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16 août 2006 3 16 /08 /août /2006 07:17
Il serait particulièrement intéressant d’effecteur un sondage sur les plages ou dans les campings afin de savoir quel pourcentage de vacanciers connaît les raisons pour lesquelles le 15 août est un jour férié… Pourtant ils devraient, comme pour les lundis de Pâques, de Pentecôte, le jeudi de l’Ascension, la Toussaint, savoir les fondements pour lesquels ils ont le plaisir de demeurer à la maison. Il n’en va certes pas de même pour Noël dont, peu de gens ignorent la signification. Dans un pays où de nombreuses voix s’élèvent pour dénoncer les dangers du "communautarisme" religieux des uns mais pas des autres, il vaut mieux éviter d’aborder cette prééminence du catholicisme sur toutes les autres religions. Il viendra pourtant une époque où, forcément, cette réalité religieuse finira par poser un problème.
Quelle position prendra notre Etat laïque quand viendront des revendications musulmanes? Quelle sera la réaction, si demain la seconde religion pratiquée en France revendiquait que nous chômions pour Muharram (le nouvel an islamique qui célèbre le départ de Mohammed de la Mecque pour Médine, en 622), Rabi I (la naissance du prophète), Laila Al- Bar’h (la nuit du pardon), ‘Id al-Fitr (la fin du Ramadan), Dhoul-Hijja (le mois du pèlerinage à la Mecque),‘Id al-Adha (la fête du sacrifice) ? Toutes ces fêtes inconnues des non- musulmans, si elles débouchaient, comme le 15 août, sur un jour férié, deviendraient forcément plus populaires. On pourrait y ajouter les rendez-vous institutionnels des membres de l'église de Scientologie, des Juifs, des Bouddhistes, des Témoins de Jéhovah, et les 35 heures seraient largement oubliées.

MYSTERIEUSE FETE DE L’ASSOMPTION
La fête de l’Assomption doit pourtant paraître très mystérieuse à la très grande majorité des estivants, sans  pour autant leur poser des états d’âme. Parmi les fêtes mariales apparaît pourtant, dès le Ve siècle, l’Annonciation le 25 mars. La fête de la Dormition ou de l’Assomption de la Vierge remonte au VIe siècle, témoin irrécusable de la croyance de l’Église sur ce point. Enfin, la Nativité de la Vierge, le 8 septembre, universellement célébrée en Orient dès le VIIe siècle, ne le fut que depuis le XIe en Occident.
Les Catholiques célèbrent donc tout à la fois la mort, la résurrection glorieuse, l’entrée au ciel et le couronnement de la "bienheureuse Vierge Marie". On dit Assomption (d’un mot latin qui signifie enlever) et non Ascension (monter) pour marquer que Marie fut enlevée au ciel, en corps et en âme, en vertu d’un privilège particulier. Cette fête fut instaurée à partir du Concile d’Éphèse (431) qui avait proclamé Marie, Mère de Dieu. Fixée au 15 août, au commencement du VIe siècle, elle s’enrichit d’une "vigile" dès le début du VIIIe siècle. Elle a donc toujours été un jour de fête dans l’Église, surtout en France, à partir du vœu de Louis XIII, puis dans l’Église universelle, à partir de 1950, année de la proclamation du dogme de l’Assomption par le Pape Pie XII. Auriez-vous sincèrement répondu à une interrogation sur le sujet, dans un pays où le nombre de catholiques pratiquants est en chute régulière, puisque seulement 25% des Français disent prier tous les jours ou souvent, tandis que 74% prient rarement ou jamais ?

