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2 mai 2007 3 02 /05 /mai /2007 07:24
Le 1er mai 2007 aura eu plusieurs facettes symboliques de l’évolution sociale. Alors que depuis des décennies il ne symbolisait que les nécessités de la lutte des classes et du triomphe de la lutte révolutionnaire censée avoir donné le pouvoir au prolétariat il devient extrêmement hétérogène. Une mutation profonde est en train de s’opérer sur cette journée fériée dans de nombreux pays : on oublie lentement mai sûrement sa véritable signification pour des raisons contradictoires. Celui de cette année aura été à cet égard révélateur de cette tendance qui s’amorce.
D’abord dans les pays qui avaient l’habitude de faire du 1° mai une démonstration de force, une base de leur idéologie de masse, une référence en faveur de la Révolution on sent bien que le temps de ces manifestations, aussi spontanées qu’un défilé du 14 juillet, est révolu. Hier ni à Moscou, ni à Pékin on a lié militaire et populaire. Les immenses ballets réglés comme du papier à musique pour corps d’armée n’ont pas eu lieux. Les successeurs de Mao et de Staline ont remisé au placard les concepts révolutionnaires mettant à Pékin ou à Moscou des dizaines de milliers de personnes dans la rue. Plus aucun rapport entre les gigantesques revues d’antan et les défilés théâtraux avec ballons et calicots de cette année. On ne veut plus des souvenirs de ces 1er mai qui fleuraient bon la guerre froide et la révolution en marche. On entre dans le monde capitalisme éclairé et il n’est pas question de célébrer ces révoltes ouvrières qui mirent à mal le principe du profit.
SEULE CUBA RESISTE
En Chine "communiste" on a ainsi massivement préféré consacrer ce mardi à ses traditionnelles… vacances. Cent cinquante millions de Chinois étaient attendus sur les routes, les rails et dans les airs, à l'occasion de la Fête du travail qui marque avant tout le début de l'une des trois grandes semaines de vacances de l'année. Hier seul un éditorial du Quotidien du Peuple, organe du Parti communiste, a loué le mérite des ouvriers, piliers du développement d'un pays cependant marqué par des écarts de richesse de plus en plus flagrants. "Dans notre pays, tous les travailleurs sont respectables, quel que soit leur secteur industriel et quel que soit leur poste", indique l'éditorial publié en première page sous le titre "Construire ensemble une société harmonieuse, jouir ensemble des résultats du développement". Mais pour le reste il n’y a plus rien à voir. De quoi faire se retourner Mao dans son Mausolée ! Le 1er mai de la révolution permanente a été rayé des pratiques étatiques.
Il n’y a plus guère qu’à Cuba que l’on poursuit la tradition. Il est vrai que La Havane reste la seule ville de la planète où l’on eut encore retrouver des signes tangibles du marxisme léninisme d’antan. Mais hier il manquait Fidel Castro, le seul survivant, très mal en point, d’une époque révolue. Il avait appelé tous les Cubains à faire de ce défilé un rassemblement anti-américain mais il n'est pas lui-même apparu. Ce qui n'a pas empêché des centaines de milliers de personnes de défiler devant le podium, comme au bon vieux temps en brandissant des photos de leur idole et en scandant "Fidel, Fidel" qui pour la première fois en près… de quarante ans, n'était pas présent pour ce grand rendez-vous.
L'absence de Castro a déçu de nombreux Cubains et certains craignent de ne jamais voir leur dirigeant retrouver l'énergie et la vitalité qui étaient siennes avant son intervention chirurgicale due à une hémorragie intestinale en juillet. Son frère Raul a présidé la parade mais il n'a pas prononcé de discours comme s’il avait peur de la comparaison avec ceux que Fidel délivrait antérieurement. Seul au Venezuela, dans un message diffusé à l’occasion de la Fête du Travail, le président Hugo Chavez a annoncé le retrait du pays de la Banque mondiale et du FMI, qui sont selon lui des "mécanismes de l'impérialisme" pour exploiter les pays pauvres. Il a aussi annoncé une hausse de 20% du salaire minimum… Mais il faut bien avouer que c’est le seul à avoir secoué le monde capitaliste !
