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27 mai 2006 6 27 /05 /mai /2006 07:17
L'allongement de la durée de vie entraîne déjà des conséquences majeures. Pour l'équilibre des régimes de retraites bien sûr, mais aussi pour les dépenses de santé. Quelles en seront les répercussions en matière de dépendance et de demandes de soins ? Toutes les études soulignent en chœur que ce sera le problème essentiel du XXI° siècle, dont il faut bien avouer que peu de monde se préoccupe autrement que par des effets d’annonce. Crin Blanc a fait le déplacement dans la cité de Cyrano pour lancer le énième plan qui ne sera, comme les précédents, suivi d’aucun effet.
En France, l'espérance de vie à la naissance est passée de 69 ans en 1950 à 82 ans en 1997 pour les femmes et de 63 à 74 ans pour les hommes. Et tout porte à croire que ces progrès vont se poursuivre. Les projections des effectifs de personnes âgées montrent aussi que la proportion des plus de 60 ans atteindra 34 % en l'an 2050 (pour 20 % en l'an 2000). Notamment, les personnes de 85 ans et plus représenteront 20 % des plus de 65 ans en 2050, contre 10 % en l'an 2000… Les courbes sont impressionnantes mais ne sont guère diffusées, car elles mettent en évidence l’incapacité de notre société moderne à anticiper. En matière de vieillesse, dans un contexte où l’on nie la mort, il semble que l’on espère que les autres résoudront les énormes difficultés qui se profilent à l’horizon. Or c’est actuellement que l’on doit proposer les investissements de demain et plus encore les métiers dont nous aurons inexorablement besoin.
La vieillesse conjugue deux éléments contradictoires. Elle nécessite en effet, sur la base de la volonté largement majoritaire, un maintien le plus longtemps possible des personnes chez elles. Un univers familier rassure et permet de maintenir le sentiment précieux que l’on reste dans le monde actif. Peu de personnes déclarent spontanément vouloir terminer leur vie dans ce que l’on appelait encore il y a trente ans une maison de retraite. Elles y voient le reflet d'une forme cruelle d’exclusion, de mise au rebut, d’une société supportant mal leur présence et les impératifs qu’elle génère. En fait, souvent, c’est une aggravation de leur santé qui nécessite absolument une prise en charge permanente. Plus aucun rapport avec la retraite telle qu’on l’envisageait, mais avec le mot pris sous l’acception de mise en retrait de la vie collective. Or, c’est une certitude, dans cinq ou dix ans malgré tous les efforts (s’ils sont concrétisés) en faveur du maintien à domicile, il manquera des centaines voire des milliers de places, dans ce que l’on a baptisé des Etablissements d’Hébergement pour Personnes Agées Dépendantes (EHPAD), à des prix abordables.
Deux phénomènes se conjuguent et devraient inquiéter : la faiblesse probable des pensions (les périodes de chômage, d’emplois sous-payés, la durée de prise en compte des trimestres pour leur calcul…) et l'augmentation des tarifs des établisements, qui vont accentuer l’inégalité absolue face à la dépendance.
En tant que Maire, je préside, d’un coté, le conseil d’administration de la maison de retraite publique de Créon et, de l’autre, le service à domicile mis en place sur 5 communes par le Centre Communal d’Action Sociale. En lisant les déclarations de Crin Blanc, je suis bien obligé, malgré toute ma volonté d’être objectif, de n’y voir que de la poudre, aux yeux d’un électorat potentiellement inquiet. Toujours selon le même principe, j’opposerai des réalités à des mesures sans aucune conséquence réelle sur l’avenir.
REPONDRE GLOBALEMENT AUX EXIGENCES
A Créon, dans quelques semaines sortira, par exemple, de terre un projet unique en Gironde auquel nous travaillons depuis… dix ans, quasiment mois pour mois. Le pôle de gérontologie du Créonnais aura probablement un peu d’avance, car il tente de répondre globalement aux exigences du grand âge plutôt que de les morceler en plusieurs entités autonomes. Seulement deux programmes, dont celui de Créon, ont été retenus en Aquitaine pour leur caractère innovant. Tout irait pour le mieux si cette reconnaissance se traduisait par autre chose que de bonnes paroles
Une partie d’hébergement permanent, une autre pour des séjours temporaires d’accoutumance, des places définitives pour les malades d’Alzheimer ou d’autres maladies cérébrales dégénérescentes, des possibilités d’accueil à la journée pour ces personnes en perte d’autonomie, des possibilités de repas pour des personnes de passage, un service d’intervention depuis l’établissement pour aller vers des gens isolés… Tout a été pensé pour que, depuis ce lieu et, en ce lieu, on puisse prendre en compte l’évolution démographique sur le territoire du Créonnais. Il ne manque que les fonds.
