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22 janvier 2009 4 22 /01 /janvier /2009 07:07

Le renoncement constitue le pire ennemi des démocraties. Il les ronge quotidiennement comme un cancer le fait dans un organe vital. Il finit, lentement, par anesthésier les consciences et par laisser aux minorités agissantes le champ libre pour exprimer des positions qui ne correspondent en rien à l'intérêt général. Notre société souffre terriblement de ce mal pervers. Indifférents : les Français sont de plus en plus indifférents à tout. Ils se recroquevillent sur des univers étroits, en appliquant les principes de la statue des trois singes. Je ne vois rien, je n'entends rien, je ne dis rien... car voir, entendre ou dire, restent des actes concrets qui peuvent m'inscrire dans une voie dangereuse : celle de la citoyenneté ! Et il faut bien reconnaître que le mal empire, avec un culte du chacun pour soi qui va conduire la République à sa perte. Ecrire cela ce n'est surtout pas fantasmer sur le coup d'état permanent, mais c'est simplement alerter sur une évolution dangereuse et méthodique. En fait, quand sonnera l'heure du réveil, on vérifiera que la gangrène du XX° siècle aura prospéré sur le refus collectif de voir la vérité en face. Il suffirait pourtant de regrouper, dans un même texte, les atteintes successives à la liberté de tout un chacun, pour dresser un tableau effrayant de l'évolution.
Force est de reconnaître que personne n'a encore réalisé ce travail, qui mettrait en évidence la structuration d'un projet visant à installer pour très longtemps un régime UMP, capable structurellement de résister à tous les aléas conjoncturels. Tout est imaginé, proposé, voté et appliqué avec cet objectif : en période de crise, il faut blinder les chemins et les lieux de pouvoir, car les préoccupations matérielles sont telles que l'essentiel devient accessoire ! On ne se préoccupe guère des atteintes aux droits de l'opposition, au droit de grève, au droit d'expression, au droit de vivre ! Il faut avouer que ce ne sont pas les médias qui sonnent le tocsin, et que personne ne barrera la une de son journal avec un tonitruant « J'accuse ! », car la liberté de la presse chancelle à l'échelle nationale.
François Bayrou a parfaitement synthétisé ce mouvement lancé par un Président qui n'a aucun scrupule à accaparer tous les leviers du pouvoir car, selon lui, l'exécutif est en train de tirer les institutions vers « l'abus de pouvoir ». Si c'était un socialiste ou un homme de Gauche qui l'avait dit, les dépêches d'agence ne l'auraient pas repris, car il aurait été réputé marqué par un esprit partisan, alors que Bayrou, lui, il est « apolitique ».
« Ce sont les institutions qu'on est en train de tirer vers l'abus de pouvoir et donc vous verrez que se multiplieront des incidents de cet ordre, parce que si un parti a tous les pouvoirs, les autres n'ont rien d'autre que la protestation », a déclaré le président du MoDem. Il a indiqué que « sans aucun doute », il ne voterait pas cette réforme du fonctionnement de l'Assemblée nationale sans « des garanties que pour l'instant il n'aperçoit pas ». Il pourra les chercher longtemps, puisque ces textes de loi sont faits pour enlever toutes les garanties antérieures.
LA SUITE ARRIVE
En fait, nous sommes entrés progressivement dans un régime présidentiel autocratique, dont la majorité politique elle-même s'inquiète. Il s'agit tout simplement de réduire au silence les moindres tentatives d'opposition par des règlements, des textes réputés démocratiques, puisque votés par ceux auxquels ils profitent. Les réformes se résument à une litanie de restrictions des droits des citoyens, sous le fallacieux prétexte d'émanciper les forces les plus dynamiques, dont aurait besoin un pays au bord du gouffre ! Celle de la constitution avait déjà affolé... les parlementaires de Droite les moins supporteurs inconditionnels du Président-Directeur-Général de la France. La réforme constitutionnelle ne suscitait pas des réserves uniquement à gauche, sauf pour Jack Lang qui s'est fourvoyé par ambition personnelle, et qui porte rétrospectivement une lourde responsabilité. Nombreux étaient les parlementaires de droite hostiles à cette réforme. Témoin la réunion du groupe UMP, le 30 avril dernier, à l'Assemblée, une réunion « houleuse », selon certains participants.
