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28 mars 2006 2 28 /03 /mars /2006 08:19

Lorsque l'on vous traîne dans la boue, il est de bon ton de se rebeller. Hier, pourtant, j'ai été conduit de lieux en lieux pour découvrir les vertus du traitement des déchets ultimes dont aucun curiste ne saurait se faire enduire. En effet, en tant que représentant des communes de la Gironde au sein du Conseil départemental des déchets, j'ai pris encore plus conscience de l'importance qu'aura dans l'avenir l'élimination des plus "ultimes" d'entre eux. Et ceux des fameuses stations d'épuration de nos eaux polluées commencent à prendre une importance particulière. L'enjeu est colossal, car ils constituent des volumes de plus en plus importants compte tenu de l'accroissement des réseaux de collecte. Tous les élus, un tant soit peu conscients de leur responsabilité vis à vis des générations futures, doivent absolument prendre des décisions peu faciles dans les trois ou quatre ans qui viennent.
Conformément à mon souci constant d'associer les citoyens à ces prises de position bien plus fondamentales que celles du quotidien mesquin et égoïste, j'ai convoqué la population créonnaise à la 17ème rencontre autour des finances locales 2006 et des orientations communales en matière d'investissements, qui se réunira vendredi soir. Une nouvelle occasion d'échanger sur les facettes de ce problème concret d'environnement, dont il faut bien convenir qu'il ne passionne guère les foules. Il me fallait donc absolument collationner toutes les informations possibles pour être à même de répondre aux questions des personnes intéressées. Une commission consultative locale du développement durable, regroupant une vingtaine d'élus et de créonnais intéressés, poursuivra le travail sur la politique globale dont a besoin la cité, le samedi 8 avril. Une longue concertation est engagée. Elle nécessitera conviction et surtout engagement résolus.

ARDU D'EXERCER SA FONCTION D'ELU DECIDEUR

La structure locale, dans l'état actuel de son fonctionnement, produit environ 70 tonnes par an de déchets finaux après une épuration malheureusement aléatoire ce qui, inévitablement, conduit à rechercher la meilleure filière pour leur disparition. Tout hier, nous avons donc arpenté les stations pour comparer les systèmes actuels et futurs, afin d'effectuer le bon choix.
En fait, le périple m'a permis, au contact des odeurs, des couleurs et des réalités des déchets de notre société de consommation, de comprendre combien il est devenu ardu d'exercer sa fonction d'élu décideur. N'en déplaise à celles et ceux qui ne cessent de répéter, à la fin d'un repas de famille ou dans une discussion de comptoir de bistrot, que les Maires sont tous des bons à pas grand chose, je vous assure que la responsabilité devient très lourde à l'échelle d'une ville comme Créon.

A Créon en effet, le service des eaux et de l'assainissement a la singulière particularité de dépendre exclusivement des décisions municipales, contrairement à de nombreuses autres communes où ce secteur est confié à une structure intercommunale. Cette situation ne simplifie pas le choix d'une filière, car elles représentent toutes un enjeu financier considérable, en une période où l'on ne peut espérer aucun soutien de l'Etat ! Si l'on ajoute que l'Europe peut, à tout moment, selon l'humeur d'un Commissaire ou d'un éminent spécialiste, changer les règles du jeu en cours d'amortissement des équipements créés, le contexte n'est pas des plus rassurants. Pourtant il faut assumer !
Globalement, les gens réclament une forte préservation de leur environnement ou à un degré moindre de la préservation de l'eau, mais ils ignorent, car on s'évertue à le leur dissimuler, que ces orientations nécessiteront des efforts financiers colossaux dans les prochaines années. Ils devront s'astreindre à payer des factures d'eau, d'assainissement, de collecte et de traitement des déchets largement supérieures à celles de leurs feuilles d'impôts locaux. Y sont-ils prêts ?

DES PROPORTIONS DRAMATIQUES

En matière d'élimination des boues des stations d'épuration, par exemple, la première décision vise à diminuer les volumes qui atteignent désormais des proportions dramatiques. Le compactage d'eaux encore dotées de matières en suspension (4 à 5g/l) devient indispensable. Créon a déjà des rejets récupérables concentrés à 40 g/l mais il faut arriver à un niveau beaucoup plus élevé. L'installation d'une centrifugeuse aux normes, représenterait une dépense de 230 000 €, et celle passant par l'implantation dans des bacs de béton de champs de roseaux, une ardoise de 630 000 €.
Dans le premier cas, les frais de fonctionnement sont très élevés et trois exutoires existent : stockage avec chaulage pour envoi dans les champs d'un agriculteur  volontaire; expédition dans un centre spécialisé pour fabrication de compost avec des déchets verts ou incinération dans une usine dont personne ne veut. Le coût de fonctionnement est relativement élevé dans tous les cas, en raison du transport régulier et de la manipulation du chaulage.
Dans le second cas, on attendra que les végétaux se délectent des boues pour les transformer durant 3 à 5 ans, et leur donner une concentration encore plus forte, pour ensuite les évacuer vers des zones cultivables accueillantes. Les frais inhérents à cette filière sont faibles, mais l'investissement serait extrêmement lourd. Comme  gérer c'est prévoir, nous avions acquis des terrains proches de la station, au cas où... Maintenant, il faut choisir une voie !

COMPACTAGE, VALORISATION, EPANDAGE

Créon va donc proposer à la concertation une troisième solution, qui ne va pas sans poser de problèmes. En effet elle consiste à concilier toutes les formules existantes : compactage, valorisation, épandage. Le problème, c'est qu'il ne convient pas aux partenaires habituels, dans la mesure où il n'entre pas dans les systèmes actuels répertoriés.
Tout est parti d'un constat effectué sur un autre matériau à éliminer : le fumier des chevaux. La vogue présente de l'équitation fait que les volumes actuels de paille et de crottin commencent à préoccuper tout le monde. Si ce dernier s'élimine positivement, la paille constitue en effet un fléau, car elle résiste de longues années à la putréfaction lorsqu'elle est bien sèche. Une expérimentation officielle a donc permis de hâter cette mutation en malaxant le fumier avec les boues de la station. Le résultat a été homologué et même fortement soutenu par les autorités de contrôle, sauf qu'elles se sont dépêchées de... l'interdire tant qu'un espace aux normes n'a pas été spécialement aménagé. L'agriculteur ne veut pas investir. Les partenaires financiers traditionnels ne veulent pas subventionner. La commune ne peut pas se lancer dans une dépense de 130 000 €  sans garantie de durabilité de l'utilisation du système d'épandage. Le piège! Car, si nous avons bien l'assurance de la qualité de ce processus et de son intérêt pour toutes les parties en cause, nous ne pouvons pas la mettre en oeuvre sans prendre le risque, pour la seule commune de voir son investissement abandonné, dans quelques mois, à cause d'une changement des textes en vigueur. Ce cas met en évidence la dichotomie actuelle entre les objectifs indispensables pour la préservation de la planète et son environnement, et l'innovation en la matière. On est encore loin de la décision. Or le temps presse...

Jamais il a été aussi urgent de poser radicalement, simplement, fermement le principe de la nationalisation des ressources en eau. L'avenir dira si cette mesure de préservation d'un bien commun n'était pas bien plus indispensable que celle du C.P.E. pour les jeunes générations.
Mais je déblogue...


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