu'on ne sait pas ce qui se passe là-bas. Je ne dis pas que les athlètes jamaïcains sont dopés, mais il faut qu'ils soient testés pour qu'on le sache.» C'est ce qui a été fait puisqu'un expert en... dopage, le fondateur de Balco, laboratoire californien au cœur du plus grand scandale de produits dopants, émettait, lui aussi, des doutes sur les extraordinaires qualités réputées naturelles des athlètes de ce pays de 2,7 millions d'habitants : «Je vois les hommes et les femmes les plus rapides du monde venir d'une petite île. Je trouve cela suspect. Je crois qu'il y a un usage de produits dopants dans les Caraïbes.» A Pékin, les Jamaïcains ont donc été accueillis avec force contrôles, au point de susciter des plaintes des responsables et des athlètes. «Depuis que je suis en Chine, j'ai été contrôlé quatre fois, et ils m'ont pris beaucoup de sang», s'est plaint Asafa Powell, craignant même que ces prélèvements à répétition soient responsables de ses mauvaises performances éventuelles. On attend le verdict sans trop de craintes, car il faut y croire sous peine de mourir d'ennui. Le célèbre pari de Blaise Pascal s'applique au jeux Olympiques. On ne risque rien de croire en un monde meilleur.
Au total, à Pékin, on prévoit que quelques 4.000 échantillons d'urine seront analysés dans les 48 heures, et 500 tests sanguins seront étudiés dans les 72 heures. Tous les échantillons prélevés seront congelés pendant huit ans et pourront, par la suite, faire l'objet d'autres analyses, selon des technologies encore plus poussées. Il y en a certains qui mériteront plus d'attention que d'autres dans cette banque de la performance sportive... car un jour, peut-être, ils feront redescendre de l'Olympe des Dieux qui ne méritaient que le ruisseau. Mais ce sera trop tard, mes rêves auront séché et mon scepticisme aura fleuri.
Mais je déblogue...

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commentaires

E
Au sujet du dopage dans le sport, Axel Kahn, célèbre généticien ayant également travaillé sur l’éthique dans la médecine, dit : “On assiste à des pratiques inouïes par leur audace, avec des produits qui ne sont même pas encore testés cliniquement. Par exemple, je pense que le dopage génétique est aujourd'hui inefficace. Mais je ne doute pas que des sportifs ont commencé à se faire injecter de l'ADN dans les fesses.”<br /> Et à une question sur le Tour de France cycliste il dit : “un beau spectacle dans un cadre attrayant. En même temps, je ne me fais aucune illusion : c'est une compétition entre dopés qui se font prendre et dopés qui ne se font pas prendre. Un non-dopé ne peut pas rivaliser. Mais il serait déloyal de se focaliser sur le cyclisme. Les autres sports sont aussi concernés.”Alors Annie, le doute ne me semble plus permis... 
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A
Hier, c'était Ussain Bolt, qui survolait le 100m, et de quelle manière. Aujourd'hui, ce sont les sprinteuses jamaïcaines qui raflent les trois médailles.....Décidément, les sprinteurs et sprinteuses Jamaïcains, non seulement ont rejoint les américains, comme tu le disais, mais ils les ont surclassés...de la tête et des épaules...Faut-il  être admiratif, sans réserves, ou bien, l'exploit étant aussi énorme, peut-on être dubitatif? Tu as raison, jusqu'à preuve du contraire, ils ont droit au bénéfice du doute, et donc à notre admiration. Dans le cas contraire, ce serait un coup terrible porté à l'esprit des Jeux Olympiques.
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