Ancien ministre des Relations avec le Parlement, Henri Cuq était intervenu pour dénoncer une réforme qui dénaturerait l'esprit de la Ve République, notamment en permettant au chef de l'Etat de s'exprimer devant le Parlement. Soucieux d'apaisement, Jean-François Copé, le président du groupe, relativisait la portée de la fronde : « Il en va toujours ainsi : quand un texte nouveau arrive, ce sont les réticents qui s'expriment.» A la sortie de la réunion, le même Copé avait pourtant assuré que le texte ne pouvait pas « être adopté en l'état». Deux députés villepinistes, François Goulard et Hervé Mariton, avaient demandé pour leur part un report de son examen. Quant à Bernard Debré, député de Paris, il avait prévenu, dans le «JDD» : «Cette réforme, si elle n'est pas amendée, transformée, je ne la voterai pas», allant jusqu'à juger «psychédélique» une éventuelle présence du président de la République à l'Assemblée... Ce fut voté, et maintenant on se rend compte que la réforme du fonctionnement de l'Assemblée nationale vient boucler une présidentialisation dangereuse du pouvoir. Trop tard !
Mais comment expliquer aux électrices et aux électeurs que la suppression de fait du droit d'amendement au Parlement constitue une atteinte grave à leurs libertés ? Ils sont à mille lieues de ce sentiment, comme ils sont étrangers aux atteintes au droit de grève, bafoué par tous les services minimum, par toutes les pressions directes ou indirectes... Le gouvernement proposera « dans un délai d'un mois » les « ajustements utiles » à la loi sur le service minimum dans les transports, après une concertation avec les partenaires sociaux et les élus, a déclaré hier à l'Assemblée le ministre du Travail, Brice Hortefeux, devant des travées vides sur sa gauche ! On va faire mieux, et ainsi, on finira par interdire, de fait, ce droit constitutionnel, au nom du profit, indispensable au bonheur national.
DEPENDANCE RECLAMEE

Il n'existera même plus de contre-pouvoir, puisque les médias influents souhaitent devenir tributaires de soutiens financiers du gouvernement. Ils envisagent de devenir eux-mêmes d'ardents défenseurs du libéralisme qui leur a permis d'exister, sous la tutelle financière du pouvoir. Le patron de M6, Nicolas de Tavernost, a annoncé, hier, que son groupe, ainsi que TF1 et Canal+, réfléchissaient de concert à un plan d'aide qu'ils allaient demander pour la télévision privée : « le seul secteur en France qui ne soit pas aidé est la télévision privée ». Angoissant, car ça revient à demander à ce que Nicolas Sarkozy accorde, avec l'argent des contribuables payant déjà une redevance... ,des subsides publics aux chaînes privées. Canal+, TF1 et M6, réfléchissent en effet au plan d'aide qu'elles vont demander pour la télévision privée. C'est d'un cynisme absolu !
En mai 2008, les trois groupes concurrents ont créé l'association des chaînes privées, pour défendre leurs intérêts face à la télévision publique sans publicité. A propos de France Télévisions, pour laquelle l'Etat a garanti 450 millions d'euros jusqu'en 2011 afin de compenser l'arrêt de la pub après 20h00, Nicolas de Tavernost a estimé « surréaliste d'avoir des recettes garanties dans une période de crise économique intense ». Comme on sait que désormais, malgré les réticences du Sénat, la nouvelle loi confèrera à Nicolas Sarkozy le droit de nommer le Directeur de France Télévisions et le Directeur de l'information, qu'il accordera donc les subventions publiques aux télés et aux journaux privés, il y a tout lieu de se faire du mauvais sang ! Peu de réactions... Peu de manifestations... Peu de révoltes !
