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14 juillet 2007 6 14 /07 /juillet /2007 14:53
Le couturier Yves Saint-Laurent, le basketteur Tony Parker et la journaliste Christine Ockrent figurent notamment dans la promotion du 14 juillet de l'Ordre national de la Légion d'honneur publiée au Journal Officiel ce matin.
Yves Saint-Laurent et l'ancien champion olympique Alain Mimoun ont été élevés à la dignité de grand officier. La journaliste Christine Ockrent a été promue au grade d'officier de la Légion d'honneur.
Tony Parker, qui vient de se marier avec l'actrice américaine Eva Longoria, vedette de la série "Desperate Housewives", a été fait chevalier.
Le président du groupe d'assurances italien Generali, le Français Antoine Bernheim, a été élevé à la dignité de grand-croix de la Légion d'honneur.
Jean-Bernard Raymond, ancien ministre des Affaires étrangères, ainsi que Jean Lacouture, journaliste et écrivain, ont été promus au grade de commandeur.
L'ancien coureur cycliste Bernard Hinault et l'ancien secrétaire d'Etat à l'intégration Koffi Yamgnane sont promus au grade d'officier.
La journaliste Elise Lucet et l'économiste Nicolas Baverez ont été faits chevalier… Ils sont des centaines en ce 14 juillet en recevant cette décoration qui symbolise, depuis plus de 200 ans, un comportement remarquable à l’égard de la République. L'admission et l'avancement dans l'ordre sont prononcés dans la limite de contingents fixés par décret du Président de la République pour une période de trois ans. Ces contingents sont répartis entre le Président et les différents ministres qui adressent leurs propositions au Grand chancelier.
L'attribution est presque automatique pour les anciens ministres, les Préfets honoraires ou en activité, les anciens députés ou sénateurs (les ministres et parlementaires en activité sont exclus du champ sauf pour faits de guerre), les hauts magistrats et les membres du corps diplomatique. L'obtention d'une médaille d'or aux Jeux olympiques est une promotion spéciale.
L'armée obtient toujours cinquante pour cent des places et les autres professions bien représentées sont les policiers, les pompiers, les élus, les hauts fonctionnaires et les représentants des cultes. Depuis quelques années il faut noter une évolution avec une peopolisation des attributions : journalistes et vedettes du show-bizz sont souvent présents dans les listes des récipiendaires. On y trouve aussi quelques membres influents des comités de soutien constitués lors des élections présidentielles. Il faudra éplucher la liste paraissant au Journal officiel pour les trouver répartis au gré des ministères.
De plus, à l'origine, les descendants de trois générations successives de décorés de la Légion d'honneur obtenaient ladite décoration par… l'hérédité. Cette disposition, tombée en désuétude depuis, n'a cependant jamais été abolie. Elle s’applique en catimini mais garantit à des familles la présence permanente d’un " légionnaire ".
DES ADVERSAIRES RESOLUS
La légion d’honneur, tant enviée par certains, a également ses détracteurs très sévères, ses adversaires résolus qui considèrent qu’elle ne représente rien d’autre qu’un hochet destiné à accroître l’estime en faveur de celui ou celle qui vous l’ont attribuée. Certains sont d’ailleurs devenus plus célèbres en refusant avec fracas le ruban rouge qu’en l’acceptant.
Par exemple dans le monde des médias les collaborateurs du Canard Enchainé doivent refuser depuis toujours les décorations, au premier rang desquelles la Légion d'honneur (Pierre Scize journaliste, sera renvoyé du journal en 1933 pour l'avoir acceptée). D’autres personnes de grande notoriété refusèrent la décoration : le dramaturge Néponucème Lemercier refusant de prêter serment à l'Empereur et à sa dynastie, La Fayette et le poète, Gérard de Nerval, l’écrivaine George Sand, l’artiste Honoré Daumier, le célèbre linguiste Littré puis ensuite le peintre Gustave Courbet, l’écrivain Guy de Maupassant, le musicien Maurice Ravel, les scientifiques Pierre et Marie Curie et bien d’autres personnalités de notre temps comme Eugène Le Roy, Jean Paul Sartre, Simone de Beauvoir, Albert Camus, Antoine Pinay, Brigitte Bardot (qui est décorée en 1985 mais refuse d'aller la chercher) ou Catherine Deneuve.
Des poètes anarchisants comme Jacques Prévert, Georges Brassens qui en fit une chanson ou Léo Ferré, qui a brocardé " ce ruban malheureux et rouge comme la honte " ont également décliné l’offre qui leur était faite. Distingué fin, l'écrivain Bernard Clavel a fait savoir qu'il refusait de recevoir la Légion d'honneur, préférant rester " dans le clan de ceux qui l'ont refusée ". Il a ajouté que son oncle Charles Clavel l'avait reçue parce qu'il avait abondamment versé son sang pour son pays dans une terrible guerre : " Je pense qu'il se retournerait dans sa tombe en me voyant porter le même ruban que lui. " . C'est également le cas de Philippe Seguin, dont le père instituteur fut décoré de la Légion d'Honneur seulement… à titre posthume lors de la Seconde guerre mondiale.
Lors d'une rencontre, le président de la République Vincent Auriol proposa la Légion d'honneur à Marcel Aymé. En retour, l'écrivain lui indiqua sans ménagement tout le mépris que lui inspire son interlocuteur. Puis il termine par ces mots, demeurés célèbres : " Quant à votre Légion d'honneur, monsieur le président, sauf votre respect, vous pouvez vous la carrer dans le train... " L’anecdote reste encore d’actualité puisque ceux qui ont été " récompensés " cette année l’auront été grâce à la signature de Nicolas Sarkozy. Ils doivent l’assumer.
