Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
21 mai 2008 3 21 /05 /mai /2008 08:09
Ce soir, pour la troisième fois en 9 ans, deux clubs issus d'un même pays s'affronteront en finale de la Ligue des Champions. Cette fois ce sera deux clubs anglais, Chelsea et Manchester United qui se retrouveront dans le stade de Moscou. Cette finale est une affiche alléchante car elle oppose le premier de première League face au second. Le match aller s'était soldé par une victoire des Mancuniens (2-0) alors que le second à l'avantage des blues (2-1). Bref, cela montre que ce match sera sans doute très serré et très engagé car les deux équipes veulent absolument ce titre. Même si Manchester paraît être le favoris de la rencontre car c'est lui qui a gagné le championnat, il ne faut pas oublier Chelsea qui a gagné la coupe face à Manchester. Encore une fois on portera au pinacle ce football anglais dont on prétend qu'il serait le meilleur du monde. Il est vrai que l'on en a pour le prix sur le terrain : du lourd !
Les attaques des deux équipes sont très différentes avec Tévez-Rooney et Ronaldo pour M-U et Drogba-Anelka pour Chelsea. Enfin, le style des deux équipes sont très différents puisque M-U s'appuie sur son attaque alors que Chelsea mise plutôt sur la défense. Une opposition parfaite. Ou presque.
L'ironie de cette mouture 2008 a voulu en effet que le trophée se dispute en Russie, terre d'Abramovich, qui se fait passer pour un milliardaire au grand coeur pour le football alors qu'il ne fait que convertir ses milliards dans un pays occidental pour les récupérer un jour ou l'un jour ou l'autre. Une victoire des Blues aurait donc un goût tout particulier pour l'argentier aux ressources infinies, dont les investissement pour Chelsea sont estimés à près d'un milliard d'euros sur cinq ans. Il a d'abord fallu éponger 120 millions d'euros de dette lors de son arrivée au club avant de révolutionner le marché des transferts en écrasant la concurrence à coups de pétrodollars. Du coup, presque rien ni personne ne résiste à Chelsea lorsqu'Abramovich sort son chéquier.
Les 400 millions d'euros investis sur un quinquennat pour enrôler Didier Drogba, Andreï Shevchenko et la pléiade de joueurs internationaux venus gonfler les rangs blues n'auront pas tardé à porter leurs fruits sur le plan sportif. Abramovich peut se targuer d'être le propriétaire d'un club qui a remporté deux Premier League (2005, 2006), une Coupe d'Angleterre (2007) et deux Coupes de la Ligue anglaise (2005, 2007). En quelques années, Chelsea est donc passé du statut de second couteau à celui de poids lourd du football mondial. Pour que le tableau soit parfait, le club des beaux quartiers londoniens se doit désormais de régner sur l'Europe. Chelsea c'est un puits de pétrole quotidien dont on ne sait pas encore qui l'épuisera. Le football prend des allures de course au trésor et non pas de poursuite d'un ballon rond.
LE ROUGE TROUBLE
Roman Abramovich, self made man à l'histoire incroyable aimerait plus que tout être couronné dans son pays natal, la où sa fortune immense s'est bâtie au fil du temps. Simple mécanicien dans une entreprise de bâtiment moscovite en 1987, Abramovich est, 21 ans plus tard, le quinzième homme le plus riche du monde. Hier celui qui est aussi le gouverneur de la province du Tchoukotka, au nord est de la Russie, pourrait aussi être l'homme le plus heureux du monde mais il pourrait aussi illustrer l'adage voulant que l'argent ne suffise pas à faire le bonheur.
La carrière du propriétaire de Chelsea est plus ou moins confuse mais elle n'a pas commencé dans la facilité. En utilisant la Perestroïka de Gorbachev qui autorise la création de petites entreprises privées, les coopératives il a lentement constitué sa fortune. Il dirige une coopérative nommée Uyut qui se spécialise dans la fabrication de jouets en polymères. Avec l'éclatement de l'Union soviétique et la libéralisation massive de l'économie,
Abramovitch s'intéresse aux affaires boursières et devient un trader plus habile que celui de la Société Générale. Il figure parmi les premiers à s'intéresser à la vente de pétrole sans s'occuper de l'étape de production, achetant le pétrole à des producteurs locaux au prix du marché domestique, puis le revendant à l'étranger grâce à une licence d'exportation.
En 1992 un juge ordonne l'interrogation d'Abramovitch en se référant à l'article 90 du code criminel russe ; à cette époque il était en affaires avec une entreprise lettono-américaine. Il est accusé d'avoir détourné un train transportant des millions de litres de pétrole sur le trajet Oukhta - Moscou, ce train étant sous les ordres d'une entreprise qu'il dirigeait. Le train est retrouvé en Lettonie, et l'enquête révèle que ce pétrole était transporté à Riga grâce à de faux documents et destiné à être vendu sur place à l'armée. Abramovitch est placé en garde à vue dans le cadre de cette affaire, et sera blanchi.
La proximité d'Abramovitch avec Boris Eltsine et sa famille est établie : il est un proche de la fille de l'ancien Maire de Moscou et qui fut sa conseillère lorsqu'il était président. Certains détails de cette relation ont été rapportés par un général dans sa biographie, ou il décrit qu'Abramovich était chargé des finances de la famille de Boris Eltsine qu'il a su récompenser de son soutien.