Les médias décisifs sont contrôlés et seront dépendants. Les serviteurs de l'Etat sont désormais aux ordres du pouvoir en place, et traquent l'opposant, même de « petit » niveau. La justice perd une bonne part de son indépendance avec la réforme de l'instruction. Besancenot est convoqué au commissariat pour avoir bousculé un supérieur hiérarchique lors d'une manifestation. Filoche est renvoyé en correctionnelle pour être allé défendre, en qualité d'inspecteur du travail, une déléguée syndicale lors d'un C.E. Les femmes et les hommes d'extrême gauche de Tarnac sont sur les rails de leur condamnation, sur des faits encore très flous. Un vendeur de l'Humanité-dimanche est déféré au tribunal pour « vente de marchandises dans un lieu public sans autorisation »... C'est quotidien, mais tant que l'on n'est pas concerné, on ne regarde pas, on n'entend pas, on ne parle pas !
FICHES A TORT
Pire, nous sommes désormais surveillés, fichés et archivés, chaque jour un peu plus ! Auberge espagnole, où s'entassent pêle-mêle suspects, témoins et victimes. Fourre-tout truffé d'erreurs, dont la mise à jour laisse complètement à désirer. Fichier indiscret, portant atteinte à la vie privée. Le STIC (Système de traitement des infractions constatées) s'attire d'innombrables critiques... Est-ce que l'on doit mettre dans un même fichier à la fois des auteurs, des victimes et des témoins? Cela est d'autant plus problématique, lorsque les policiers qui alimentent le fichier se trompent de catégorie. Parfois, celui qui est témoin ou victime se retrouve suspect, explique le secrétaire général du Syndicat de la magistrature.
D'après lui, le STIC est « truffé d'erreurs ».
Lors de ses dernières constatations dans ce fichier, la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) a notamment relevé,  que sur trois ans, plus... d'un million d'informations n'ont pas été transmises par les procureurs pour des classements sans suite d'affaires. Autre problème : la mise à jour. « On n'actualise pas les données du STIC. Les gens restent suspects, alors qu'ils ont été innocentés », déplore le juge. La sortie du fichier est aléatoire, selon la Ligue des droits de l'Homme (LDH) qui reproche aux juges d'instruction et aux procureurs de ne pas systématiquement transmettre l'information lorsqu'un suspect est mis hors de cause.
Le STIC est aussi consulté lors des enquêtes professionnelles de moralité auxquelles sont soumis les candidats à la Fonction publique ou à des postes d'agent de sécurité. Le spectre des professions concernées va du garde champêtre au magistrat. Aussi, lorsque le fichier comporte des mentions erronées, cela peut aboutir à ce que des gens soient écartés d'un certain nombre d'emplois sans raison valable. Enfin, certaines mentions posent un problème d'atteinte à la vie privée, et n'ont pas leur place dans un fichier de police, comme l'appartenance ethnique ou l'orientation sexuelle.
Députés muselés, médias dépendants et noyautés, fusillés pour l'exemple, fichage fallacieux et dangereux, droit de grève bafoué, marchandisation sélective de l'éducation, système judiciaire soumis, Constitution malmenée... et tant d'autres réalités, contribuent à faire douter de l'avenir. L'indifférence va frapper, et malheur à celles et ceux qui s'élèveront contre ces réalités d'une autre époque : ils paieront l'addition, sans que personne ne se soucie d'eux.
Mais je déblogue...

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commentaires

P
Je crains que malheureusement nos concitoyens ne soient de plus en plus blasés et fatalistes devant ce qui se prépare. J'ai recommandé ton blog auprès d'une dizaine d'amis, le seul qui se soit manifesté n'y "va jamais car il n'aime pas la politique".....mes collègues de travail sont trop préoccupés par leurs soucis quotidiens et se foutent de ce qui se passe, ceux qui ont voté pour le nain se taisent et laissent filer, quelques voix s'élèvent parfois parmi ceux qui ont voté contre mais ils prêchent dans le désert. Les gens se lassent de ce qu'ils considèrent comme de l'opposition systématique et primaire; finalement, je me demande si la meilleure façon de contrer Sarko à terme ne serait pas de le laisser faire et de ne plus parler de lui.  
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G
Merci Jean-Marie,François Mitterrand doit se retourner dans sa tombe; Il n'aura pas connu le Coup d'Etat permanent de SARKO.Vivement une VIe République primo-ministérielle!Aussi, ce 29 janvier, nous n'hésiterons pas à nous mêler à la rue.Mon amitié, Gilbert de Pertuis en Luberon
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Y
remarquable article !!!
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