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15 janvier 2009 4 15 /01 /janvier /2009 07:17

L'art de gouverner, c'est tout simplement celui de faire des priorités au bon moment. Ce précepte est plus que jamais d'actualité quand s'accumulent les difficultés. Un réponse forte, solide, structurée, et pas forcément une succession de réformes aussi décalées qu'inutiles, constituerait la meilleure solution à une situation de crise. Nous sommes dans la situation où les murs de la maison France s'effondrent, alors que le Président de la république se préoccupe de changer le papier peint, de verrouiller pour l'avenir les portes, de nettoyer les vitres ou d'éteindre le feu dans la cheminée... Une sorte de frénésie, destinée à faire oublier la destruction massive de ce qui constitue pourtant l'essentiel. On peut même se poser la question de savoir si la crise terrible qui s'annonce ne sert pas de « couverture » à la construction d'un état d'exception. Le temps presse, car les réformes les plus dangereuses passent inaperçues, dans une période où tout le monde est persuadé qu'il lui faut échapper aux « éboulements » qui arrivent de tous les côtés.
Hier par exemple, la réalité est devenue encore plus angoissante, mais bien évidemment, personne dans les médias n'a mis en synergie des informations dispersées à travers des dépêches d'agences fragmentaires. Le désastre financier entraîne vers le fond le secteur économique, avec ses conséquences terribles pour l'emploi, clé de la relance éventuelle. Par exemple, alors que la crise n'avait pas atteint son niveau maximum, elle se traduit en France par une nette hausse des défaillances d'entreprises, qui ont progressé de 15% en 2008 par rapport à l'année précédente. En cause : la « détérioration de l'activité économique et des conditions de financement ».
Cette augmentation des défaillances est la plus forte hausse annuelle enregistrée depuis... 1991, relève l'étude, selon laquelle près de 57.700 entreprises ont fait l'objet d'une procédure collective l'an dernier, un record depuis 1997 (61.000). Et elle ne fait que débuter, car elle va s'amplifier au cours du premier semestre 2009. Ne pas l'écrire serait manquer à toute lucidité. De partout, dans le quotidien, les signes avant-coureurs d'un désastre concret s'amoncellent, mais on attendra que le tsunami soit là pour réagir.  En 2008, ce sont près de 218.800 salariés (+26%) qui ont été directement concernés par la défaillance de leur entreprise. Après une hausse de 6% en 2007, les défaillances d'entreprises en France ont progressé de 15% en 2008, conséquence de l'accélération de la détérioration de l'environnement économique et financier au deuxième semestre, en France et à l'international.
UNE INFLATION IGNOREE
Cette tendance a touché l'ensemble des entreprises, sans distinction de taille, même si on note une accélération des défaillances d'entreprises employant plus de... 100 salariés (+52%) et des « grandes défaillances », avec 209 sociétés réalisant un chiffre d'affaires de plus de 15 millions d'euros, contre 117 recensées en 2007.
L'industrie enregistre une remontée globale des défaillances de 4%, avec des hausses beaucoup plus marquées dans l'industrie automobile (+38%), les biens d'équipement (+17 %) et l'agroalimentaire (+9%).
Les secteurs de la construction et de l'immobilier, qui comptent pour 29% dans l'ensemble des défaillances, portent l'essentiel de la hausse de la sinistralité (respectivement +22% et +48%) et subissent de plein fouet le retournement du marché immobilier. Les travaux publics vont se ralentir. Le phénomène va s'accentuer : inutile d'être Madame Soleil pour le prédire ! Dans le transport, le nombre de faillites ne cesse d'augmenter (+23%) avec même une accélération au cours du quatrième trimestre 2008.
La hausse des défaillances dans l'hôtellerie-restauration et le commerce de détail (respectivement +26% et +23%) confirme l'essoufflement des dépenses des ménages, lié à l'effondrement du pouvoir d'achat de leurs revenus. La liste s'allonge ! Elle va devenir encore plus dramatique fin mars, lorsque les derniers carnets de commandes de 2008 seront épuisés. C'est contre la déstructuration de ce tissu économique extrêmement précieux que devrait lutter massivement le gouvernement, en relançant des investissements et non pas en saupoudrant des crédits ressemblant à des paillettes de fête posées sur une jambe de bois.
Alors qu'il avait assassiné les enseignants en détruisant 13 000 emplois, Nicolas Sarkozy a pratiqué le clientélisme le plus ostentatoire en annonçant... 160 millions d'euros de crédits supplémentaires pour l'achat de véhicules de police ! Il est vrai que l'industrie automobile en a besoin et que les instituteurs ne peuvent que consommer des stylos à bille ! Impossible d'ignorer que les professeurs risquent désormais autant leur vie (qui osera comparer le nombre de plaintes pour agressions physiques dans les transports publics ou l'enseignement avec celui de la police ?) et qu'il est indispensable d'engager des policiers ou des gendarmes pour les protéger ! Les réformes pourront succéder aux réformes, mais elles ne changeront rien à la réalité économique !
