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10 décembre 2008 3 10 /12 /décembre /2008 07:17

Il arrive que les gens les plus contestataires, les plus motivés pour défendre l'intérêt général, finissent par avoir raison devant la justice. Les faucheurs volontaires de champs de plantations d'OGM en plein champ ont longtemps été harcelés, sanctionnés, accablés par un Etat républicain qui leur reprochait d'enfreindre la loi. Ils le sont encore, alors qu'au terme d'une longue procédure et après plusieurs avertissements, la Cour européenne de Justice a condamné hier la France à une amende de 10 millions d'euros pour avoir tardé à transposer une loi européenne sur les OGM. Le texte en question a finalement été inscrit dans la législation française en juin dernier... alors qu'il aurait dû l'être bien avant. Mais on sait fort bien que la république applique aux autres ce qu'elle refuse de faire pour elle-même. La justice européenne a en effet estimé que les atermoiements français étaient graves, car la directive visait à « protéger la santé humaine et l'environnement ». Dommage que ce principe n'ait pas été véritablement admis par une justice qui s'appuyait, encore une fois, sur des principes obsolètes.
En 2004 déjà, la Cour européenne de Justice avait condamné la France pour n'avoir pas transposé avant 2002 une directive de 2001 sur le contrôle de la dissémination des OGM dans l'environnement. Sans provoquer de réaction. Au terme d'une longue procédure et après plusieurs avertissements, la Cour européenne de Justice a hier, de nouveau, condamné la France.
Cette fois, l'amende est lourde : 10 millions d'euros. Mais, par les temps qui courent, le budget de la République Française n'en est pas à 10 millions d'euros près, puisque chaque jour, le Président miracle déniche des milliards et des milliards pour résorber la crise, provoquée par les milliards qu'il a accordés aux milliardaires, ou que ces derniers ont gagné en mettant en péril l'ensemble de l'économie mondiale.
Cette condamnation est, heureusement pour la France, en-deçà des attentes de la Commission européenne qui réclamait 38 millions d'euros. Les juges européens ont également estimé que la directive ayant été transposée de façon complète en juin 2008, une astreinte ne s'impose pas. Il n'aurait plus manqué que ça ! Les tribunaux ont par contre condamné José Bové à de pauvres milliers d'euros d'amende et à des journées de travail réparateur, alors que la France n'était pas en conformité avec les prescriptions européennes pour avoir simplement cédé au lobby des céréaliers !
Car c'est bien là le paradoxe de cette affaire : la France est condamnée pour avoir vraiment trop tardé et plus encore pour avoir manqué de courage politique. La Cour européenne de Justice a mis en avant « la gravité du manquement » de la France, la directive non-transposée étant destinée à « protéger la santé humaine et l'environnement ainsi qu'à faciliter la libre circulation des marchandises ». La directive, approuvée en 2001 par les gouvernements de l'UE, régulait la culture des OGM dans le bloc, la production de semences et les importations de produits contenant des OGM, ainsi que leur traitement à des fins industrielles.
Les gouvernements européens avaient jusqu'à octobre 2002 pour amender leur législation afin d'y inclure la directive... Sauf que nos gouvernements successifs (y compris de gauche ) ont toujours reculé l'échéance avec l'espoir de se concilier les voix des semenciers, des maïsiculteurs, des gens de la FNSEA, qui hurlaient au scandale quand d'autres appelaient à l'acte d'intérêt général, en refusant les plantations en milieu ouvert. Le problème, c'est qu'en matière d'environnement, la France a une sacrée ardoise supplémentaire vis-à-vis de l'Europe ! Elle est soigneusement cachée aux contribuables.

