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3 janvier 2007 3 03 /01 /janvier /2007 08:10
Il va falloir avoir une estomac blindé pour digérer tout ce que nous allons devoir ingurgiter dans les prochaines semaines. Non seulement il y aura, pour quelques convaincus, des couleuvres politiques à avaler, mais aussi des promesses indigestes ou des engagements, dont la date de péremption sera largement dépassée, à engloutir. Chaque citoyen sera placé devant son menu " présidentiable ", qui lui sera concocté par des maître queux étoilés ou par des serveurs stylés. Charge à eux de persuader le convive qu’il a de la chance d’être un invité ayant à choisir entre gens de bonne compagnie, et éviter ainsi de finir par se prononcer entre une gargote infâme avec un vieux gâte-sauce n’ayant que des produits périmés à faire mijoter, et une auberge espagnole où on vous promet tout, mais où finalement vous ne bectez que ce que vous avez amené !
La société des apparences fera qu’il y n’y aura sur la table que des " plats " qui vous conviennent. Une sorte de gigantesque buffet des promesses, où vous aurez la possibilité de ne trouver que ce qui offre, pour vous, un intérêt. Et paradoxalement, les députés sortants de la majorité UMP vont vite se mettre aux fourneaux de la cuisine électorale, et concocter dans la précipitation des textes répondant à absolument toutes les envies. Hier, c’était particulièrement évident, avec le problème du logement.
Il avait fallu que Chirac voie le film " Indigènes " pour que les pensions des soldats d’Outre Mer soient enfin revalorisées. Ce qui était impossible depuis des décennies est devenu possible en quelques mois… Le même scénario n’a cessé de se répéter pour chaque sujet brûlant. A la moindre pression médiatique, les parlementaires sortent un projet de loi concocté, vite fait bien fait, sur le gaz du Palais Bourbon ! Quand on a compris le système, c’est facile : il suffit de bien mettre en évidence le problème, et d’insister dans le spectaculaire, pour décrocher une réponse provisoire qui dure !
Dans de nombreuses chroniques de l’année écoulée, sur L’AUTRE QUOTIDIEN, j’avais largement souligné que le logement constituait le sujet fondamental de la société actuelle. J’ai même, le 2 octobre dernier dans un texte intitulé " Un Fabius génétiquement modifié ", rappelé que , lors de ma première rencontre avec lui, en 2003, j’avais lourdement insisté sur cette facette de la vie quotidienne, qui deviendrait un véritable enjeu électoral. Grâce aux tentes posées à Paris, sous le regard avide des caméras, nous voici enfin face à cette réalité : la pénurie ne concerne pas que les SDF mais des dizaines de milliers de " sans logis " de toutes catégories. Les députés UMP pourront, avant de revenir devant leurs électeurs apitoyés, voter un texte de bonne conscience en février, mais ils ne résoudront rien du tout avant… 7 ou 8 ans. Il faudra attendre la parution des décrets d’application de leur loi du " droit opposable ", rechercher des collectivités volontaires qui ne seront pas nombreuses (surtout à droite) avant les municipales, trouver le foncier à un prix acceptable, vaincre les réticences systématiques des habitants déjà installés, lancer les programmes, effectuer les appels d’offre et enfin construire… Autant écrire que toute promesse n’est à prendre au sérieux que si elle s’accompagne de la prise en compte de ces obstacles incontournables, dont personne ne vous parlera. Alors, les annonces de Chirac, de ses potes députés, de Sarkozy ou de qui que ce soit, ne sont que des paroles " verbales " pour gogos peu concernés par le problème !
LE DROIT DE CHACUN A UN LOGEMENT DECENT
Le président du groupe d'étude parlementaire sur les sans-abri, Georges Fenech, qui vient de se secouer après les réveillons, a présenté hier brutalement une proposition de loi instituant un droit au logement opposable à l'Etat.

"Le droit de chacun à un logement décent et indépendant est un droit opposable à l'Etat", stipule son "projet" de proposition de loi de cinq articles. Le député UMP du Rhône a expliqué qu'il s'agissait d'une "base de départ" qui devait être "discutée, approfondie, améliorée" avant son dépôt sur le bureau de l'Assemblée nationale.

Georges Fenech a souhaité que ce dispositif puisse être adopté par l'Assemblée nationale et le Sénat avant la fin des travaux du Parlement fin février. Et il a espéré que les parlementaires de l'opposition s'y associeraient.
Le parlementaire UMP s'exprimait lors d'une conférence de presse en présence d'Augustin et Jean-Baptiste Legrand, de l'association Les Enfants de Don Quichotte. Ces derniers se sont félicités du "consensus" politique sur cette proposition de loi, alors que personne, absolument personne, ne sait comment, en cas de condamnation par les Tribunaux, les " sans logis " obtiendront satisfaction. Personne n’a le courage de leur dire que l’on ne peut attribuer des logements que… quand il y en a de disponibles. Et il n’y en a pas dans un créneau financier abordable. Plus de 300 demandes sont en attente dans les organismes gérant le parc de loyers modérés sur Créon, alors qu’en moyenne, au maximum une douzaine des 248 logements se libère dans une année !

Lors de la présentation de ses vœux le 31 décembre, Jacques Chirac avait souligné la nécessité de "mettre en place un véritable droit au logement opposable, c'est-à-dire faire du droit au logement une réalité". Qu’il vienne donc faire une permanence un mercredi matin en mairie de Créon, et il verra que sa réalité est impossible à mettre en œuvre !