Le Conseil Général a sorti plus de 2 650 000 € pour soutenir l’initiative. La CRAMA a consenti un prêt sans intérêt. Et l’Etat (n’est-ce pas Monsieur D. de V. ?) n’a pas un € à mettre dans le montage de l’opération… Pire, alors que le splendide Secrétaire d’Etat aux personnes âgées, expédie un communiqué aux médias pour accorder une TVA réduite aux maisons de retraite en construction (5,5 au lieu de 19,6) la Direction Départementale de l’Equipement de la Gironde refuse cette interprétation et fait perdre la bagatelle de 1,3 million d’€ à la Maison de retraite publique maître d’ouvrage et donc aux résidents ! Et la DDASS mégote sur des ¼ de postes, des frais inévitables, car les budgets ne sont que très rarement accordés.
"Dans les établissements hébergeant des personnes âgées dépendantes, 5.000 places seront créées chaque année d'ici 2012", a annoncé D. de V. Ces nouvelles places d'accueil s'ajouteraient aux 10.000 déjà créées dans le cadre du plan "Vieillissement et solidarité" lancé à l'automne 2003 ! Où sont elles? Le Premier ministre a également souhaité qu'il y ait un professionnel (aide-soignant par exemple) par personne âgée très dépendante dans les maisons de retraite à l'horizon 2012, pour améliorer l'encadrement. Compte tenu de ce que je sais des engagements de l’Etat j’ai beaucoup de mal à croire un mot des déclarations de ce Cyrano de Bergerac !
DES DRAMES QUI SE PREPARENT
En ce qui concerne le maintien à domicile, la situation empire de jour en jour. Si l’on doit attendre 2012 pour répondre aux besoins en matière de toilettes, de soins quotidiens, de lever et de coucher, il y a des drames qui se préparent. A Créon, Mutualité Santé Services, organisme du Pavillon de la Mutualité, ne peut pas actuellement satisfaire des dizaines de demandes, et le CCAS est dans l’incapacité totale de répondre à ces sollicitations nécessitant du personnel spécialisé. Les infirmières libérales sont submergées.
Il ne se passe pas un jour sans qu’un incident mette en évidence que l’isolement demeure l'ennemi de toutes les théories sur l’hospitalisation à domicile, qui peut être la meilleure et la pire des solutions. Ainsi en deux circonstances précises j’ai vécu le pire (lire ou relire une chronique de L’AUTRE QUOTIDIEN intitulée "adieu Loulou"). La dernière, c’est quand un service de gériatrie voulait renvoyer " chez elle " une pauvre femme hospitalisée depuis des semaines. Son " chez elle " était une caravane sans aucun confort (ni eau, ni électricité) au milieu des bois, avec un fils encore plus malade que sa mère… Les exemples ne manquent pas dans le milieu rural, mais il semble, vu de Paris, que ce dur constat du quotidien n’ait pas de prise sur des décisions strictement théoriques.
La CRAMA ne peut plus traiter les demandes qui lui sont transmises. Elle avoue en gironde avoir...2 500 dossiers en attente de décision. La Mutualité Sociale Agricole n’a plus un fifrelin. Une féroce inégalité se creuse selon les moyens financiers dont disposent pour leur quatrième âge les personnes en difficulté. Le Conseil Général croule sous les demandes d’APA et réduit rétroactivement ses attributions.
Et pendant que tout s’écroule, les services (associations prestataires ou CCAS) doivent faire les banquiers d’un système qui n’a plus les moyens de payer ce qu’il accorde. En avril nous avons reçu 1500 € de remboursements pour payer… 27 employées, et nous avons pour la première fois été obligés d’ouvrir une ligne de trésorerie bancaire. Et de Bergerac, qu’il a sûrement identifiée comme ville UMP de la France profonde, Crin Blanc clame que, pour permettre aux personnes âgées de rester chez elles,  le nombre de places de services de soins infirmiers à domicile augmentera de 40% en cinq ans ! Il est actuellement de 80.000. De plus, le nombre de places en hospitalisation à domicile atteindra 15.000 dès 2010
Tiens au fait, qui sera Premier Ministre, même pas dans 5 ans ou dans 4 ans, mais dans 15 jours ? Qui rendra compte de ces promesses auprès d’électrices et d’électeurs qui ne seront pas là pour juger, ou qui pensent que jamais ils auront besoin de ces moyens pourtant indispensables aujourd’hui ?
Mais je déblogue...
 
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