UNE RESONNANCE PARTICULIERE
Impossible de ne pas observer qu’en France cette journée n’a plus du tout le même sens en 2007 qu’il y a 70 ou 50 ans. Hier on a, selon les statistiques crédibles, retrouvé un zeste de mobilisation à quelques jours d’un scrutin pouvant avoir des conséquences désastreuses pour le monde du travail contrairement aux affirmations fallacieuses de Sarkozy. Sa frénésie de populisme lui a en effet obligé à enfiler le bleu de chauffe et de s’approprier des mots, des slogans, des clichés pouvant le faire condamner pour publicité électoraliste mensongère. Les travailleurs devraient lui faire… sa fête clairement en ce 1er mai et l’augmentation de leur participation aux manifestations syndicales atteste que l’angoisse du lendemain existe bien sur les mesures que ne manquera pas de prendre le frère de l’un des ex-candidats malheureux à la présidence du MEDEF. Dans tous les défilés le constat aura été unanime : Sarkozy inquiète celles et ceux qui pressentent l’insécurité sociale.
Cette mobilisation selon la CGT a pris cette année "une résonance particulière" à cinq jours du second tour de l'élection présidentielle. Elle a permis de rappeler " l'importance du droit de grève et des libertés syndicales dans toute démocratie", droits que " les salariés ne se laisseront pas reprendre ". Elle s'est félicité de ces manifestations d'" unité des salariés, des étudiants, des chômeurs, des retraités, à l'heure où certains font de l'opposition entre telle ou telle catégorie de salariés ou de chômeurs le fil conducteur de leur stratégie politique ". Et illico hier soir TF1 diffusait un vaste reportage sur… les abus aux droits sociaux pour évidemment poursuivre le travail de sape en faveur de Sarkozy ! La télé répond à la rue.
On n’a pas eu cependant dans les grandes villes le sentiment que la combativité solidaire du monde du travail était en marche. Le 1er mai français de 2007 ressemblait à ces jours de convalescence qui suivent une longue maladie. On sait que l’on va mieux mais on n’est pas certain d’avoir encore assez de force pour aller au combat qui peut s’ouvrir dans les prochains mois.
DES SENSATIONS VIEILLES DE 39 ANS
Le 1er mai de Charléty aura été exceptionnel à plus d’un titre. D’abord parce qu’il a rassemblé au moins autant de monde que les syndicats dans Paris. Ensuite il a retrouvé des sensations qu’il avait oubliées depuis 39 ans. Certes ce n’est pas nécessairement un excellent souvenir mais le 27 mai 1968 hante encore le lieu. Vendant quelque peu la peau de l’ours avant de l’avoir tué, un certain Michel Rocard se déclara prêt à servir la France et à assumer un pouvoir qu’il pensait déjà à prendre. Il était à contre temps. L’opération, où quelques milliers de supporters jouèrent, en fait, les dindons de la farce, connut le flop que l’on sait... A l'heure où Nicolas Sarkozy renouvelle ses critiques sur le mouvement estudiantin et ouvrier de mai 1968, le lieu n'a pas été choisi au hasard. Le 27 mai 1968, les étudiants non… communistes et les forces de gauche y avaient organisé un grand rassemblement, auquel avaient participé entre 30.000 et 50.000 personnes. On les a retrouvées hier autour de Ségolène Royal. Le symbole a fonctionné en cette fête du travail militant mais il faut espérer que le résultat ne sera pas le même !