Le fondateur du Samu social, Xavier Emmanuelli, a quant à lui été chargé par le ministère de l'Emploi, de la Cohésion sociale et du Logement de rédiger un rapport sur le droit au logement opposable, qui sera remis aux alentours du 13 janvier au gouvernement. Je lui propose de venir sur le terrain constater la réalité, avant d’écrire son pensum. Il apprendra peut-être que le chemin est long, très long, entre la loi et sa transcription dans les faits !
Avant d’avancer des propositions théoriques  il serait donc indispensable de tordre le cou à un certain nombre de contre-vérités qui pourrissent le climat autour du logement. D’abord, il faudrait arrêter de lui accoler le qualificatif de social, car il n’existe que dans très peu de cas. En fait, outre le montant du loyer, il faut, en effet, évoquer les conditions d’attribution. Personne ne connaît véritablement le processus, qui est totalement différent de ce que la rumeur publique colporte. Ensuite, il n’est pas inutile de parler des barèmes financiers mis en place par les organismes gestionnaires, qui sont souvent très surprenants pour les demandeurs.

UN EXEMPLE CONCRET
Prenons une exemple concret. Sur un programme de 60 logements ayant passé tous les obstacles énoncés ci-dessus, il est important de savoir que seulement 6 d’entre eux entreront dans la catégorie des lieux proposés à des personnes en difficulté (Rmistes, personne seule sans revenus avec des enfants, sans logis, petits salariés précaires…), une trentaine sera réservée aux système de collecte du 1% logement, 3 iront aux fonctionnaires (policiers, enseignants, employés de la Préfecture), les constructeurs s’en réserveront… 11 et la Mairie disposera, si tout va bien, de 10 des espaces qu’elle aura accepté sur son territoire ! Voici la réalité. Le logement dit social n’existe pas !
Les six premiers qui en relèvent sont attribués par les services sociaux, après une lutte féroce entre les assistantes sociales d’un secteur dépassant largement celui de la commune et du canton ! La dernière affectation à Créon a été effectuée entre… 28 " sans logis " de tous ordres, ce qui veut dire tout simplement que 27 sont demeurés dans la même situation ! Les " 1 % patronal " ne passent pas par la Mairie, mais sont réservés aux employés des très grandes entreprises (Ford, Auchan, Carrefour…) qui alimentent les caisses du CILG ou d’autres organismes plus confidentiels. Il est donc indispensable d’avoir un travail stable en CDI, et une capacité financière garantie de 3 fois le montant du loyer, pour en bénéficier. Peut-on considérer qu’il s’agit de " cas sociaux " comme voudraient le faire croire des signataires malhonnêtes de pétitions obscènes, quand on sait que leurs revenus sont parfois cinq ou six fois le RMI ? Enfin, pour obtenir l’un de ceux qui restent, il faut avoir un CDI ou deux garants pouvant payer à votre place en cas de défaillance… Si l’on ne passe pas du premier coup, il faudra attendre des départs pour espérer être servi. Or, sur Créon, des retraités sont dans leur logement " ex HLM " depuis plus de 30 ans. Le prix dément du foncier, lié à sa rareté, ainsi que celui des conditions d’obtention des crédits, font que le " turn-over " se raréfie, et les jeunes générations se retrouvent sur d’interminables listes d’attente. Les fameux logements De Robien, qui coûtent à la puissance publique, à cause des exonérations fiscales, finalement plus cher que les aides de l’Etat données pour un HLM public… faussent totalement le marché. Ils tuent les organismes HLM, incapables de mettre sur la table le prix obtenu par les propriétaires pour la vente de leurs terrains… Les maires refusent de se soumettre aux quotas, car ils ont peur de la réaction de leur population. Ils se fixent comme objectif : zéro HLM sur ma commune ! La situation est beaucoup plus catastrophique qu’on veut bien le dire aux " Jités " de l’opinion dominante, car en plus, la règle des 20 % n’est respectée que par peu de villes, ce qui fait que parfois, même dans 20 ans, en allant vite, ils n’auront pas rempli leurs engagements. Et les élections approchant, il serait étonnant qu’ils se pressent pour accorder des permis de construire… pour des foyers de SDF dans leur cité, comme à Neuilly par exemple ! Si la loi change cette réalité, alors je croirai dans un lien direct entre la puissance divine et l’abbé Pierre !
Mais je déblogue…
  JE VOUS AVAIS PREVENUS MAIS VOUS NE M'AVIEZ PAS CRU Relisez la chronique de L'AUTRE QUOTIDIEN intitulée "Bons sentiments et bons comptes" puis http://tempsreel.nouvelobs.com/actualites/societe/20070103.OBS5300/tsunami__17_associationsmontrees_du_doigt.html
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commentaires

L
Il faut trouver les terrains aussi
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N
Excellent article comme souvent.  En le lisant j'ai revu combien "les gens nés quelques part" ont peur. Ils ont peur que l'on défigure leur village, leur rue. Que l'on mette à mal leur petite tranquilité bien pensante. Ils souhaitent rester entre eux.  Alors des logement sociaux, cher monsieur, vous n'y pensez pas !<br /> Aussi en ce début d'année je souhaite vous faire part d'un texte écrit par Raùl Rivero, poète et écrivain cubain qui purge une peine injuste dans les geoles de castro : "Fermer les portes est une profession, une spécialité, un crime que nous commettons tous les jours au nom de la peur.."  Et Laurent Fabius d'ajouter  "lutter contre toute forme d'injustice n'est ni plus ni moins que l'exercice de la liberté".<br /> L F parraine cet écrivain et comme je suis fan, je vous conseille comme lui de lire "Souvenirs oubliés" afin de maintenir en éveil permanent nos consciences humaines.<br /> A tous et à toutes une belle année 2007 dans le plein exercice de nos responsabilités.<br />  
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