UNE PROCEDURE PAR FILTRAGE
Il faut bien avouer que cette liste historique non exhaustive a au moins aussi fière allure que celle des gens ayant accepté de recevoir le titre qui leur a été attribué. Beaucoup d’entre eux ne cessent par exemple de répéter qu’ils n’ont rien demandé alors qu’il faut absolument fournir une foule de témoignages, de renseignements administratifs permettant d’affirmer que même si vous ne quémandez pas la Légion d’honneur vous savez pertinemment que d’autres le font en votre nom au moins pour le grade de chevalier.
Contrairement aux idées reçues, "on ne demande pas" en effet la Légion d'honneur, ni pour soi-même, ni pour un autre : on "propose" un dossier, insiste le secrétaire général de l'Ordre de la Légion d'honneur. Des proches, collaborateurs ou collègues doivent signaler la situation exceptionnelle d'une personne auprès d'élus locaux, d'associations ou d'entreprises. Ce sont eux qui seront les plus à même de déposer un dossier de proposition au service des décorations de la préfecture (des formulaires peuvent généralement être téléchargés en ligne).
Le premier "filtre" se situe à la préfecture : c'est le préfet qui sélectionne les dossiers recevables et les adresse aux ministères concernés par les activités du "candidat". La sélection est évidemment très " politique " car il faut franchir un obstacle lié aux retombées éventuelles de cette proposition. Le ministre réalise ensuite son choix en fonction de la qualité des dossiers. Il ne doit toutefois pas excéder le nombre annuel de nominations qui lui a été attribué.
Il adresse alors ses propositions à la Grande Chancellerie, située au Palais de Salm à Paris. Les 16 membres du Conseil de l'Ordre et le Grand chancelier étudient les dossiers avant de transmettre leur sélection au Président de la République. "Il faut être irréprochable dans son métier et faire quelque chose en plus, qui sorte de l'ordinaire et nous distingue : être créatif et donner aux autres en général" explique le secrétaire général de l’ordre de la Légion d’Honneur. C'est alors le Président, qui est aussi le Grand maître de l'ordre, qui donne l'accord définitif par décret.
Ses collaborateurs peuvent donc fort bien rayer ou ajouter sur la liste des personnes à leurs convenances d’autant qu’ils possèdent au titre de la Présidence un nombre de décorations attribuables par la seule volonté présidentielle. Cette procédure rend toute nomination forcément suspecte car entachée d’une connotation politique forte.
UN CARACTERE COLLECTIF
En fait toute décoration est contestable car elle n’a une valeur sociale que pour celles et ceux qui attachent une importance dans la mesure du devoir. J’ai été personnellement confronté à cette situation voulant que je sois destinataire de ces médailles plus ou moins importantes. Chaque fois je me suis posé la question de savoir ce qu’il m’appartenait de faire. En fait chaque fois j’ai surtout pensé que toute distinction n’est acceptable que si on lui donne un caractère collectif et que l’on ne tombe pas dans l’individualisme forcené. Il est indispensable, quand on a été redevable aux autres, de ce que certains considèrent comme une réussite professionnelle ou sociale, de ne pas les mépriser.
C’est toujours en pensant à celles et ceux qui se sont parfois sacrifiés ou dévoués, celles et ceux qui m’ont accordé à un moment ou à un autre leur confiance, à celles et ceux auxquels on a imposé des contraintes ou des manques que j’ai accepté. On doit toujours beaucoup plus aux autres qu’à soi-même. Ne pas l’admettre ou le reconnaître serait une preuve d’une vanité incommensurable.
Je crois donc qu’il y aurait pour un enfant du peuple un certain orgueil mal placé, un certain mépris indécent dans le fait de refuser de voir honoré un parcours personnel jugé comme un brin exemplaire. On ne peut pas ignorer la valeur de l’exemple quand il est en conformité avec les vertus républicaine.
J’entends par ailleurs les reproches qui tombent des censeurs. Il suffit d’avoir accompli son devoir pour ne pas avoir besoin d’un hochet. La simple satisfaction morale doit suffire à celui qui agit dans l’intérêt collectif. Comment accepter de se trouver mis dans le même sac que les " fayots ", les " calculateurs ", les " lèche bottes ", les " tricheurs ", les " flambeurs ", les " m’as-tu-vu ? " ? Toutes ces remarques sont fondées mais à partir du moment où on assume ses choix, il est inutile de revenir sur sa propre responsabilité.
L’essentiel reste de ne pas avoir craché sur les médailles des autres pour laisser croire que la sienne est au-dessus et que l'on devient un parangon de modestie. C’est peut être là que se situe la plus grande vanité.
Tenez parmi la liste de ce 14 juillet on trouve Christine Ockrent qui, j’en suis certain, ne peut oublier qu’elle a écrit dans " la mémoire du cœur " en 1997 : " Les grimaces et les hochets du pouvoir, occupent plus volontiers les hommes, qui vont moins vite à l'essentiel ". Il est certain qu’elle placera cette pensée sentencieuse quand le Président de la République lui remettra sa décoration car pour elle c’est certain, il fera un effort pour la décorer en présence de son mari Bernard Kouchner adversaire résolu de... la légion d'Honneur! 
Mais je déblogue…
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