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9 septembre 2005 5 09 /09 /septembre /2005 00:00

L’eau. Il n’y a plus un seul jour sans que ce mot là revienne dans la gestion communale. Il a certes toujours été fondamental pour la vie quotidienne des collectivités, mais ce qui était naturel, clair, coulant de source, devient catastrophique, sombre, rare ou cataclysmique. Extraordinaire mutation d’un monde affolé par ses dures réalités.

Durant les derniers mois, le débat a porté sur les indispensables économies d’une eau devenue rare. Depuis quelques jours, il tape dur sur l’imprévision en matière d'inondations.

Le triptyque de la philosophie sociale classique, maison, gazon, télévision tremble sur ses bases dans cette crise.

Maison. Il faut de l’eau partout. Dans les baignoires, dans les chasses, dans les machines diverses et variées, qui usent et abusent des rinçages… le liquide de vie est dépensé sur des bases non contrôlées ou peu contrôlées. Il est réexpédié dans d’obscurs tuyaux souterrains dont peu de gens connaissent les réalités ultimes. L’épuration n’a jamais été un mot très apprécié des Français. C’est probablement la raison pour laquelle il y a de la résistance à payer le traitement de ses eaux souillées. Dans la maison, on ne prend conscience de l’importance de l’eau qu’en deux circonstances : lorsqu’elle est coupée, et lorsque l’on reçoit la facture... Le reste du temps, on achète à prix d’or celle que les multinationales vendent en bouteille, et on laisse couler à flots celle que délivre de plus en plus péniblement la collectivité !

Gazon. Il est devenu le symbole de la réussite sociale et familiale. Une belle pelouse, soigneusement tondue, verte à faire pâlir un Martien, constitue le nec plus ultra de la richesse intellectuelle. Le paillasson vous ramène au rang de la pauvreté matérielle, et plus encore de la fainéantise potentielle. L’eau joue alors un rôle fondamental, car c’est elle qui confère à la maisonnée l’apparence du bonheur parfait. Peu importe le coût, peu importe que l’on ne mange que des produits standardisés, peu importe que l’on ne sorte plus, peu importe que l’on consacre l’idéal de la vie à des tontes britanniques : l’essentiel réside dans la vision extérieure offerte au voisinage. On hisse l’environnement du pavillon au faîte de la renommée. Et, dans ce cas là, il est absolument inutile de tenter d’expliquer que l’on ne pourra plus continuer longtemps à arroser des gazons flamboyants mais inutiles. Les concepteurs du Tramway bordelais en ont donné un exemple extraordinairement frappant, avec ces longues saignées de chirurgie esthétique, reposant sur un étalage du gazon déroulé en grande... pompe. Tellement en grande pompe qu’il a fallu stopper cette alimentation aquatique sous peine d’affoler les surveillants de la ressource. La saignée verte, optimiste, séduisante, de l’avenue Thiers, s’est muée en rides bourrées de fond de teint ocre. Insulte suprême à la puissance régénératrice de l’eau…

Télévision. Elle n’apporte plus que de mauvaises nouvelles dans ce monde idyllique où les robinets doivent couler éternellement. L’étrange lucarne justifie son surnom en diffusant des images incongrues. Des trombes d’eau qui dévastent, ravagent, envahissent, noient, et qui sèment la terreur. L’eau, tellement désirée dans nos campagnes jaunies, s’abat désormais sans vergogne, à seaux, sur la tête d’habitants désespérés par sa montée. Eux qui quelques jours avant, dans leur maison, rêvaient d’une ondée providentielle ragaillardissant leur gazon maudit, se retrouvent submergés.

Etrange destin que celui d’une société croyant toujours qu’elle pourra un jour maîtriser des éléments naturels qu’elle sait pourtant évolutifs sur des millénaires, mais qu’elle fait semblant de ne pas savoir aussi inconstants d’un jour à l’autre.

Quant au Maire, il lui faut gérer à la fois la pénurie et la surabondance, dans un laps de temps très réduit. Trouver de l’eau durant un mois et retirer de l’eau durant une semaine : mission impossible, témoignant de la perte totale, par les hommes, de la vision du caractère aléatoire de la vie de leur planète.

Dommage que l’eau ne passionne pas les auteurs des programmes politiques, car ils seraient tous d’accord pour la nationaliser et la placer sous la protection de la collectivité.

Mais je déblogue…

 
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commentaires

J
les scandales liés aux facturations "irréalistes" sont trop nombreux ... en Aquitaine, Jacques Margalef est l'un des spécialistes pour pratiquer l'audit des factures d'eau<br /> stride@wanadoo.fr
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