LA TETE SOUS L'EAU SALE
L'avis motivé envoyé par Bruxelles à la France, le 31 janvier 2008, a été par exemple, la dernière étape avant une nouvelle saisine de la Cour européenne par la Commission, à l'encontre de la France, pour sa mauvaise application de la directive sur les eaux résiduaires urbaines. Cette directive, qui date de 1991, impose aux villes de plus de 10 000 habitants, qui rejettent leurs eaux usées dans des « zones sensibles », d'être équipées d'un système de collecte et de traitement particulier, pour protéger les rivières et éviter les atteintes à la qualité de l'eau. L'enjeu paraît ainsi important. Si la directive a été correctement transposée en France en juin 1994, de nombreuses communes ont paisiblement continué à ne pas respecter les nouvelles procédures, et à ne pas installer les infrastructures nécessaires, après le délai fixé au... 31 janvier 1998.
Après des avertissements, une mise en demeure et un avis motivé, la Commission a donc fini par saisir la CJCE. S'en est suivie une première condamnation de la France en 2004. En effet, 11 zones « sensibles », c'est à dire où la concentration des nutriments dans l'eau est trop élevée, n'avaient pas été classées comme tel. En Ile de France, par exemple, les communes qui rejettent leurs eaux usées dans ces zones ne sont toujours pas équipées des infrastructures nécessaires. De plus, dans les zones qui ont été classées « sensibles », 121 communes continuent à déverser leurs eaux sans le traitement adéquat.
Malgré sa condamnation, la France ne s'est pas pour autant conformée aux exigences européennes, mais a, semble-t-il, essayé de « passer entre les mailles du filet ». Ainsi, en 2006, le gouvernement a déclaré les zones sensibles, mais les eaux qui y sont rejetées ne sont toujours pas traitées dans 140 villes (notamment Paris). S'agissant des 121 localités qui ne respectaient pas les exigences européennes, la France a mis en place un astucieux stratagème pour restreindre le nombre de communes en infraction. En effet, elle a réorganisé ces localités, pour en créer, non plus 121, mais 164. De plus petite taille, un certain nombre d'entre elles ne dépassent donc plus le seuil des 10 000 habitants, et ne tombent donc plus sous le joug de la législation communautaire. Qualifiant cette réorganisation d' « inacceptable », la Commission a réitéré la demande de conformité formulée par la CJCE, qui visait donc toutes les communes précédemment identifiées. Signe de « bonne volonté », la France notifie à Bruxelles, en mai 2007, ses plans pour se mettre en conformité avec la directive, mais prévient que la décision de la CJCE ne sera respectée... qu'en 2011.
La Commission a donc engagé une nouvelle procédure d'infraction, cette fois-ci pour sanctionner le non respect de la décision de justice rendue par la Cour en 2004. Après deux lettres de mise en demeure, elle a adressé à la France un avis motivé, le 31 janvier dernier, en indiquant que les efforts de la France étaient insuffisants, et le retard pris dans ce domaine « déplorable ». La France devra donc prouver sa motivation, sa volonté de se conformer aux exigences environnementales communautaires, sous peine d'être à nouveau condamnée par la CJCE et de se voir cette fois imposer une amende ainsi qu'une astreinte forfaitaire qui pourraient s'élever à... 300 ou 400 millions d'euros, selon le rapport de juin dernier établi par Fabienne Keller, sénateur du Bas-Rhin. Une pacotille !

DU NITRATE PAS D'ARGENT
Il est vrai que, brutalement, les Préfets ont été incités à mettre les Maires fautifs face à leurs responsabilités; mais devant cette menace, le gouvernement français, qui n'a pas respecté son engagement de publier, en septembre, sur Internet, la liste des communes en infraction, cherche maintenant à exercer une pression sur les collectivités. Il menace ainsi de réduire les subventions des agences de l'eau, et a annoncé la mise en place d'un prêt bonifié de la Caisse des dépôts pour encourager la mise en œuvre tant attendue de la directive. La suite au prochain épisode... car il est certain que dans le contexte économique actuel et les fortes réticences des élus à augmenter les surtaxes déjà jugées trop fortes par les abonnés, il y aura encore des non réalisations au 31 décembre 2010 !
Les subventions de l'agence de l'eau ont donc disparu pour les réseaux de collecte, et tout ce qui reste va être orienté vers les station d ‘épuration, en sachant que, par exemple, en Gironde on compte 4 installations totalement non-conformes et que ce sont les seules qui seront aidées !
La France prend un retard considérable, et malgré le catalogue de bonnes intentions du Grenelle, elle ne sera pas en conformité, sur ce thème, avec les directives européennes. Ainsi, malgré les multiples rappels à l'ordre de Bruxelles, la France n' a pas réussi à résorber totalement, en Bretagne, la pollution aux nitrates des rivières où est captée l'eau destinée à la consommation. La Cour européenne de justice a été saisie, et devrait condamner la France à d'importantes pénalités journalières.
Finis les atermoiements, les délais et les sursis : la Commission européenne, lassée de l'incapacité de la France à éradiquer la pollution aux nitrates des eaux de surface en Bretagne, a décidé de saisir la Cour européenne de justice. Bruxelles compte réclamer une très lourde sanction : la France pourrait se voir infliger une amende forfaitaire de plus de 28 millions d'euros, assortie d'une astreinte journalière de 117 882 euros ! Qui rêvait d'un Etat exemplaire, donnant des leçons aux collectivités locales, trop dépensières, trop nombreuses, trop incompréhensibles ?
Mais je déblogue...

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commentaires

P
C'est la grande théorie de nos napoléons actuels. J'ai toujours raison et les autres ont toujours tort. Donc, faites ce que je dis, tout ce que je dis, et rien que ce que je dis ! Mais surtout ne faites pas ce que je fais, sinon, gare aux sanctions..... Ne prenez pas la parole, ne protestez pas, ne contestez pas. Contentez-vous d'obéir, de payer vos impôts, et de faire confiance aux grands hommes qui vous gouvernent.Jusqu'à quand nos concitoyens vont-ils supporter ce genre de conception de la démocratie ? Nos parents et nos grands parents ne se sont certainement pas battus pour en arriver là.Et si l'Europe n'est pas satisfaite de la manière dont la France applique ses directives, et ses condamnations, peu importe, au bout du compte, ce sont les français qui paieront...
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