DECALAGE TOTAL
Le Fonds monétaire international annonce pourtant clairement la couleur au moment où le parlement se vante d'avoir adopté un plan de relance totalement dépassé par les événements. Il prévoit une aggravation du ralentissement économique en 2009. L'annonce en a été faite officiellement par son directeur, Dominique Strauss-Kahn, en visite en Hongrie. Une étude, qui sera bientôt rendue publique, indique une forte baisse des prévisions de l'organisme concernant la croissance mondiale, par rapport aux estimations faites en octobre 2008. « Les perspectives économiques du monde pour 2009 se présentent mal » a résumé DSK après une rencontre avec le premier ministre hongrois. Espérons que ce message parviendra jusqu'à l'Elysée, afin qu'on se préoccupe des véritables dangers qui menacent le pays et pas de ceux qui peuvent éventuellement détruire la démocratie, et que l'on s'ingénie à créer de toutes pièces.
En quoi le muselage de l'opposition à l'Assemblée nationale va-t-il améliorer le quotidien des entreprises, des chômeurs, des étudiants ? Qui m'expliquera en quoi la suppression des juges d'instruction changera le sort des ouvriers jetés à la rue, ou celui des prisonniers enfermés dans des conditions déplorables ? La suppression de la publicité sur les chaînes publiques, ou la nomination par l'Elysée du directeur de l'information de France Télévisions, modifieront-elles les charrettes de licenciements qui vont emprunter des chemins pavés de mauvaises intentions ? Personne ne peut croire que ces trois sujets sont, par exemple, en adéquation avec l'urgence de la situation... Il faudrait demander à DSK ce qu'il pense de ces réformes, totalement déconnectées du contexte réel, alors qu'il a imposé aux Hongrois, par exemple, des mesures économiques sans précédents. En fait,, Nicolas Sarkozy sent venir le vent de la révolte, et il va essayer de se prémunir de la catastrophe en... rétablissant l'autorisation de licenciement ! Un comble, mais comme il aura du mal à l'assumer, il va tenter de mouiller les syndicats.
DE VIEILLES RECETTES
Le chef de l'Etat a réuni à l'Elysée les organisations syndicales, alors que celles-ci accusent des entreprises de profiter de la crise pour mener des restructurations ou des plans sociaux que leur situation économique ne justifie pas. « Il semble que dorénavant le président soit pour un dispositif de surveillance, de suivi de ce qui se passe dans le secteur industriel un peu plus précis » et « qui implique les organisations syndicales », a constaté le secrétaire général de la CGT Bernard Thibault.
Il s'agit de « distinguer les entreprises qui ont réellement des difficultés et celles qui profitent de la crise avec possibilité de sanction », a expliqué le secrétaire général de Force ouvrière Jean-Claude Mailly. « Maintenant, il faut des résultats concrets (...) Si c'est uniquement de la com', ça ne sert à rien », a-t-il averti.
En attendant, « nous allons continuer de soulever le cas d'entreprises profitables qui maintiennent des plans de restructuration ou de licenciement alors que leur situation économique ne justifie pas ces mesures ».
On ne peut pas, à la fois clamer la nécessité de réformer le capitalisme en profondeur, et faire en sorte que rien ne change dans le fonctionnement des entreprises, et ce serait donc Nicolas Sarkozy qui trierait le bon grain de l'ivraie, avec la même efficacité qu'il l'a fait pour le bouclier fiscal, les parachutes dorés ou l'irresponsabilité bancaire ! Aucune originalité dans le plan de relance voté hier. Que de vieilles recettes sans aucune portée réelle !
Quant aux salariés, les voilà condamnés à subir une récession de grande ampleur qu'aucun plan de relance ne pourra jamais effacer : les «initiés» ont tout raflé, expliquait Attali. En laissant aux Etats, massivement endettés, un casse-tête : comment sortir d'une crise de l'emprunt... en empruntant ?
Comment sortir de cette crise de confiance, en détruisant le fondement  même de la confiance, qui est l'égalité de traitement des citoyens ? Comment éviter de sombrer quand on détruit une organisation sociale au plus mauvais moment ? Comment ne pas voir des arrières-pensées dans une frénésie uniquement destinée à mettre en place partout des mesures préventives de maîtrise du pouvoir personnel? Comment ne pas voir une forme de Bonapartisme s'installer?
Pour une fois, François Hollande résume parfaitement, sur son blog, ce que je ressens. Sous le titre « monarchie absolue », le député de Tulle explique « qu'exercer sa mission n'est pas décider seul en République. Avoir le pouvoir n'est pas détenir tous les pouvoirs. Et c'est là la dérive, le glissement, et pour tout dire la confusion... Pour rester dans la métaphore monarchique, c'est du despotisme éclairé, ce qui finirait par faire regretter le temps des Mérovingiens ». Comme diraient quelques citoyens « éclairés » c'est bien le sujet!
Mais je déblogue...

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