Le 1er mai 2007 demeurera donc dans l’Histoire comme étant un moment clé de la campagne des Présidentielles. Quand les stades s’ouvrent à la politique ce n’est jamais innocent car ce n’est qu’en situation de crise profonde comme ce fut atrocement le cas pour le Vel’ d’Hiv ou celui de Santiago du Chili. Charlety a pris rang dans ces lieux où se fait l’Histoire.
Nicolas Sarkozy " n'est pas le général de Gaulle " mais il "rêve de connaître à nouveau un Mai 68 pour y remettre de l'ordre", a dénoncé dans ce stade mythique Ségolène Royal. Face à son rival UMP, elle a dit son refus de "la brutalité dans la conduite des affaires publiques, qui peut mettre en danger la paix sociale, la paix civile. Ce danger est contenu dans le programme du candidat de la droite. Je veux la paix civile dans mon pays! Doc Gyneco, ce n'est pas André Malraux. François Mauriac, ce n'est pas Bernard Tapie. M. Sarkozy, ce n'est pas le général de Gaulle", a-t-elle lâché après les critiques émises dimanche à Bercy par le candidat UMP sur Mai 68. "Quelle mouche l'a piqué, car Mai 68 c'était il y a quarante ans!", a-t-elle grincé. "Tout semblait pourtant calme autour du Palais omnisports de Bercy, mais à l'écouter à l'intérieur, ce n'était que voitures fumantes, barricades, charges de police". Pour peu on se serait cru dans l’un de ces 1er mai d’avant-guerre quand la lutte des classes n’était pas encore passée de mode. Le mot manifestation a repris tout son sens.
Mais je déblogue… 
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commentaires

X
Élections piège à quoi ?  <br />  <br /> <br /> http://electionspiegeaquoi.hautetfort.com/  <br />  <br />
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L
J'ai regardé le débat, et madame Ségolène Royal a été comme à l'acoutumée, agressive et méprisante. la démocratie ce n'est pas le dialogue avec tout le monde mais de toute façon ceux qui ne pensent pas comme moi mettez vous de côté. chaque débat que j'ai vu d'elle ne m'incite pas à lui faire confiance. Méprise ses adversaires n'est pas digne d'un chef d'état. Pour quelqu'un qui se dit de dialogue je trouve qu'elle a beaucoup coupé Monsieur Sarkozy dans ses phrases, provocant une cacophonie..<br /> Maintenant en parlant d'incantation, vous oubliez le "donnant-donnant"ou "gagnant gagnant" ca sonne bien mais ne veut pas dire grand chose.<br />  
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Y
Le fait que Chavez se soit "retiré" du fmi et de la banque mondial est ce qu'il faut retenir de ce premier mai, ces deux organismes c'est vrai asphyxiant certains pays en voie de développement par des règles qui sont valables pour des pays mais pas pour d'autres.<br /> En ce qui concerne le discours de Charletty, si on ne se contente pas de lire ce qu'en a relayé la presse (quelques phrases sur près d'une heure de discours ) on s'aperçoit qu'elle a parlé aussi de son projet. Il suffit aussi si on veut vraiment le connaître d'aller sur : http://www.desirsdavenir.org/lafrancepresidente/  , on est loin des incantation "travailler plus pour gagner plus", "je ne suis pas du côté des fraudeurs", " la France on l'aime ou on la quitte ", "après la nuit vient le jour " (cette dernière phrase n'est pas de Sarkozy mais c'est à peu près du même accabit ).
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E
@ Marc d'here<br /> Regarde bien le débat ce soir, tu auras ainsi enfin accès au projet de Ségolène Royal ! Je suis sûr que demain matin, au réveil, tu auras enfin compris qu'il faut voter Ségolène Royal ! ;-)
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M
Il semble que le grand concert gratuit, hier à Charlety ait attiré du monde....On aurait été surpris du contraire....<br /> Royal en a profité pour prendre la parole un moment :  critiques renouvelées contre son concurrent et à peu près aucune mise en avant de propositions.....Tout cela est bien habituel.....<br />  
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