Son intérêt pour les marchés financiers permet à Abramovitch de s'enrichir progressivement et de se créer des contacts. Il fait notamment connaissance avec le sulfureux Boris Berezovski ce qui va lui permettre de franchir tous les obstacles, et qui donnera le véritable départ de sa carrière. Grâce aux contacts de dans le monde des affaires et au sein du pouvoir, l'ascension des deux hommes est très rapide et c'est le Président de Chelsea qui s'en sortira finalement le mieux. Pour lui la finale de la Champion's League vaudra un titre de noblesse décerné par la société britannique, une sorte d'anoblissement alors que la Mafia rôde autour de son ascension exceptionnelle. Derrière son nom se cache en effet bien des ombres douteuses mais... une coupe suffirait à les effacer et à faire oublier tout ce qu'il y a eu avant.
DES DETTES ENORMES
Elles ont beau être les deux reines du football européen actuellement, la situation financière de Chelsea et Manchester n'est pas des plus enviables. Bien au contraire. A en croire le quotidien britannique The Guardian, les deux finalistes de la Ligue des champions de football sont endettés à hauteur d'1,5 milliard de livres à eux d'eux, soit près de... 1,9 milliard d'euros. Une bagatelle à l'échelle de la Champion's League puisque tous les grands clubs alignent des bilans négatifs parfois moins important mais bien réels comme le Barça et le Real !
D'après le journal, les «Blues» de Chelsea doivent 935 millions d'euros à leurs créanciers, dont 578 au propriétaire du club, le russe Roman Abramovich, dont l'investissement s'est fait sous forme de prêt et non de don comme indiqué jusqu'alors. Pour les «Red Devils» de Manchester, la situation est encore plus dramatique, puisque l'endettement s'élèverait à 764 millions de livres, soit 960 millions d'€... Impressionnant quand on ramène ces sommes aux budgets des clubs français. Michel Platini, le président de l'UEFA, a plusieurs fois répété son inquiétude devant l'endettement des clubs de football. Il a indiqué qu'il était favorable à l'introduction de règles de gestion plus strictes, sur le modèle de celles en place en France ou en Allemagne. En attendant, ce soir, on joue une finale à Moscou avec des clubs vivant à crédit. L'obtention de la coupe aux grandes oreilles sera le moment rêvé de mettre la main sur un joli pactole qui permettrait d'assainir le compte en banque des deux clubs. Le sport, là dedans, il vous faudra éviter de vous nourrir d'illusions en vous installant devant votre télé !
INQUIETUDE PRUDENTE
Michel Platini, le président de l'UEFA, a plusieurs fois répété son inquiétude devant l'endettement des clubs de football. Il a indiqué qu'il était favorable à l'introduction de règles de gestion plus strictes, sur le modèle de celles en place en France ou en Allemagne. Pour lui, il est vital d'agir, au niveau européen, pour redonner au foot un visage davantage humain, social et équitable sur le plan économique. Michel Platini disait il y a peu : « Je ferai tout mon possible pour convaincre la Commission européenne, les élus et les autorités politiques que la loi européenne devrait fournir au sport un cadre légal protecteur. » Face aux multiples dérives qui touchent le monde du ballon rond, le but - au sens propre comme au figuré - est de protéger le football, ses racines, ses valeurs, ses clubs, ses équilibres, ses communautés pour que demain il ne soit pas l'apanage de quelques dirigeants et politiciens qui veulent confisquer à leur guise ce sport qui appartient à tous et pas seulement à des hommes d'affaires qui s'achètent un club pour leur image et surtout réaliser d'éventuels profits. Ils parient sur des effectifs comme les émirs du golfe le font avec leurs écuries de chevaux de courses.
Le football est désormais rongé à tous les étages par la notion de profit. Nul ne songerait à contester la nécessité de payer à des tarifs convenables des joueurs assurant un spectacle de qualité mais il est inimaginable de constater les salaires ou les dessous de table versés. On en arrive à des aberrations du type de celle des joueurs du Paris Saint Germain qui auraient été solliciter une... prime de leur club pour ne pas descendre ! Ce soir on se demande si les joueurs des deux clubs évolueront avec à l'esprit la valeur originelle du jeu ou celle des sommes qui seront en jeu... Dans le fond les actionnaires américains de Manchester ou le propriétaire russe de Chelsea auront une calculette dans une main et le fanion de leur club dans l'autre. Sur un seul match le vainqueur peut en effet recevoir au maximum 22 millions d'euros ce qui permettrait de payer les frais divers du club et les cadeaux offerts aux invités du Président !
Tôt ou tard l'UEFA devra imposer un contrôle sur la gestion de ces monstres médiatiques que sont devenus une douzaine de clubs en Europe. Il faudra beaucoup de courage pour s'attaquer à des icebergs financiers dont les exploitants se nomment Roman Abramovich, Silvio Berlusconi, Ramon Calderon Ramos, Josep Lluís Núñez, Jean Michel Aulas ou Dreyfus... Ils attendent de pied ferme des contrôleurs rémunérés comme des femmes de ménage qui voudraient mettre leur nez dans des comptes dont sait à l'avance qu'ils doivent être hors jeu !
Mais je déblogue...

 

Partager cet article
Repost0

commentaires

A
Là où on retrouve le journaliste sportif.... chassez le naturel, il revient aussitôt ! Intéressant et instructif, comme toujours, même lorsqu'on n'a aucune compétence en matière de football...
Répondre