AUCUNE OBLIGATION MORALE
En 2005, 19% des Français indiquaient participer à un office religieux au moins une fois par mois et 24% aux grandes fêtes. Le taux de pratique est désormais plus élevé parmi les musulmans où 28% disent aller à un office religieux au moins une fois par mois. Quant aux athées, aux agnostiques (26% des Français se déclarent "sans religion") ils ne peuvent pas refuser un avantage qui leur est accordé sans aucune obligation morale vis à vis du motif séculaire l’ayant créé.
C’est plus clair pour les autres religions, avec certaines fêtes ne figurant pas dans le calendrier des fêtes légales, qui sont chômées et payées en vertu des accords collectifs et des usages. Parfois, elles donnent lieu à des autorisations d'absence du salarié. Il en est ainsi par exemple pour la communauté arménienne qui célèbre Noël le 6 janvier et commémore des événements douloureux les 23 février et le 24 avril, les fêtes juives de Roch Hachanah (2 jours pour le nouvel an juif et le Yom Kippour). La seule certitude c’est donc que personne ne refuse les rendez-vous fériés catholiques, sans trop se soucier de leur signification.
En fait, bien peu des travailleurs connaissent la loi en la matière, car ils pensent que ces rendez-vous fixes de l’année sont un droit inaliénable. Or, en France, seul le jour du 1er mai est considéré comme obligatoirement férié chômé et payé intégralement pour tous. Les autres jours (le 1er janvier, le lundi de Pâques, le 8 mai, l'Ascension, le lundi de Pentecôte, le 14 juillet, le 15 août, la Toussaint, le 11 novembre, Noël) ne sont chômés obligatoirement que pour les jeunes de moins de 18 ans et les apprentis, employés dans les établissements industriels. Dans la pratique, on constate qu'ils sont cependant chômés, pour la plupart des travailleurs… mais rien ne s’oppose légalement à ce qu’ils soient invités à venir au boulot.

MULTIPLES EXCEPTIONS SUPPLEMENTAIRES
Il y a, par ailleurs, de multiples exceptions supplémentaires à ces règles nationales de droit commun. Bien évidemment, l’Alsace et la Lorraine ont un statut particulier, puisque les jours fériés y sont obligatoirement chômés.On a inclus deux jours fériés de droit commun, (le 25 décembre et le 1er janvier) et un jour de " droit local d'Alsace-Moselle ", le 26 décembre, dans un texte particulier. Pour simplifier, les DOM-TOM ont également leurs particularismes locaux, peu connus, puisque une loi prévoit que le jour de la commémoration de l'abolition de l'esclavage est férié selon un calendrier différent d’un lieu à l’autre : 27 avril pour Mayotte, 22 mai pour la Martinique, 27 mai pour la Guadeloupe, et 10 juin pour la Guyane. Il faut y ajouter, dans certaines régions ou professions, des jours chômés selon des dispositions anciennes. Il en est ainsi par exemple du " vendredi saint ", toujours en Alsace-Lorraine, de la Saint-Eloi dans la métallurgie du Nord et du Pas de Calais, de la Sainte Barbe dans les mines
La République française laïque, une et indivisible a donc pris un malin plaisir à compliquer les situations, alors qu’il faudrait aller vers une simplification reposant sur un libre choix des jours de congés.
On peut en arriver, en étant de religions autres que catholique, vivant en Alsace et Lorraine ou dans les DOM-TOM, et en travaillant dans une structure économique organisée, à pouvoir s’absenter légalement entre 15 et 17 jours reconnus comme… fériés à un titre ou à un autre. Comme il est encore permis, en France, de ne pas décliner sa religion, vous pouvez fort bien profiter de l’aubaine.
Toute réforme républicaine qui viserait à clarifier cette situation pour le moins compliquée est vouée à l’échec, car elle remettrait en cause le sacro-saint principe des avantages acquis. La seule négociation possible consisterait à globaliser les jours fériés pour les convertir en jour de congés, et non pas à tenter une " raffarinade " comparable à celle du Lundi de Pentecôte. Mais, dans notre société de la religion, à la fois en chute, mais paradoxalement de plus en plus prégnante, il n’y a véritablement aucun espoir d’évolution vers une laïcisation du temps des vacances. Ce serait un tel séisme culturel que la République elle-même tremblerait sur ses bases. Et pourtant.
Mais je déblogue… 
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